Depuis le début de l'année, la pandémie du coronavirus occupe l'actualité. Malgré cette omniprésence, la couverture médiatique de l'épidémie n'aide pas à comprendre sa réelle ampleur. Le catastrophisme - qui est justifié dans le cas des drames individuels, de la situation dans les maisons de repos et dans certains hôpitaux - domine.

Ce ton anxiogène masque cependant une dimension essentielle de la crise : si, grâce au confinement, le pire semble avoir été évité, la catastrophe est désormais davantage économique et sociale que sanitaire.

Les chiffres bruts qui nous sont assénés chaque jour ne signifient pas grand-chose s'ils ne sont pas rapportés à la population. On entend ainsi que ce week-end, l'épidémie " a franchi la barre des 200 000 morts ", mais aucun article ne nous rappelle qu'il s'agit en réalité de 0,0028% de la population mondiale. Le sida, par exemple, a encore causé 770 000 décès en 2018.

Les journalistes justifient souvent leur valeur ajoutée par l'analyse et la mise en contexte qu'ils apportent, ce qu'ils font rarement en rapportant les chiffres de la maladie. Ainsi, les Etats-Unis " sont le pays le plus touché", sans préciser qu'avec 164 décès par million d'habitants, ils étaient, le 25 avril, beaucoup moins affectés que la France (346), l'Italie (436) ou l'Espagne (490).

A quelques exceptions près (Espagne, Lombardie, Ile de France, Grand Est), l'épidémie a été bien gérée par les systèmes de santé européens qui n'ont pas été débordés. Le confinement a très probablement fonctionné et, grâce à celui-ci, la surmortalité due au coronavirus est bien réelle, mais relativement faible par rapport à certains scénarios.

2.807 morts supplémentaires

En 3 semaines, selon sciensano le COVID-19 a fait 2.807 morts " supplémentaires " par rapport à ce qui était attendu et 4.877 en 4 semaines (chiffre provisoire)

Parmi les décès observés supplémentaires, 95% avaient plus de 65 ans, 47% plus de 85 ans et presque tous atteints de comorbidités. Le taux de mortalité augmente aussi chez les moins de 65 ans (de 20% environ), mais à partir de chiffres déjà peu élevés rapportés à la population. Pour 11,5 millions d'habitants, on s'attend à 40 décès par jour dans cette catégorie d'âge (avec un intervalle de 20 à 60). Le chiffre de 60 est rarement dépassé depuis le début épidémie (voir page 18). Bien sûr, il peut y avoir des séquelles d'une contamination au covid-19 que l'on ne connaît pas encore.

En supposant, par pure hypothèse, que la surmortalité double encore, on pourrait arriver à 10.000 morts au cours de l'été. En 2018, l'épidémie de grippe a fait 3.093 décès supplémentaires au total en 12 semaines, avec une forte concentration sur quelques semaines.

Dans l'hypothèse de 10 000 décès, la surmortalité par rapport à une année avec une " grippe à forte mortalité " serait de 7.000 décès supplémentaires, soit 61 morts supplémentaires par 100.000 habitants.

En France, l'INSEE vient de publier des chiffres, passés inaperçus, sans doute parce qu'ils ne vont pas dans le sens de la dramatisation ambiante.

"Au total, le nombre de décès survenus entre le 1er janvier et le 13 avril 2020 s'élève à 202.328 ; il est supérieur à celui enregistré sur la même période en 2019 (191.342) ou en 2018 (195.085)".

Il s'agit, certes, d'une hausse de 5,7% par rapport à 2019 et de 3,7% par rapport à 2018. Mais, concrètement, cela signifie "seulement" 7.243 morts supplémentaires dans un pays de 67 millions d'habitants, soit 10,8 décès supplémentaires pour 100.000 habitants.

Normalement, pour ce genre de données, il est d'usage de comparer avec la moyenne des trois années antérieures. Curieusement, l'INSEE ne compare pas avec 2017, année qui a vu un fort épisode grippal, avec un excès de décès estimé à 21.200 personnes sur une période de dix semaines. A ce stade, il n'est donc pas encore possible de dire si la mortalité du coronavirus sera plus forte (probablement) que la grippe de 2017 d'autant plus que, toujours selon l'INSEE " le nombre de décès diminue au cours de la semaine du 11 au 17 avril par rapport à la semaine précédente en France et dans toutes les régions de France métropolitaine ".

Par ailleurs, " vingt-trois départements ont moins de décès enregistrés entre le 1er mars et le 13 avril 2020 que sur la même période de 2019 ".

