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1. Elle n'a pas tenu ses promesses. Il est toujours dangereux d'annoncer fermement une position que l'on ne pourra pas tenir. En acceptant lors du conclave budgétaire des économies supplémentaires dans les soins de santé à hauteur de 200 millions d'euros, après avoir affirmé que la NV-A "ne ferait pas des économies sur le dos des patients", Maggie De Block s'est décrédibilisée. D'autant plus que dans la foulée, elle a annoncé la fin du remboursement de 7 sprays nasaux anti-inflammatoires, qui seront en vente libre dès le 1er janvier. Une mesure peu appréciée par les utilisateurs chroniques de ces sprays.. 900 millions d'économies dans les soins de santé en 2017 - soit un quart de l'effort budgétaire global du Fédéral - c'est beaucoup. Trop. Même sur un budget global de 24,6 milliards d'euros. Les prestataires et les patients craignent les conséquences de ces coupes claires dans leur vie quotidienne. D'ici 2019, le secteur de la santé contribuera à hauteur de 3,6 milliards d'euros à l'assainissement budgétaire fédéral. Certains pharmaciens ont déjà lancé une action de protestation en affichant des autocollants "Merci Maggie!" dans leurs officines. Fin 2015, l'annonce du gel du budget des postes de garde de médecine générale avait déjà particulièrement crispé les médecins généralistes. ses grands projets. Au début de son mandat, Maggie De Block a annoncé clairement sa feuille de route. Elle veut, entre autres, réformer le financement et le paysage hospitalier et l'AR 78 sur les professions de santé. Deux gigantesques chantiers qui sont planifiés sur plusieurs années. On ne peut lui reprocher une vision à long terme, jalonnée d'étapes qu'elle a déjà clairement annoncées. Revers de la médaille, ces réformes se font attendre et mobilisent l'énergie de nombreux acteurs du secteur en travaux préparatoires. Et parfois, comme pour la réforme du financement hospitalier, la ministre met la charrue avant les boeufs en demandant aux hôpitaux de réaliser en un an 92 millions d'économies en se restructurant dans l'urgence. Un timing serré jugé intenable par les fédérations hospitalières.Par ailleurs, Maggie De Block est une adapte des "projets pilotes", qui seront financés s'ils démontrent leur efficacité. Une méthodologie qui prend du temps : celui de la préparation du projet, de sa conceptualisation et de son évolution. Elle n'est évidemment pas la seule ministre à être conseillée par une garde de collaborateurs formés dans les grandes écoles mais leurs approches hyperstructurées - dignes des sociétés d'audit - ne cadrent pas toujours avec le pragmatisme revendiqué de Maggie De Block. Sa marque de fabrique depuis qu'elle fait de la politique. La cinquantaine de pages du guide Projets-pilotes de soins intégrés en faveur des malades chroniques est l'exemple parfait d'une approche hyperstructurée et théorique d'une problématique de santé. Des consignes qui ne sont pas toujours faciles à digérer par les acteurs de terrain. 5. Elle communique... mais ne dialogue pas. La communication de la ministre est très encadrée, réglée comme du papier à musique par son chef d'orchestre. Les journalistes ne doivent pas vouloir en savoir plus. Il faut se contenter de la partition, qui ressemble souvent à une berceuse. Les experts du cabinet ne peuvent commenter les décisions annoncées. Certaines restent dès lors parfois inaudibles. Coincée dans un gouvernement largement dominé par la NV-A et le MR, la ministre de la Santé publique et des Affaires sociales n'est pas toujours libre de mener la politique qui lui plairait. Au début de son mandat, en 2014, elle s'était fait tancer par Bart De Wever lorsqu'elle avait proposé une utilisation régulée du cannabis. Le patron de la N-VA avait répliqué en réaffirmant la "tolérance zéro" inscrite dans l'accord du gouvernement en matière de consommation de drogues. En janvier 2016, la ministre a tout de même signé un arrêté royal qui permet la distribution d'un spray oral, qui contient comme principe actif du tétrahydrocannabinol, plus communément appelé THC, présent dans le cannabis.7. La santé publique est un bien important, certainement pour un ministre-médecin. Et c'est, par excellence, une question sociale. Dans certains dossiers, il semble que le fond libéral de la ministre lui joue des tours. Ainsi lors de l'introduction d'un Plan Tabac, elle a ménagé la chèvre et le chou en n'imposant pas, pour des raisons économiques, une interdiction globale de la vente du tabac dans les librairies, stations services et magasins de nuit... Par ailleurs, sa décision de geler le budget des centres de santé a également pu être influencée par des motifs politiques (voire idéologiques). 8. La ministre se targue de mener une politique fondée sur l'évidence. Dans la réalité, ce n'est pas toujours le cas. Dans le dossier très communautaire des numéros Inami, Maggie De Block n'a pas - contrairement à ce qu'elle avait annoncé au départ - pu/voulu suivre l'avis indépendant de la Commission de planification proposant une nouvelle clé de répartition des quotas (56,5%/44,5%), plus profitable aux francophones. Elle a finalement maintenu la répartition historique de 60% pour les étudiants néerlandophones et 40% pour les étudiants francophones. A sa décharge, aucune décision cohérente n'a été prise depuis 20 ans en Fédération Wallonie-Bruxelles par les ministres "compétents" pour des raisons politiques voire électoralistes. Cette semaine, le Dr De Block a annoncé une modification du "lissage" du côté francophone. D'un coup de crayon, le lissage négatif sera de 1.355 numéros Inami en 2020, contre 3.167 précédemment. 1.812 étudiants francophones supplémentaires se voient donc attribuer tout d'un coup un accès à la profession. Motif de ce revirement? Les étudiants étrangers retournent généralement chez eux à la fin de leurs études et ne s'installent pas chez nous en tant que médecins. Cette décision est-elle vraiment evidence-based?