"L es hôpitaux sont impactés financièrement par cette crise ", souligne François Burhin, directeur général d'Epicura. " Nous avons reçu un subside de la Région wallonne qui couvre une partie des coûts et des achats en matériel de protection que nous avons dû faire. Nous consommons énormément de masques (5.000 par jour ! ), de blouses, de gants... En outre, tous les prix de ces équipements ont augmenté. L'Inami a libéré une avance d'un milliard d'euros pour le secteur hospitalier. Cette aide ne couvre pas la part privée payée par les patients pour leurs soins, celle payée par les compagnies d'assurances, ce qui représente globalement 25% de nos recettes. En raison de l'arrêt des activités non-essentielles, les honoraires des médecins ont chuté depuis le 14 mars. Or, 50% du financement de l'hôpital provient des honoraires médicaux. "

Ceux qui ont accueilli beaucoup de patients ont dû réorganiser fondamentalement leurs activités et faire face à une augmentation considérable de leurs coûts. Ils doivent pouvoir bénéficier d'une juste compensation.

La comparaison de l'activité d'Epicura entre la période s'étendant du 16 mars au 10 mai 2019 et celle du 16 mars au 10 mai 2020 est parlante : diminution de 54% des admissions classiques, de 63% des passages aux urgences et de 82% des consultations (baisse finalement limitée à 70% grâce aux 5.940 téléconsultations réalisées.)

François Burhin précise que la réduction des coûts dans les services non-Covid a été très faible. " Nous avons mis quelques travailleurs au chômage économique temporaire. Relativement peu parce que certains travailleurs, par exemple les brancardiers, ont été affectés sur base volontaire à la désinfection des locaux. Des infirmières travaillant dans les consultations font de l'éducation à la santé. Quelques postes de coûts ont été supprimés, par exemple, dans les cantines (choix des menus, horaires d'ouverture...) "

Clés de répartition inadaptées

Le directeur général d'Epicura demande aux autorités de tenir compte dans leur soutien aux hôpitaux de l'implication de ceux-ci dans la lutte contre le Covid-19 (lire ci-dessous). " Actuellement, les autorités n'ont pas suivi cette logique. Ce qui m'inquiète. Il doit y avoir une certaine proportionnalité dans la compensation financière. Ceux qui ont accueilli beaucoup de patients ont dû réorganiser fondamentalement leurs activités et faire face à une augmentation considérable de leurs coûts. Ils doivent pouvoir bénéficier d'une juste compensation. Pour l'instant, le matériel de protection ou les subsides de la Région wallonne ont été répartis en fonction du nombre de lits agréés. Je remercie la Région wallonne d'avoir débloqué ce budget global de 56,55 millions d'euros mais la clé de répartition (3.500 euros par lit agréé par trimestre, ndlr) n'est pas logique : les coûts de la lutte contre le Covid ne sont pas proportionnels au nombre de lits agréés mais au nombre de patients pris en charge. Durant une période, les médicaments (Plaquenil®,le curare...) ont été répartis en fonction du nombre de lits ouverts par les hôpitaux mais pas en fonction du nombre de patients qui y figuraient. Il a fallu attendre un certain temps pour que le critère de répartition tienne à la fois compte (à 75%) du nombre de lits ouverts et (à 25%) du nombre de patients. Or, les autorités disposent de toutes les données d'activité puisque les hôpitaux doivent les encoder quotidiennement. "

Un autre milliard ?

Quant au milliard d'euros octroyé par l'Inami aux hôpitaux pour les mois de mars, avril et mai, le patron d'Epicura rappelle qu'il s'agit d'une avance. " Ce n'est pas un subside. Comme le terme l'indique, ce milliard devra être récupéré par les autorités. En outre, l'avance a été répartie en se basant sur la facturation de 2018 durant la même période. Elle ne tient donc pas compte du nombre de patients Covid et de l'impact de la crise sur les activités hospitalières. "

François Burhin estime qu'il est d'ailleurs grand temps, à la mi-mai, que les hôpitaux sachent s'ils auront droit à une autre avance de l'Inami pour les mois de juin, juillet et août. " Cette aide sera nécessaire. Selon nos estimations, notre hôpital a perdu, hors subsides et avance, de 10 à 12 millions d'euros en trois mois. C'est énorme ! Nous n'avons heureusement pas de problème de trésorerie. "

