Cette prise de position a été relayée par le magazine catholique flamand Tertio. Développée en 9 pages, elle figure in extenso sur le site internet www.broedersvanliefde.be. Certes, l'approche reste extrêmement prudente et restrictive et témoigne du conflit de valeurs qui hante ce débat : protection de la vie versus autonomie de la personne. Mais quel pas de géant par rapport à la prise de position de 2006. En effet, à l'époque, il était conseillé, lorsque la demande d'euthanasie était persistante, de transférer le patient. En quelque sorte d'assumer une rupture dans la relation thérapeutique.

Une référence pour conduire cette réflexion est le travail effectué par l'Association néerlandaise pour la psychiatrie qui en 2009 a proposé des directives pour l'approche des demandes d'euthanasie de la part de patients atteints de troubles psychiatriques (http://steungroeppsychiaters.nl/wp-content/uploads/Richtlijn-hulp-bij-zelfdoding_NVvP-2009.pdf). Il est à noter que les Associations belges de psychiatrie ont également engagé cette réflexion.

En Belgique, les psychiatres ont été d'emblée concernés par la loi relative à l'euthanasie en ce sens que, dans l'hypothèse d'un décès non prévisible à brève échéance, le médecin traitant doit consulter deux médecins, dont l'un doit être spécialiste de la pathologie présentée par le patient ou psychiatre. Ce second médecin devra se prononcer sur le caractère inapaisable des souffrances ainsi que sur la qualité de la demande. Le législateur avait principalement pour souci de s'assurer que la demande d'euthanasie n'ait pas été causée par un moment de dépression.

Premiers cas d'euthanasie

Il a cependant fallu attendre le rapport 2006 de la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie pour voir apparaître les premiers cas d'euthanasie pour des patients atteints de dépression majeure irréductible, résistants à tout traitement. Ces données ne susciteront pas beaucoup de débats. Mais une chose était claire : l'euthanasie n'était plus réservée qu'aux seuls patients atteints de maladies somatiques.

Pour s'en convaincre, il s'agit de se référer aux trois conditions fondamentales de la loi relative à l'euthanasie. Le patient compétent doit formuler une demande claire, de manière volontaire et réitérée, sans pression extérieure (1) alors qu'il exprime des souffrances physiques ou psychiques inapaisables (2) causées par une affection grave et incurable, d'ordre pathologique ou accidentel, sans issue médicale (3).

Un patient atteint par exemple de dépression profonde ou de schizophrénie perdrait-il automatiquement la capacité de prendre des décisions pour ce qui concerne sa propre vie, sa mort ? La réponse est bien entendu négative. Les maladies psychiatriques seraient-elles toutes curables ? La réponse encore une fois est négative. Certains patients ont parfois connu des dizaines de traitements de tout ordre, des périodes d'hospitalisation sans amélioration de leur état et plus aucune solution thérapeutique encore crédible. Au nom de quel principe pourrait-on leur soutenir que leurs souffrances sont inexistantes au motif que l'on ne pourrait les objectiver ? L'appréciation de la souffrance est éminemment subjective.

Il n'existe donc pas de raison de principe d'écarter une demande d'euthanasie de la part d'un patient présentant des troubles psychiatriques.

Cela étant, il est certain que ces cas exigent du temps, imposent de vérifier si l'on ne peut proposer un traitement reconnu qui sans doute ne permettra pas au patient de "guérir" mais bien de supporter cette vie. Mais n'est-ce pas le cas pour des maladies somatiques chroniques pour lesquelles il est possible non pas de guérir mais bien d'accéder à un état stable qui permet de connaître une vie de qualité ?

Patient atteint de paranoïa

Certains patients psychiatriques, de par leur pathologie, se verront exclus du champ d'application de la loi : prenons les cas d'un patient atteint de paranoïa qui refusera toute médicamentation, imaginant que l'on veut l'empoisonner !

La réponse à une demande d'euthanasie est toujours singulière, jamais univoque. Particulièrement pour les patients atteints de troubles psychiatriques, le dialogue est prépondérant. Mais ceux qui voudraient les écarter du bénéfice de cette loi commettent me semble-t-il une profonde erreur. Tout d'abord, la confusion existe entre la cause - la maladie psychique - et la conséquence - les souffrances psychiques. Vouloir supprimer du texte de la loi les souffrances psychiques est une hérésie. Une maladie somatique peut provoquer des souffrances psychiques tout comme une maladie psychique peut causer des souffrances physiques. Quand bien même les opposants ne commettraient pas cette erreur qui va au-delà de la sémantique, ils devraient assumer les suicides atroces tant pour les patients que pour leurs proches causés par une absence d'écoute à une demande d'euthanasie. Edith Vincke, jeune et belle femme, qui souffrait de troubles mentaux, n'a pas été entendue en sa souffrance (www.edithvincke.be). Un jour de novembre, elle s'est suicidée dans l'institution où pour une nième fois elle avait été hospitalisée. Si elle avait été entendue, peut-être serait-elle encore parmi nous. Si elle avait été entendue et que rien ne pouvait apaiser ses souffrances, elle aurait eu droit à une mort digne. Quel gâchis.