Ces données - provisoires, il faut le souligner - se retrouvent ailleurs en Europe et témoignent vraisemblablement du " succès " de la politique de confinement. Le réseau européen d'enregistrement de la mortalité, Euro MOMO, compile la surmortalité dans 24 pays participants au projet. Il y a bien un pic de surmortalité liée au coronavirus, mais la surmortalité cumulée depuis le début de l'année jusqu'au 20 avril serait de 25.552 personnes décédées en comparaison de 2018 (83.769 pour 2019).

Protéger et confiner les personnes à risque

Il n'y a pas de surmortalité enregistrée chez les moins de 15 ans. Dans le groupe des 15 à 65 ans, elle ne serait, selon les données disponibles, que de 1.240 victimes sur l'ensemble des données transmises. La grande majorité des victimes ont plus que 65 ans (avec un âge moyen supérieur à 80 ans) et sont atteintes d'une comorbidité C'est évidemment ces personnes, qui devraient rester plus longtemps confinées.

Le confinement nous a protégés d'un désastre beaucoup plus grand. Dans le même temps, chaque semaine perdue à relancer l'économie augmente le nombre de faillites, le chômage, la dette et le désespoir d'une partie de la population. Après l'absence de prévoyance, c'est l'excès de précaution qui risque de faire des dégâts considérables. Dans la région bruxelloise, 30% des salariés sont déjà au chômage temporaire. Une catastrophe économique sociale et par conséquent sanitaire, se profile clairement. Cette réalité doit aussi être prise en compte et comparée aux risques que nous fait toujours courir le virus. Les chiffres actuels de la surmortalité plaident, à mon avis, pour un déconfinement plus rapide que ce qui est proposé tant en France qu'en Belgique.

Chez nous, 50.000 personnes meurent chaque année du cancer et de maladies cardiovasculaires. Près de 20.000 décès par an sont liés au tabagisme et l'alcoolisme est la quatrième cause de décès. La route tue 800 résidents par an et en blesse gravement 3.500 autres. Près de 2.000 personnes se suicident. Tout en luttant contre ces fléaux qui sont autant de drames humains, la société accepte d'en payer le prix. Apprenons à vivre avec ce coronavirus sans détruire notre prospérité et nos systèmes sociaux.