La reprise progressive des activités non-Covid va-t-elle permettre aux hôpitaux de renflouer leurs caisses ? " Nous avons 1.200 opérations annulées à reprogrammer et 1.500 examens IRM. Il faudra du temps pour réaliser toutes ces activités en respectant les critères de sécurité du PUH. Je comprends le désir des médecins de pouvoir soigner les patients qui attendent depuis des semaines et, pour ceux qui n'étaient pas impliqués dans la prise en charge Covid, de pouvoir retravailler mais cette reprise est conditionnée aux moyens humains dont nous disposons, entre autres pour allonger les plages horaires pour les consultations, opérations et examens. N'oublions pas que cette crise a épuisé physiquement et mentalement une partie du personnel. Nous avons reçu 700 certificats de maladie pour 2.500 travailleurs. "

A l'instar de Philippe Leroy (CEO du CHU Saint-Pierre, lire jdM N°2628), François Burhin estime que cette crise sanitaire doit nous obliger à repenser le système de financement de la santé. " Dans les hôpitaux, nous avons continué à travailler. Beaucoup. Il n'est donc pas normal que l'impact financier soit si élevé pour les hôpitaux parce que le financement repose en partie sur les actes. Il y en a eu mais les médecins prestataires - urgentistes, intensivistes et internistes - qui ont travaillé énormément ces derniers mois font partie des disciplines jouissant d'une nomenclature peu favorable. Ils ont travaillé trois fois plus que d'habitude mais ont produit une masse d'honoraires relativement peu élevée. Ce n'est pas normal. "

Dans JM-Hospitals N°6, publié le 18 juin, François Burhin présentera le Recovery Plan d'Epicura.

Des activités Covid-19 très différentes

Certaines parties de la Wallonie ont été plus durement touchées par le Covid-19 que d'autres. Les statistiques épidémiologiques de Sciensano le montrent clairement. Au 13 mai, Sciensano recensait 586 cas (pour 100.000 habitants) pour Liège, 494 dans le Hainaut, 471 au Luxembourg, 436 à Namur et 338 dans le Brabant Wallon. Au sein même des provinces, des communes sont plus touchées que d'autres.

A début de la crise, des hôpitaux ont également décidé de consacrer un plus grand nombre de lits de soins intensifs pour les patients Covid que d'autres. Or, c'est en fonction des disponibilités annoncées aux autorités par les hôpitaux que les patients ont été répartis dans les différentes institutions. Les institutions qui ont ouvert plus d'unités de soins intensifs Covid ont donc dû très logiquement s'investir plus, humainement et financièrement, dans la bataille.

