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On estime qu'en Belgique environ 680.000 personnes souffrent de BPCO, dont plus de 300.000 ignorent leur diagnostic. Cette maladie pulmonaire touche principalement (mais pas uniquement! ) des fumeurs de plus de 50 ans et sa prévalence augmente avec l'âge. Contrairement à l'asthme, où l'obstruction bronchique est réversible, celle-ci ne l'est pas en cas de BPCO. Cette affection pulmonaire est la cinquième cause de mortalité dans le monde et sa prévalence ne cesse d'augmenter. Compte tenu de l'impact dévastateur du Covid-19 sur les poumons, il n'est pas étonnant de constater que les patients souffrant de bronchite chronique et d'emphysème courent encore plus de risque d'encourir des lésions pulmonaires importantes et parfois mortelles comparé aux patients ayant au préalable une fonction pulmonaire normale. Néanmoins, il reste à prouver de façon objective si tous les patients souffrant de BPCO sont plus susceptibles d'être infectés par le Sras-CoV-2 et que leurs symptômes sont plus importants. L'attention de la plupart des publications se tourne vers les patients hospitalisés et beaucoup moins vers les malades ambulatoires. En plus, la BPCO est souvent sous-diagnostiquée, tandis que la surcharge actuelle des services hospitaliers ne permet pas de porter suffisamment d'attention à son investigation précise, toute l'énergie du personnel médical allant vers le traitement des patients atteints de Covid-19. Puisque la pandémie de Covid-19 a commencé en Chine, les premières constatations sur le rapport entre les deux pathologies nous sont venues de l'Extrême-Orient. Dans les hôpitaux, il semble que plus de 10% des patients Covid souffraient également de BPCO. Plus tard, une prévalence assez similaire a été constatée à New York City, Seattle, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni, avec néanmoins des variations assez grandes, allant de 4 à 38%. Il est important de signaler que chez les patients hospitalisés pour le Covid-19, d'autres comorbidités, telles que l'hypertension et le diabète, étaient encore plus fréquentes que la BPCO. Une étude sur les comorbidités de plus de 1.500 patients atteints gravement de Covid-19 en Chine a démontré que près de deux tiers d'entre eux avaient un passé médical de BPCO, et que cela était aussi le cas pour un quart des décès. Cela démontre que la BPCO augmente fortement le risque de complications graves et de décès chez les patients atteints de Covid-19. Dès lors, la question se pose de savoir quelles en sont les causes et mécanismes sous-jacents. Selon une étude récente, le mécanisme selon lequel le Sras-CoV-2 parvient à pénétrer dans les cellules serait différent chez les patients souffrant de BPCO et chez les fumeurs de celui chez les autres patients. Comme chez le Sras-CoV, responsable des épidémies 2002-2003, le Sras-CoV-2 présente à sa superficie un nombre de 'clous' de glycoprotéines qui, après activation par la protéase sérique se lient aux récepteurs Ace de la paroi cellulaire, comme une clé dans une serrure. C'est ainsi que le virus parvient à pénétrer dans la cellule et à l'endommager. Il apparaît maintenant qu'en cas de BPCO l'expression du récepteur Ace-2 est significativement plus élevée que chez d'autres patients. Ce serait également le cas chez les fumeurs, par rapport aux personnes n'ayant jamais fumé ou ayant arrêté. Il se fait qu'une exposition chronique à la nicotine est associée à une expression plus importante des récepteurs Ace-2. Toutefois, il faut noter que cette expression ne mène pas nécessairement à une plus grande réceptivité au virus et à la maladie, ni à des complications plus importantes. Par ailleurs cette expression est moins grande dans la muqueuse des voies aériennes inférieures que dans l'épithélium nasal, alors que la pathologie qui nous concerne se situe surtout au niveau pulmonaire. Une autre question qui se pose est celle de savoir dans quelle mesure le traitement médical habituel de la BPCO avec des inhalateurs et des tablettes à base de cortisone, des agonistes-bêta2 et des antagonistes muscariniques à action courte ou prolongée, diminuent ou au contraire augmentent le risque d'infection du Covid-19. Ces médicaments sont-ils bien utiles ou provoquent-ils plus de dégâts? Pour l'asthme on a démontré que des inhalateurs à base de cortisone diminuent l'expression Ace-2 dans les cellules épithéliales. Ceci pourrait aussi diminuer le risque d'infection virale en cas de BPCO, mais cela reste une hypothèse. Jusqu'à preuve du contraire le traitement aux inhalateurs reste donc indiqué, mais prescrire une dose plus élevée comme mesure préventive contre le Covid-19 n'est pas d'actualité. En ce qui concerne le traitement systémique de la BPCO avec des corticoïdes, il semble que, suite aux résultats obtenus lors d'une épidémie de Sras antérieure, il serait plutôt nuisible, étant à l'origine d'un retard de clearance viral, tout en augmentant le risque de psychose. Lors de l'épidémie de Mers (Middle East respiratory syndrome) il aurait même entraîné une mortalité plus importante. D'autre part, des données préliminaires d'une étude réalisée au Royaume-Uni ont démontré que la dexaméthasone administrée à des patients fort atteints par le Covid-19 a pu réduire la mortalité d'un tiers. Suite à ces résultats, la dexaméthasone est désormais considérée comme un traitement standard des cas graves de Covid-19, tant pour les patients souffrant de BPCO que pour les autres. En dehors des grands risques de complications souvent mortelles encourus par les patients atteints de BPCO et infectés par le Covid-19, il y a également d'autres inconvénients et dommages collatéraux liés à l'épidémie. En effet, les médecins et les hôpitaux étant surchargés, le suivi médical et la revalidation de ces patients en pâtissent. Si leur pathologie pulmonaire s'aggrave, ils seront sans doute moins enclins de se faire soigner en clinique, par crainte du Covid. Ceci est d'ailleurs aussi le cas pour d'autres pathologies, dont les maladies cardiaques et les cancers, avec toutes les conséquences néfastes que cela entraîne. Covid-19 and Copd, European Respiratory Journal, 2020 Aug 13.