...

Les résultats présentés dans cette publication sont la base d'un projet de thèse initié en 2018 visant à déterminer les mécanismes de transfert d'immunité impliqués dans des conditions où les cellules immunes maternelles ne peuvent en théorie pas être tolérées à long terme chez la descendance. Cette thèse est supervisée par le Dr Benjamin G. Dewals, chercheur qualifié FNRS du centre de recherche Farah (Fundamental and Applied Research for Animals and Health) de la Faculté de Médecine vétérinaire de l'Université de Liège.Après avoir effectué un séjour postdoctoral de deux ans à l'Institut des maladies infectieuses et de médecine moléculaire de l'Université du Cap en Afrique du Sud, ce dernier a continué à collaborer avec le Pr William Horsnell qu'il avait côtoyé lors de ce séjour. Leurs deux équipes viennent de mener à bien une étude qui démontre notamment que le transfert d'immunité de la mère à sa progéniture pourrait impliquer un transfert de cellules immunitaires lors de l'allaitement.Le transfert d'anticorps durant la gestation et via le lait d'allaitement est une source importante de protection contre les infections précoces, mais qui est limitée dans le temps et est perdue lorsque les anticorps transférés disparaissent de l'organisme de l'enfant." Mais les anticorps ne sont pas les seuls médiateurs de l'immunité qui soient transmis à la descendance, " assure le Dr Dewals au terme d'une recherche au cours de laquelle le travail de son équipe a surtout consisté à la conception et la validation des expériences réalisées en Afrique du Sud afin d'éviter les biais de laboratoire." Concrètement, ces expériences ont été menées chez la souris, sur deux groupes de futures mères. Un groupe a été exposé à une infection par Nippostrongylus brasiliensis, un ver parasitaire de souris utilisé comme modèle de parasites répandus dans le monde chez l'Homme et l'animal. Les souris ont ensuite été traitées afin d'éliminer les parasites avant la conception. À la naissance, les souriceaux provenant des mères préalablement infectées ont été retirés et remplacés pour l'allaitement par ceux qui étaient issus de mères dites 'naïves' n'ayant pas un historique d'infection. Enfin, soit pendant la période d'allaitement, soit plus tard à l'âge adulte, nous les avons réinfectés avec le même parasite. "Les auteurs de cette recherche ont alors démontré que les souriceaux nés de mères non infectées et adoptés dès la naissance par des mères infectées par le ver parasite avant la grossesse avaient acquis une protection immunitaire contre cette infection et que cet effet bénéfique peut perdurer jusqu'à l'âge adulte." Toutefois, de façon inattendue, en procédant de la même manière avec la progéniture de souris transgéniques incapables de produire des anticorps que l'on retrouve dans le lait maternel, nous avons observé que le transfert d'immunité anti-parasitaire se produit également ", précise Benjamin G. Dewals. " Donc on a pu conclure que cet effet de protection survient indépendamment du transfert d'anticorps de la mère allaitante à son petit. "Reste alors à identifier par quels mécanismes précis cette protection pourrait être transmise. " À ce stade-ci, nous n'avons pas encore la réponse, même si la piste du lait semble être la plus probable ", poursuit le chercheur du FARAH." Chez la souris, nous constatons qu'il y a des cellules immunitaires de la mère qui se trouvent dans le lait et qu'elles sont absorbées par les souriceaux qui sont allaités. Mais combien de temps subsistent-elles ? Et quel est leur rôle dans le transfert d'immunité chez l'être humain ? Cela reste des questions ouvertes. Pour en savoir davantage, un projet de thèse visant à déterminer les mécanismes de transfert d'immunité impliqués a donc été initié récemment. "Quoi qu'il en soit, les résult ats surprenants, obtenus actuellement sur des modèles murins, ajoutent une nouvelle dimension à la compréhension de la façon dont la mère peut influencer la santé de sa descendance." On ne remet pas du tout en cause l'importance du transfert d'anticorps maternels mais on amène un point de vue un peu différent tout en disant que nous sommes encore loin de comprendre comment tout cela fonctionne ", ajoute le Pr Dewals." Nous espérons que cette recherche mènera à des études tant chez l'animal que chez l'homme sur la façon dont l'exposition maternelle à des agents pathogènes avant la grossesse peut influencer la santé de la progéniture. Nous nous intéressons particulièrement à la façon dont ces résultats peuvent aider à concevoir des stratégies de vaccination maternelle qui favoriseraient un transfert d'immunité et renforceraient la protection à long terme des enfants. Nous avons peut-être ici une piste intéressante pour faire face au problème des infections parasitaires et à la résistance de plus en plus forte des parasites aux traitements actuels. "