"L es hôpitaux sont impactés financièrement par cette crise ", souligne François Burhin, directeur général d'Epicura. " Nous avons reçu un subside de la Région wallonne qui couvre une partie des coûts et des achats en matériel de protection que nous avons dû faire. Nous consommons énormément de masques (5.000 par jour ! ), de blouses, de gants... En outre, tous les prix de ces équipements ont augmenté. L'Inami a libéré une avance d'un milliard d'euros pour le secteur hospitalier. Cette aide ne couvre pas la part privée payée par les patients pour leurs soins, celle payée par les compagnies d'assurances, ce qui représente globalement 25% de nos recettes. En raison de l'arrêt des activités non-essentielles, les honoraires des médecins ont chuté depuis le 14 mars. Or, 50% du financement de l'hôpital provient des honoraires médicaux. "La comparaison de l'activité d'Epicura entre la période s'étendant du 16 mars au 10 mai 2019 et celle du 16 mars au 10 mai 2020 est parlante : diminution de 54% des admissions classiques, de 63% des passages aux urgences et de 82% des consultations (baisse finalement limitée à 70% grâce aux 5.940 téléconsultations réalisées.) François Burhin précise que la réduction des coûts dans les services non-Covid a été très faible. " Nous avons mis quelques travailleurs au chômage économique temporaire. Relativement peu parce que certains travailleurs, par exemple les brancardiers, ont été affectés sur base volontaire à la désinfection des locaux. Des infirmières travaillant dans les consultations font de l'éducation à la santé. Quelques postes de coûts ont été supprimés, par exemple, dans les cantines (choix des menus, horaires d'ouverture...) "Le directeur général d'Epicura demande aux autorités de tenir compte dans leur soutien aux hôpitaux de l'implication de ceux-ci dans la lutte contre le Covid-19 (lire ci-dessous). " Actuellement, les autorités n'ont pas suivi cette logique. Ce qui m'inquiète. Il doit y avoir une certaine proportionnalité dans la compensation financière. Ceux qui ont accueilli beaucoup de patients ont dû réorganiser fondamentalement leurs activités et faire face à une augmentation considérable de leurs coûts. Ils doivent pouvoir bénéficier d'une juste compensation. Pour l'instant, le matériel de protection ou les subsides de la Région wallonne ont été répartis en fonction du nombre de lits agréés. Je remercie la Région wallonne d'avoir débloqué ce budget global de 56,55 millions d'euros mais la clé de répartition (3.500 euros par lit agréé par trimestre, ndlr) n'est pas logique : les coûts de la lutte contre le Covid ne sont pas proportionnels au nombre de lits agréés mais au nombre de patients pris en charge. Durant une période, les médicaments (Plaquenil®,le curare...) ont été répartis en fonction du nombre de lits ouverts par les hôpitaux mais pas en fonction du nombre de patients qui y figuraient. Il a fallu attendre un certain temps pour que le critère de répartition tienne à la fois compte (à 75%) du nombre de lits ouverts et (à 25%) du nombre de patients. Or, les autorités disposent de toutes les données d'activité puisque les hôpitaux doivent les encoder quotidiennement. "Quant au milliard d'euros octroyé par l'Inami aux hôpitaux pour les mois de mars, avril et mai, le patron d'Epicura rappelle qu'il s'agit d'une avance. " Ce n'est pas un subside. Comme le terme l'indique, ce milliard devra être récupéré par les autorités. En outre, l'avance a été répartie en se basant sur la facturation de 2018 durant la même période. Elle ne tient donc pas compte du nombre de patients Covid et de l'impact de la crise sur les activités hospitalières. "François Burhin estime qu'il est d'ailleurs grand temps, à la mi-mai, que les hôpitaux sachent s'ils auront droit à une autre avance de l'Inami pour les mois de juin, juillet et août. " Cette aide sera nécessaire. Selon nos estimations, notre hôpital a perdu, hors subsides et avance, de 10 à 12 millions d'euros en trois mois. C'est énorme ! Nous n'avons heureusement pas de problème de trésorerie. "La reprise progressive des activités non-Covid va-t-elle permettre aux hôpitaux de renflouer leurs caisses ? " Nous avons 1.200 opérations annulées à reprogrammer et 1.500 examens IRM. Il faudra du temps pour réaliser toutes ces activités en respectant les critères de sécurité du PUH. Je comprends le désir des médecins de pouvoir soigner les patients qui attendent depuis des semaines et, pour ceux qui n'étaient pas impliqués dans la prise en charge Covid, de pouvoir retravailler mais cette reprise est conditionnée aux moyens humains dont nous disposons, entre autres pour allonger les plages horaires pour les consultations, opérations et examens. N'oublions pas que cette crise a épuisé physiquement et mentalement une partie du personnel. Nous avons reçu 700 certificats de maladie pour 2.500 travailleurs. "A l'instar de Philippe Leroy (CEO du CHU Saint-Pierre, lire jdM N°2628), François Burhin estime que cette crise sanitaire doit nous obliger à repenser le système de financement de la santé. " Dans les hôpitaux, nous avons continué à travailler. Beaucoup. Il n'est donc pas normal que l'impact financier soit si élevé pour les hôpitaux parce que le financement repose en partie sur les actes. Il y en a eu mais les médecins prestataires - urgentistes, intensivistes et internistes - qui ont travaillé énormément ces derniers mois font partie des disciplines jouissant d'une nomenclature peu favorable. Ils ont travaillé trois fois plus que d'habitude mais ont produit une masse d'honoraires relativement peu élevée. Ce n'est pas normal. "