Cette prise de position a été relayée par le magazine catholique flamand Tertio. Développée en 9 pages, elle figure in extenso sur le site internet www.broedersvanliefde.be. Certes, l'approche reste extrêmement prudente et restrictive et témoigne du conflit de valeurs qui hante ce débat : protection de la vie versus autonomie de la personne. Mais quel pas de géant par rapport à la prise de position de 2006. En effet, à l'époque, il était conseillé, lorsque la demande d'euthanasie était persistante, de transférer le patient. En quelque sorte d'assumer une rupture dans la relation thérapeutique.Une référence pour conduire cette réflexion est le travail effectué par l'Association néerlandaise pour la psychiatrie qui en 2009 a proposé des directives pour l'approche des demandes d'euthanasie de la part de patients atteints de troubles psychiatriques (http://steungroeppsychiaters.nl/wp-content/uploads/Richtlijn-hulp-bij-zelfdoding_NVvP-2009.pdf). Il est à noter que les Associations belges de psychiatrie ont également engagé cette réflexion.En Belgique, les psychiatres ont été d'emblée concernés par la loi relative à l'euthanasie en ce sens que, dans l'hypothèse d'un décès non prévisible à brève échéance, le médecin traitant doit consulter deux médecins, dont l'un doit être spécialiste de la pathologie présentée par le patient ou psychiatre. Ce second médecin devra se prononcer sur le caractère inapaisable des souffrances ainsi que sur la qualité de la demande. Le législateur avait principalement pour souci de s'assurer que la demande d'euthanasie n'ait pas été causée par un moment de dépression. Il a cependant fallu attendre le rapport 2006 de la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie pour voir apparaître les premiers cas d'euthanasie pour des patients atteints de dépression majeure irréductible, résistants à tout traitement. Ces données ne susciteront pas beaucoup de débats. Mais une chose était claire : l'euthanasie n'était plus réservée qu'aux seuls patients atteints de maladies somatiques.Pour s'en convaincre, il s'agit de se référer aux trois conditions fondamentales de la loi relative à l'euthanasie. Le patient compétent doit formuler une demande claire, de manière volontaire et réitérée, sans pression extérieure (1) alors qu'il exprime des souffrances physiques ou psychiques inapaisables (2) causées par une affection grave et incurable, d'ordre pathologique ou accidentel, sans issue médicale (3).Un patient atteint par exemple de dépression profonde ou de schizophrénie perdrait-il automatiquement la capacité de prendre des décisions pour ce qui concerne sa propre vie, sa mort ? La réponse est bien entendu négative. Les maladies psychiatriques seraient-elles toutes curables ? La réponse encore une fois est négative. Certains patients ont parfois connu des dizaines de traitements de tout ordre, des périodes d'hospitalisation sans amélioration de leur état et plus aucune solution thérapeutique encore crédible. Au nom de quel principe pourrait-on leur soutenir que leurs souffrances sont inexistantes au motif que l'on ne pourrait les objectiver ? L'appréciation de la souffrance est éminemment subjective.Il n'existe donc pas de raison de principe d'écarter une demande d'euthanasie de la part d'un patient présentant des troubles psychiatriques. Cela étant, il est certain que ces cas exigent du temps, imposent de vérifier si l'on ne peut proposer un traitement reconnu qui sans doute ne permettra pas au patient de "guérir" mais bien de supporter cette vie. Mais n'est-ce pas le cas pour des maladies somatiques chroniques pour lesquelles il est possible non pas de guérir mais bien d'accéder à un état stable qui permet de connaître une vie de qualité ? Certains patients psychiatriques, de par leur pathologie, se verront exclus du champ d'application de la loi : prenons les cas d'un patient atteint de paranoïa qui refusera toute médicamentation, imaginant que l'on veut l'empoisonner !La réponse à une demande d'euthanasie est toujours singulière, jamais univoque. Particulièrement pour les patients atteints de troubles psychiatriques, le dialogue est prépondérant. Mais ceux qui voudraient les écarter du bénéfice de cette loi commettent me semble-t-il une profonde erreur. Tout d'abord, la confusion existe entre la cause - la maladie psychique - et la conséquence - les souffrances psychiques. Vouloir supprimer du texte de la loi les souffrances psychiques est une hérésie. Une maladie somatique peut provoquer des souffrances psychiques tout comme une maladie psychique peut causer des souffrances physiques. Quand bien même les opposants ne commettraient pas cette erreur qui va au-delà de la sémantique, ils devraient assumer les suicides atroces tant pour les patients que pour leurs proches causés par une absence d'écoute à une demande d'euthanasie. Edith Vincke, jeune et belle femme, qui souffrait de troubles mentaux, n'a pas été entendue en sa souffrance (www.edithvincke.be). Un jour de novembre, elle s'est suicidée dans l'institution où pour une nième fois elle avait été hospitalisée. Si elle avait été entendue, peut-être serait-elle encore parmi nous. Si elle avait été entendue et que rien ne pouvait apaiser ses souffrances, elle aurait eu droit à une mort digne. Quel gâchis.