Depuis le début de l'année, la pandémie du coronavirus occupe l'actualité. Malgré cette omniprésence, la couverture médiatique de l'épidémie n'aide pas à comprendre sa réelle ampleur. Le catastrophisme - qui est justifié dans le cas des drames individuels, de la situation dans les maisons de repos et dans certains hôpitaux - domine.Ce ton anxiogène masque cependant une dimension essentielle de la crise : si, grâce au confinement, le pire semble avoir été évité, la catastrophe est désormais davantage économique et sociale que sanitaire.Les chiffres bruts qui nous sont assénés chaque jour ne signifient pas grand-chose s'ils ne sont pas rapportés à la population. On entend ainsi que ce week-end, l'épidémie " a franchi la barre des 200 000 morts ", mais aucun article ne nous rappelle qu'il s'agit en réalité de 0,0028% de la population mondiale. Le sida, par exemple, a encore causé 770 000 décès en 2018. Les journalistes justifient souvent leur valeur ajoutée par l'analyse et la mise en contexte qu'ils apportent, ce qu'ils font rarement en rapportant les chiffres de la maladie. Ainsi, les Etats-Unis " sont le pays le plus touché", sans préciser qu'avec 164 décès par million d'habitants, ils étaient, le 25 avril, beaucoup moins affectés que la France (346), l'Italie (436) ou l'Espagne (490).A quelques exceptions près (Espagne, Lombardie, Ile de France, Grand Est), l'épidémie a été bien gérée par les systèmes de santé européens qui n'ont pas été débordés. Le confinement a très probablement fonctionné et, grâce à celui-ci, la surmortalité due au coronavirus est bien réelle, mais relativement faible par rapport à certains scénarios.En 3 semaines, selon sciensano le COVID-19 a fait 2.807 morts " supplémentaires " par rapport à ce qui était attendu et 4.877 en 4 semaines (chiffre provisoire) Parmi les décès observés supplémentaires, 95% avaient plus de 65 ans, 47% plus de 85 ans et presque tous atteints de comorbidités. Le taux de mortalité augmente aussi chez les moins de 65 ans (de 20% environ), mais à partir de chiffres déjà peu élevés rapportés à la population. Pour 11,5 millions d'habitants, on s'attend à 40 décès par jour dans cette catégorie d'âge (avec un intervalle de 20 à 60). Le chiffre de 60 est rarement dépassé depuis le début épidémie (voir page 18). Bien sûr, il peut y avoir des séquelles d'une contamination au covid-19 que l'on ne connaît pas encore.En supposant, par pure hypothèse, que la surmortalité double encore, on pourrait arriver à 10.000 morts au cours de l'été. En 2018, l'épidémie de grippe a fait 3.093 décès supplémentaires au total en 12 semaines, avec une forte concentration sur quelques semaines.Dans l'hypothèse de 10 000 décès, la surmortalité par rapport à une année avec une " grippe à forte mortalité " serait de 7.000 décès supplémentaires, soit 61 morts supplémentaires par 100.000 habitants. En France, l'INSEE vient de publier des chiffres, passés inaperçus, sans doute parce qu'ils ne vont pas dans le sens de la dramatisation ambiante."Au total, le nombre de décès survenus entre le 1er janvier et le 13 avril 2020 s'élève à 202.328 ; il est supérieur à celui enregistré sur la même période en 2019 (191.342) ou en 2018 (195.085)".Il s'agit, certes, d'une hausse de 5,7% par rapport à 2019 et de 3,7% par rapport à 2018. Mais, concrètement, cela signifie "seulement" 7.243 morts supplémentaires dans un pays de 67 millions d'habitants, soit 10,8 décès supplémentaires pour 100.000 habitants.Normalement, pour ce genre de données, il est d'usage de comparer avec la moyenne des trois années antérieures. Curieusement, l'INSEE ne compare pas avec 2017, année qui a vu un fort épisode grippal, avec un excès de décès estimé à 21.200 personnes sur une période de dix semaines. A ce stade, il n'est donc pas encore possible de dire si la mortalité du coronavirus sera plus forte (probablement) que la grippe de 2017 d'autant plus que, toujours selon l'INSEE " le nombre de décès diminue au cours de la semaine du 11 au 17 avril par rapport à la semaine précédente en France et dans toutes les régions de France métropolitaine ".Par ailleurs, " vingt-trois départements ont moins de décès enregistrés entre le 1er mars et le 13 avril 2020 que sur la même période de 2019 ".Ces données - provisoires, il faut le souligner - se retrouvent ailleurs en Europe et témoignent vraisemblablement du " succès " de la politique de confinement. Le réseau européen d'enregistrement de la mortalité, Euro MOMO, compile la surmortalité dans 24 pays participants au projet. Il y a bien un pic de surmortalité liée au coronavirus, mais la surmortalité cumulée depuis le début de l'année jusqu'au 20 avril serait de 25.552 personnes décédées en comparaison de 2018 (83.769 pour 2019).Il n'y a pas de surmortalité enregistrée chez les moins de 15 ans. Dans le groupe des 15 à 65 ans, elle ne serait, selon les données disponibles, que de 1.240 victimes sur l'ensemble des données transmises. La grande majorité des victimes ont plus que 65 ans (avec un âge moyen supérieur à 80 ans) et sont atteintes d'une comorbidité C'est évidemment ces personnes, qui devraient rester plus longtemps confinées.Le confinement nous a protégés d'un désastre beaucoup plus grand. Dans le même temps, chaque semaine perdue à relancer l'économie augmente le nombre de faillites, le chômage, la dette et le désespoir d'une partie de la population. Après l'absence de prévoyance, c'est l'excès de précaution qui risque de faire des dégâts considérables. Dans la région bruxelloise, 30% des salariés sont déjà au chômage temporaire. Une catastrophe économique sociale et par conséquent sanitaire, se profile clairement. Cette réalité doit aussi être prise en compte et comparée aux risques que nous fait toujours courir le virus. Les chiffres actuels de la surmortalité plaident, à mon avis, pour un déconfinement plus rapide que ce qui est proposé tant en France qu'en Belgique.Chez nous, 50.000 personnes meurent chaque année du cancer et de maladies cardiovasculaires. Près de 20.000 décès par an sont liés au tabagisme et l'alcoolisme est la quatrième cause de décès. La route tue 800 résidents par an et en blesse gravement 3.500 autres. Près de 2.000 personnes se suicident. Tout en luttant contre ces fléaux qui sont autant de drames humains, la société accepte d'en payer le prix. Apprenons à vivre avec ce coronavirus sans détruire notre prospérité et nos systèmes sociaux.