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L'outil de dépistage se base sur les savoirs du développement pré-linguistique de l'enfant, sur les méthodes employées au sein du centre de recherche Acte ( Autism in Context Theory and Experiment) et sur l'eye-tracking. " Nous pourrions utiliser le pointage, puisque l'on regarde si l'enfant arrive à faire la différence entre deux vidéos sur base d'une information, d'une compétence qu'il a acquise ou non. Mais cela amènerait son lot de biais : compréhension de l'instruction, biais moteur, ou encore, si l'enfant a envie de jouer, il pourrait pointer partout ", explique Fanny Stercq, assistante de recherche au sein d'Acte (présenté dans le jdM n°2593). " En analysant où l'enfant pose son regard (eye-tracking, ndlr) , on outrepasse ces biais. "L'eye-tracking est un outil de prise de mesures. " Ce qui nous intéresse, c'est de savoir si l'enfant a un développement du langage proche de ce qui est typique ou pas ", détaille l'intéressée. Avec Depist-Eye, le médecin regarde simplement si l'enfant fait la distinction entre deux informations. L'outil se compose d'une plateforme informatique - une première version lors de la présentation - et d'une caméra.La session commence par une phase de calibration permettant à la caméra d'adapter ses mesures à l'oeil de l'enfant. Ce dernier est ensuite invité à regarder des vidéos. Les unes proposent un son coordonné à l'image, les autres non. Une récompense visuelle survient lorsque le regard de l'enfant s'attarde sur la vidéo synchrone. " Le but est de vérifier si l'enfant est capable d'intégrer l'information auditive et visuelle. L'enfant aura envie de voir la récompense et sera tenté de regarder là où elle va apparaître. Mais il le fera uniquement s'il fait bien la distinction entre les deux séquences. "L'outil permet in fine de savoir si l'enfant présente ou non un risque lié à l'autisme. " Nous ne sommes pas au stade du diagnostic mais du dépistage ", confirme Fanny Stercq. " L'objectif est d'aider le médecin de première ligne - généraliste ou pédiatre - dans sa décision pour orienter l'enfant vers une prise en charge chez un spécialiste ou de référencer vers un centre de référence autisme, qui permettra de poser un diagnostic. "Pour y arriver, Depist-Eye s'intéresse aux jalons du développement pré-linguistique. " Il s'agit par exemple de l'intégration des stimuli auditifs et visuels. Si l'enfant ne fait pas le lien entre ma bouche et le son " BE " par exemple, il aura plus de mal à lui-même produire ce son. Les enfants qui n'ont pas intégré ces deux informations seront susceptibles d'avoir du retard dans leur propre prononciation. "" L'idéal serait un dépistage universel systématique ", espère Fanny Stercq. " Donc proposer cet outil à tous les enfants, quels qu'ils soient, en première ligne, comme ce qui fait pour la surdité. Cela permettrait de détecter et d'orienter vers une prise en charge adéquate plus tôt et donc de proposer une intervention thérapeutique plus précoce. Sachant que c'est un des seuls facteurs que l'on a identifié comme étant prédicteur d'une meilleure évolution de l'enfant. Plus tôt l'enfant obtient une intervention, meilleures sont ses chances de développer un meilleur langage, une meilleure interaction et une autonomie longue. "Il faudra cependant patienter pour voir l'outil débarquer dans les salles de consultation des généralistes et des pédiatres. " L'outil est à un stade assez précoce, il est en validation ", concède l'assistante de recherche. " On teste un groupe d'enfants entre trois et cinq ans porteurs d'un diagnostic d'autisme et un groupe contrôle qui n'a pas de diagnostic. Les résultats sont actuellement prometteurs, on aura plus de résultats cet automne. La prochaine étape sera de tester des enfants tout venant de l'âge cible (4-6 à 18 mois). Il faudra encore normer l'outil et proposer des seuils. "