...

Ville haute, ville basse. Depuis les quartiers chics et résidentiels d'une ville qu'il fait émerger, Emil dessine, conçoit, réalise un geste architectural, devient le grand ordonnateur d'un quartier appelé à arborer sa signature, et, pour ce faire, à se débarrasser de scories du passé... même vivantes. Dans le bas de la cité, un homme - dont on devine un passé glorieux mais perdu, vit au milieu de l'humanité grouillante, mais humanité surtout, se déplaçant toujours accompagné d'un molosse informe qu'il a recueilli petit et mourant - a décidé de devenir mutique : sans doute pour ne plus jargonner.Deux mondes, deux planètes, deux univers parallèles qui s'ignorent dans une cité martiale, mais deux êtres aimantés par la même passion, assouvie pour l'un, contemplée pour l'autre, celle d'Oona : une femme mouvante, insaisissable, changeante, multiforme, libre, ouverte dont le nom ne peut qu'être " cité ". C'est pour elle que leurs coeurs vont se battre. Symbole d'une ville que le nanti croit pouvoir posséder tandis que son rival, qui s'y sent désormais étranger, ne peut, dans un premier temps, que la scruter... avant de la reprendre.Né à Bilbao, Ivan Repila a vu sa ville se transfigurer, se gentrifier aussi : Prélude à une guerre, roman d'architectes et d'"architexte", usant de la construction et de la déconstruction, elliptique, voire hélicoïdal, se veut une charge contre les archistars de toutes les époques, sculpteurs plutôt qu'urbanistes.Organique et décoré de beaux graffites comme " lorsqu'un peu de soleil caressait l e monde et qu'elle le déposait dans son panier lumineux ", le livre de Repila pèche parfois par excès de fioritures baroques, et, à l'instar des architectes qu'il critique, se laisse aveugler par sa propre et éblouissante création.