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Coaching par les médecins généralistes et... par les mutuelles! À la source d'autorisations, d'interdits, de droits, et, last but not least,... de remboursements, les mutuelles l'ont jouée fine. Elles s'interposent par le biais de formulaires, d'écrans et de claviers entre les malades et les médecins, infirmier.ère.s et autres prestataires. En vertu de quelle légitimité devraient-elles se mêler d' information et de coaching de santé ? La politique officielle et plus profondément, la culture politique, légitimisent les mutuelles comme relais d'informations sur la santé. C'est un fait et au lieu de s'en plaindre, les médecins doivent se demander le pourquoi de ces intrusions dans leur champ de compétence. Nées autour de l'idée de solidarité, maîtres dans l'art d'en parler, les mutuelles savent que la communication et l'argent baignent toutes les activités humaines. Pourquoi de telles considérations dans une série Philosophie et Médecine? Parce que la philosophie a pour fonction de nous rendre attentifs aux relations de savoirs et de pouvoirs dans la société. Je me souviens avoir entendu un médecin hospitalier dire à la radio qu'il n'avait pas le temps de donner des explications aux patients, ajoutant qu'il n'était pas payé pour cela! Si nous renonçons à informer sur la santé, il ne faut pas s'étonner que d'autres s'en chargent! Pour ma part, je ne me vois pas travailler sans expliquer la démarche diagnostique et thérapeutique aux patients. Autre souvenir: celui du professeur Jan Heyrman, de la KUL, pour qui les médecins généralistes devaient s'affirmer comme coachs de leurs patients. Trouvant l'idée formidable, je n'ai cessé de la mettre en exergue, par exemple dans La troisième révolution de la médecine, 2013. Mais alors, il y aurait du coaching par les généralistes et du coaching par les mutuelles? Ma foi, oui! Après tout, sur des questions aussi vastes, l'information fuse de plusieurs niveaux ; au lieu d'exacerber les tensions entre eux, nous ferions mieux de voir leur complémentarité, mise à mal par les déséquilibres entre pouvoirs évoqués ci-dessus. Côté mutualiste, voilà ce que dit le Pacte: "Chacun des OA a la responsabilité de veiller à offrir à ses membres de l'information de qualité, un accompagnement ainsi qu'un coaching santé. Ces actions font partie des principales missions pour lesquelles les autorités leur octroient des moyens." Côté médical, quasi pas d'argent pour les rapports, les protocoles ni pour le temps consacré à l'utilisation de programmes informatiques encore en pleine construction, ni pour le temps du dialogue avec les malades. Je n'ai pas à entrer dans les détails de revendications médicales largement justifiées ; à nos représentants de faire bloc pour défendre des solutions pratiques. Et c'est là que cela coince! Bisbrouille entre médecins. Les disputes entre médecins font la part belle aux dérives bureaucratiques. Faire front pour la reconnaissance et la valorisation de nos obligations générales au services des malades? Nos associations peinent à s'unir sur ces thèmes car des financements existent déjà en faveur des généralistes pour le dossier médical global tandis que certains spécialistes se satisfont des remboursements de leurs actes techniques, beaucoup s'accommodant de rapports écrits gratuitement dans des cascades de clics imposés par une informatique prisonnière de choix stratégiques anciens, elle-même très mal valorisée. Mais alors, si tant de médecins s'y retrouvent, pourquoi s'en faire? Parce que l'insuffisance du dialogue entre les praticiens nuit à la qualité de leur travail et à sa juste rémunération. Pour sortir des impasses actuelles, les collègues actifs dans nos organisations représentatives devraient se focaliser sur un objectif commun: corriger les déséquilibres dans la verticalité des relations entre les praticiens de terrain, les agents intermédiaires, surtout les mutuelles, et les dirigeants des soins de santé. Cette série va poursuivre l'exercice autour des six axes de modernisation.