En Belgique, selon les estimations, entre 200.000 et 250.000 personnes souffrent d'une forme ou l'autre d'insuffisance cardiaque et, chaque année, elles sont environ 15.000 à apprendre qu'elles sont atteintes de cette pathologie qui est donc fréquente et qui présente par ailleurs un taux de survie à cinq ans de 46% seulement.

" Tout porte à croire que le nombre de patients souffrant d'insuffisance cardiaque ne fera qu'augmenter à l'avenir ", constate le Dr Elke De Vuyst, cardiologue à l'ISPPC CHU de Charleroi depuis 2013. " Cette évolution est notamment due au vieillissement de la population et aux maux qui l'accompagnent, comme le diabète, les problèmes de tension et l'obésité. "

Une clinique spécialisée

" Afin d'améliorer les soins liés à la pathologie, nous avons décidé de les réorganiser en ouvrant en ce début d'année une clinique ciblant les insuffisants cardiaques et en particulier les personnes à haut risque, soit parce qu'elles ont été hospitalisées plusieurs fois au cours de la dernière année, soit parce qu'elles présentent des épisodes fréquents de décompensation ", poursuit Elke De Vuyst.

" Nous sommes plusieurs cardiologues et une infirmière et nous travaillons de façon multidisciplinaire avec les différents intervenants au niveau cardiaque et d'autres spécialistes au sein du CHU de Charleroi, des endocrinologues, des diabétologues et des néphrologues. "

Une nouvelle solution

En parallèle, depuis le mois d'octobre dernier le CHU de Charleroi propose une nouvelle solution de monitoring à distance pour les patients atteints d'insuffisance cardiaque. Cette solution passe par l'utilisation d'une application mobile.

" Dans le traitement de l'insuffisance cardiaque, nous disposons de plusieurs solutions et outils, notamment les médicaments à prendre et éventuellement des interventions chirurgicales, parfois le placement d'un pacemaker ", explique le Dr De Vuyst. " Mais la base de la prise en charge, cela reste le comportement du patient qui doit faire attention à ce qu'il mange et ce qu'il boit, doit avoir une bonne hygiène de vie et doit surveiller régulièrement certains de ses paramètres. Tout cela demande une certaine rigueur et une certaine connaissance pour pouvoir interpréter les données. Or, nous avons constaté que c'est compliqué pour de nombreux patients. D'où la nouveauté que nous leur proposons. "

Si ce projet pilote est concluant, la télémédecine pourrait être intégrée à d'autres services de l'hôpital.

Avec Intersysto et Proximus

Cette nouveauté consiste en un système révolutionnaire de télémédecine qui permet une surveillance à distance de plusieurs paramètres à savoir la tension, le taux de saturation en oxygène, le rythme cardiaque ou encore le poids.

" Cinquante licences ont été accordées dans le cadre de ce projet pilote et nous avons fourni un smartphone à la moitié des patients, l'autre moitié utilisant le leur ", précise la cardiologue. " Une application mobile de surveillance à distance des patients, 3S Homecare, a été développée par Intersysto, une start-up de la région de Tournai, et téléchargée sur les smartphones. Cette application est activée avec un code. Les patients ont aussi reçu un pèse-personne, un oxymètre et un tensiomètre, ces outils étant connectés à l'application par Bluetooth. "

" Le matin, le patient ouvre son application qui lui dit de prendre ses paramètres et qui les enregistre automatiquement. Grâce aux interfaces de programmation d'application de Proximus et une connexion sécurisée, les données saisies par les patients sont ensuite transmises à l'hôpital, qui les ajoute dans le système d'information médicale du CHU de Charleroi. "

Des seuils à ne pas dépasser

" Chaque jour, les cardiologues et le personnel infirmier du CHU de Charleroi peuvent analyser les informations reçues, ce qui permet une réaction rapide et une prise en charge précoce en cas de dégradation. Des seuils ont été déterminés, et quand un des paramètres dépasse un certain seuil, le système génère une alerte orange ou rouge. "

" Par exemple, si le poids du patient augmente en peu de temps, cela peut être le signe d'un oedème pulmonaire. Dans ce cas, le médecin contacte le patient pour évaluer la situation et lui transmettre des instructions, comme décider d'adapter son traitement, ou lui demander de contacter son médecin traitant, ou mettre en place une consultation d'urgence à l'hôpital si nécessaire. "

Objectif préventif

Suivi minutieux du patient qui peut rester à domicile, identification plus rapide des signaux qui indiquent un danger, plus grande réactivité du corps médical, diminution du nombre d'hospitalisations, décès prématurés parfois évités, coûts en moins pour la société et le patient... la technologie offre une valeur ajoutée importante.

