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Au cours du mois de mars dernier, la pandémie du Covid -19 a frappé le monde entier et s'est introduite sur notre territoire. Comme la plupart des pays, nous n'y étions pas préparés et cette épreuve a ébranlé, et ébranle encore aujourd'hui, de nombreux secteurs dont celui de la santé. Du jour au lendemain, le personnel hospitalier a dû faire face à un raz-de-marée de patients, atteints d'un virus alors quasiment inconnu des scientifiques, tout en essayant, tant bien que mal, de poursuivre la prise en charge des patients atteints d'autres pathologies. À cette difficulté s'ajoutent le manque structurel de moyens humains qui frappe notre secteur depuis des années, et les pénuries de matériel de protection, dont les autres établissements de soins sont également victimes. Avec le retour des beaux jours, nous avons cru la pandémie en recul, presque derrière nous. Une deuxième vague a surgi... plus rapide encore dans sa croissance. Les institutions de soins et d'accueil, ainsi que le personnel (de soins), sont mis à rude épreuve alors que les séquelles de la première vague ne sont pas encore effacées. L'absentéisme frôle des sommets dans les équipes soignantes (un taux moyen de 20% avec des pics à 30 voire 40% !). Nous atteignons la limite des capacités hospitalières. Au moment de rédiger ces lignes, nous dépassons les 13.000 contaminations quotidiennes avec, en corollaire, plus de 5.000 personnes hospitalisées dont 800 en soins intensifs. Et ce, sans compter les cas suspects en attente de leur résultat. Nous avons dépassé les chiffres hospitaliers ayant motivé le confinement général de la population lors de la première vague. Or à l'époque, il aura fallu attendre un mois sous un régime strict pour voir la courbe des hospitalisations amorcer sa descente. Dans le cadre de cette deuxième vague, il est vraisemblablement déjà trop tard. Les faibles mesures décidées par les autorités fédérales vendredi dernier ont été renforcées par des mesures plus fortes à Bruxelles et en Wallonie. Cela va dans le bon sens, certes, mais est-ce suffisant ? Le passage en phase 2A des hôpitaux, la (ré)activation des plans d'urgence hospitaliers et la déprogrammation des soins et interventions non urgents ont été dictés par l'évolution de la situation. Il ne s'agit en rien d'un mécanisme anticipatif. Bien au contraire, nous subissons, au lieu d'être proactifs ! En l'absence de mesures encore plus strictes, nous craignons que cette deuxième vague ne fasse peser sur notre système de santé un risque d'effondrement. Et ceci n'est pas de la science-fiction. Malheureusement... Un effondrement du personnel des institutions de soins, dans un premier temps. Il est à bout et ne comprend pas, ne comprend plus. Entre les collègues absents, la surcharge de travail, l'afflux des patients, l'inquiétude pour soi, pour la famille, les proches... la tension est (beaucoup) trop forte. L'impression de ne pas être écouté, de ne pas être entendu. Que rien n'a été fait depuis la première vague. Pourquoi se mettre en danger alors que tout n'est pas fait pour endiguer la propagation du virus hors du système de santé ? On ne parle pas de revenus, de bénéfices ou de prendre du bon temps dans les institutions de soins. On parle de ce qui peut faire la différence entre la vie et la mort. N'est-ce pas la priorité que nous devrions avoir tous à l'esprit ? Pendant ce temps, le virus continue à circuler. Un effondrement des institutions de soins dû à la saturation complète du système, ensuite. Les communiqués de presse et les cartes blanches se multiplient pour alerter le monde politique et le grand public sur la catastrophe qui se profile à l'horizon. Cela a été dit. Un hôpital saturé n'est plus un hôpital. Les soins ne s'y feront plus de la même manière, avec la même qualité. Les prises en charge seront décalées. Des choix devront être posés. Ce qui aura des conséquences en amont et en aval. La première ligne, déjà débordée, ne pourra plus suivre. Les structures d'hébergement pour personnes âgées ou en situation de handicap se retrouveront encore plus isolées. Notre système de santé, supposé être l'un des meilleurs d'Europe ne sera plus que l'ombre de lui-même. Il est urgent de passer à l'action, d'être proactif, en anticipant ce qui peut l'être : la formation des uns et des autres, l'approvisionnement d'équipements de protection individuelle, la définition de règles de cohortages précises, la mise en place d'un système efficace de transfert de patients entre hôpitaux, une information claire des citoyens... Il faut aussi, et surtout, soutenir les prestataires de soins et tous les collaborateurs du secteur de la santé, par des mesures concrètes et immédiates. Non plus au travers d'effet d'annonce, d'applaudissements... mais par une reconnaissance pragmatique : des bras supplémentaires, une revalorisation significative et immédiate et la garantie d'une sécurité individuelle (droit d'être protégé du virus). Le personnel est épuisé, parfois infecté par le Covid-19 et actuellement au front sans reconnaissance à la hauteur des efforts consentis et des risques encourus. Et parmi les prestataire de soins, n'oublions pas les médecins, qui prennent en charge des patients Covid, en assurant aussi parfois d'autres activités hors de leurs disciplines habituelles. Eux aussi subissent la crise de plein fouet et leurs revenus s'érodent. Eux aussi doivent pouvoir compter sur un revenu garanti. La proactivité et l'anticipation doivent aussi prévaloir en matière de financement des hôpitaux. Nous sommes dans l'urgence d'une pandémie : comment notre système hospitalier s'en sortira-t-il après ? Sa future capacité à assurer ses missions de soins dépendra de ses moyens, notamment (et principalement) financiers. Des nouvelles mesures ont donc été prises. Leurs effets seront suivis de près, en particulier sur les capacités d'accueil des hôpitaux : infléchir la courbe est l'objectif à atteindre et nous préconisons un (re)confinement. Bien entendu, trouver un équilibre entre la préservation de notre système de santé, de l'enseignement, de l'activité économique et de la santé psychique des citoyens est un exercice extrêmement complexe. Des sacrifices ont déjà été faits. Mais des efforts sont malheureusement encore nécessaires. Car ne nous y trompons pas : on parle bien ici de ce qui peut faire la différence entre la vie et la mort d'un concitoyen voire, d'un proche. Notre pays compte déjà plus de 10.000 victimes du Covid-19. Où voulons-nous que cela s'arrête, que voulons-nous faire pour la freiner ? Comment notre société se relèvera-t-elle des décès alors évitables ? Des parents, amis, voisins, familles, connaissances dont la vie aura été impactée, voire sacrifiée à la suite du non-respect des règles et de l'insouciance, voire de la défiance ? Comment conservera-t-on notre humanité ? Comment notre société pourra-t-elle, encore, rester ce que nous voulons qu'elle soit : solidaire et ouverte ? Pour conclure, nous ne pouvons qu'en appeler aux pouvoirs politiques et à l'ensemble de nos concitoyens. Aux politiques : nos institutions de soins sont au bout de leurs capacités et le secteur est à genoux, agissez pour ralentir la tendance des contaminations par des mesures fortes, décisives et concertées avec le secteur et par des gestes réellement soutenant pour le personnel. À nos concitoyens : prenez soins de vous et vous prendrez soin des autres. Respectez les consignes empêchant la propagation du Covid-19. Soyez solidaires et responsables. Sans l'implication de tous, nous n'y arriverons pas. Ne traînons pas, il est moins une pour les hôpitaux... mais aussi pour tout notre système de santé.