" Avant, le patient notait tous ces paramètres dans un petit carnet dont il se munissait lors des consultations et le médecin ne découvrait les mauvaises données que bien trop tard ", relève le Dr De Vuyst. " Désormais, nous pouvons intervenir directement, quasiment en live. L'objectif est préventif et devrait permettre de limiter le taux de réhospitalisation. Et donc améliorer le taux de survie ! "

Implication du patient

Le monitoring à distance, c'est aussi un moyen d'impliquer davantage le patient dans tout le processus. " Le système requiert une collaboration importante de sa part. Et s'il n'est pas assidu, il est rappelé à l'ordre via un sms. D'autre part, il peut aussi voir ses paramètres qui sont conservés dans l'historique de l'application et, s'il constate une déviation trop importante, il peut directement nous contacter. "

" Les patients qui participent au test sont très motivés et enthousiastes. Après cinq mois, dans l'ensemble, leur satisfaction est importante. Ils se sentent plus responsables de la gestion leur santé. Ils sont rigoureux dans la prise de leurs paramètres et ils trouvent que l'application est facile d'utilisation, y compris certains octogénaires. Ils sont aussi rassurés par le fait que nous les contactons et qu'ils reçoivent des SMS quand ils n'ont pas encodé leurs données. Ils savent qu'une équipe tout entière est là pour eux. "

Un projet très prometteur

Pour les médecins généralistes, le monitoring à distance peut également être un vrai plus. " Nous les informons de la participation de leur patient et nous invitons ce dernier à respecter la première ligne et à d'abord contacter son médecin traitant. Il va de soi qu'il faut toujours un contact direct entre le patient et le médecin, ne serait-ce que pour les examens physiques. Le médecin reste un conseiller. Notre app n'est pas destinée à le remplacer. Il ne doit pas hésiter à l'utiliser et à prendre connaissance de l'historique des données que son patient enregistre. Cela peut l'aider. "

Si on croit les dires d'Elke De Vuyst, ce projet pilote qui s'étale sur un an s'annonce très prometteur. " Et s'il est concluant, la télémédecine pourrait être intégrée à d'autres services de l'hôpital ", assure-t-elle. " Le principe du monitoring à distance, une méthode en pleine expansion, peut pour ainsi dire s'appliquer à toutes les maladies chroniques. Je songe par exemple à la glycémie chez les diabétiques, au suivi des patients atteints du cancer, à celui des personnes souffrant de problèmes rénaux, etc. "

Coordination: laurent.zanella@roularta.be

En Belgique, selon les estimations, entre 200.000 et 250.000 personnes souffrent d'une forme ou l'autre d'insuffisance cardiaque et, chaque année, elles sont environ 15.000 à apprendre qu'elles sont atteintes de cette pathologie qui est donc fréquente et qui présente par ailleurs un taux de survie à cinq ans de 46% seulement." Tout porte à croire que le nombre de patients souffrant d'insuffisance cardiaque ne fera qu'augmenter à l'avenir ", constate le Dr Elke De Vuyst, cardiologue à l'ISPPC CHU de Charleroi depuis 2013. " Cette évolution est notamment due au vieillissement de la population et aux maux qui l'accompagnent, comme le diabète, les problèmes de tension et l'obésité. "" Afin d'améliorer les soins liés à la pathologie, nous avons décidé de les réorganiser en ouvrant en ce début d'année une clinique ciblant les insuffisants cardiaques et en particulier les personnes à haut risque, soit parce qu'elles ont été hospitalisées plusieurs fois au cours de la dernière année, soit parce qu'elles présentent des épisodes fréquents de décompensation ", poursuit Elke De Vuyst." Nous sommes plusieurs cardiologues et une infirmière et nous travaillons de façon multidisciplinaire avec les différents intervenants au niveau cardiaque et d'autres spécialistes au sein du CHU de Charleroi, des endocrinologues, des diabétologues et des néphrologues. "En parallèle, depuis le mois d'octobre dernier le CHU de Charleroi propose une nouvelle solution de monitoring à distance pour les patients atteints d'insuffisance cardiaque. Cette solution passe par l'utilisation d'une application mobile." Dans le traitement de l'insuffisance cardiaque, nous disposons de plusieurs solutions et outils, notamment les médicaments à prendre et éventuellement des interventions chirurgicales, parfois le placement d'un pacemaker ", explique le Dr De Vuyst. " Mais la base de la prise en charge, cela reste le comportement du patient qui doit faire attention à ce qu'il mange et ce qu'il boit, doit avoir une bonne hygiène de vie et doit surveiller régulièrement certains de ses paramètres. Tout cela demande une certaine rigueur et une certaine connaissance pour pouvoir interpréter les données. Or, nous avons constaté que c'est compliqué pour de nombreux patients. D'où la nouveauté que nous leur proposons. "Cette nouveauté consiste en un système révolutionnaire de télémédecine qui permet une surveillance à distance de plusieurs paramètres à savoir la tension, le taux de saturation en oxygène, le rythme cardiaque ou encore le poids." Cinquante licences ont été accordées dans le cadre de ce projet pilote et nous avons fourni un smartphone à la moitié des patients, l'autre moitié utilisant le leur ", précise la cardiologue. " Une application mobile de surveillance à distance des patients, 3S Homecare, a été développée par Intersysto, une start-up de la région de Tournai, et téléchargée sur les smartphones. Cette application est activée avec un code. Les patients ont aussi reçu un pèse-personne, un oxymètre et un tensiomètre, ces outils étant connectés à l'application par Bluetooth. "" Le matin, le patient ouvre son application qui lui dit de prendre ses paramètres et qui les enregistre automatiquement. Grâce aux interfaces de programmation d'application de Proximus et une connexion sécurisée, les données saisies par les patients sont ensuite transmises à l'hôpital, qui les ajoute dans le système d'information médicale du CHU de Charleroi. "" Chaque jour, les cardiologues et le personnel infirmier du CHU de Charleroi peuvent analyser les informations reçues, ce qui permet une réaction rapide et une prise en charge précoce en cas de dégradation. Des seuils ont été déterminés, et quand un des paramètres dépasse un certain seuil, le système génère une alerte orange ou rouge. "" Par exemple, si le poids du patient augmente en peu de temps, cela peut être le signe d'un oedème pulmonaire. Dans ce cas, le médecin contacte le patient pour évaluer la situation et lui transmettre des instructions, comme décider d'adapter son traitement, ou lui demander de contacter son médecin traitant, ou mettre en place une consultation d'urgence à l'hôpital si nécessaire. "Suivi minutieux du patient qui peut rester à domicile, identification plus rapide des signaux qui indiquent un danger, plus grande réactivité du corps médical, diminution du nombre d'hospitalisations, décès prématurés parfois évités, coûts en moins pour la société et le patient... la technologie offre une valeur ajoutée importante." Avant, le patient notait tous ces paramètres dans un petit carnet dont il se munissait lors des consultations et le médecin ne découvrait les mauvaises données que bien trop tard ", relève le Dr De Vuyst. " Désormais, nous pouvons intervenir directement, quasiment en live. L'objectif est préventif et devrait permettre de limiter le taux de réhospitalisation. Et donc améliorer le taux de survie ! "Le monitoring à distance, c'est aussi un moyen d'impliquer davantage le patient dans tout le processus. " Le système requiert une collaboration importante de sa part. Et s'il n'est pas assidu, il est rappelé à l'ordre via un sms. D'autre part, il peut aussi voir ses paramètres qui sont conservés dans l'historique de l'application et, s'il constate une déviation trop importante, il peut directement nous contacter. "" Les patients qui participent au test sont très motivés et enthousiastes. Après cinq mois, dans l'ensemble, leur satisfaction est importante. Ils se sentent plus responsables de la gestion leur santé. Ils sont rigoureux dans la prise de leurs paramètres et ils trouvent que l'application est facile d'utilisation, y compris certains octogénaires. Ils sont aussi rassurés par le fait que nous les contactons et qu'ils reçoivent des SMS quand ils n'ont pas encodé leurs données. Ils savent qu'une équipe tout entière est là pour eux. "Pour les médecins généralistes, le monitoring à distance peut également être un vrai plus. " Nous les informons de la participation de leur patient et nous invitons ce dernier à respecter la première ligne et à d'abord contacter son médecin traitant. Il va de soi qu'il faut toujours un contact direct entre le patient et le médecin, ne serait-ce que pour les examens physiques. Le médecin reste un conseiller. Notre app n'est pas destinée à le remplacer. Il ne doit pas hésiter à l'utiliser et à prendre connaissance de l'historique des données que son patient enregistre. Cela peut l'aider. "Si on croit les dires d'Elke De Vuyst, ce projet pilote qui s'étale sur un an s'annonce très prometteur. " Et s'il est concluant, la télémédecine pourrait être intégrée à d'autres services de l'hôpital ", assure-t-elle. " Le principe du monitoring à distance, une méthode en pleine expansion, peut pour ainsi dire s'appliquer à toutes les maladies chroniques. Je songe par exemple à la glycémie chez les diabétiques, au suivi des patients atteints du cancer, à celui des personnes souffrant de problèmes rénaux, etc. "