Le Parti socialiste veut répondre à l'urgence sociale actuelle. Son président propose, entre autres, la gratuité des consultations chez le généraliste et chez le dentiste. Cette mesure coûterait tout de même 300 millions d'euros.
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" Nous devons permettre aux citoyens de dépenser moins d'argent ", a déclaré Elio Di Rupo le 14 janvier sur la Première et le 12 janvier lors de la présentation de ses voeux aux militants socialistes. "Aujourd'hui, après quatre années de gouvernement Michel, de nombreux médicaments sont devenus trop chers, voire impayables ", a souligné samedi le président du PS lors de ses voeux. "Les visites chez les spécialistes aussi. Les hospitalisations /ont un coût effrayant. Près de 20% de la population wallonne et bruxelloise renoncent à se rendre chez le médecin. Cette situation est indigne d'un pays aussi avancé que le nôtre. Cela doit changer ! Et seul le PS est capable d'engendrer ce changement ! Ainsi, pour répondre à l'urgence de réduire les coûts de la santé, le PS propose la gratuité complète des visites chez le médecin généraliste et chez le dentiste. Il en coûtera près de 300 millions, soit 0,4% du budget de la sécu. Le PS fera également en sorte de diminuer le coût des médicaments et des hospitalisations. Nous réduirons de 21 à 6% la TVA sur les prothèses, lunettes et autres appareils auditifs. Nous rendrons également remboursables tous les soins dentaires. " Et d'expliquer lundi sur les ondes de la RTBF que " ces mesures sont importantes parce que les revenus des Belges ont été bloqués par le gouvernement Michel durant 4 ans (...) Tout est devenu tellement cher, que les citoyens ne s'en sortent pas avec leurs revenus". Le GBO estime qu'il s'agit a priori d'une bonne mesure, mais pas si cette mesure est isolée. "Le GBO a depuis toujours défendu et défend jusqu'aujourd'hui un accès des plus faciles à la première ligne et en particulier à la consultation chez le MG" , rappelle Paul De Munck, son président. "Accessibilité financière, géographique, culturelle, dans les meilleurs délais et durant les périodes de jours fériés, de soirée et de nuit en organisant au mieux la garde en MG."Cette annonce, en pleine campagne électorale, inspire à Paul De Munck les quelques réactions suivantes :"D'abord il ne faudrait pas parler de "gratuité" mais de suppression du ticket modérateur (est-il d'ailleurs encore modérateur ?) et de remboursement intégral au patient (via sa mutuelle) du montant perçu ou au MG (via le tiers-payant)... Cela semble évident mais il ne faut pas donner l'impression que la MG ne coûte rien. On connaît l'adage encore souvent évoqué que ce qui ne coûte rien ne vaut donc rien.""Ensuite, une annonce, sans concertation préalable, de "gratuité" des visites chez le MG comme mesure isolée nous semble une mesure insuffisante. Elle n'aura de sens que si elle s'accompagne d'autres mesures comme le renforcement de la première ligne de soins, l'échelonnement et la valorisation de la MG. N'oublions pas que de nombreux obstacles financiers, parfois bien plus importants qu'en MG existent aussi pour le recours à la médecine spécialisée. Les mesures en faveur d'une plus grande réduction, voir d'une suppression du TM chez le MS à condition d'une référence par le MG devraient aussi être abordées." "Sur le coût annoncé de la mesure, à savoir 300 millions, il y a sans doute aussi beaucoup à dire. Je ne doute pas que les services du président du PS ont fait leur calcul sur base des données des TM qui devraient être pris en compte. Mais ont-ils pris en compte les économies réalisées en deuxième ligne en facilitant encore plus l'accès à la première ligne ? ont-ils pris en compte les économies réalisées aux urgences et les effets d'une plus grande consommation éventuelles d'actes en MG ? Ces estimations ne sont pas faciles à faire, raison de plus pour inscrire une telle mesure dans un cadre plus large et qui permettra d'en évaluer les effets.""Enfin, le ticket modérateur censé "modérer" la consommation d'actes en médecine doit-il encore être vu comme tel ? Ne devrait-on pas réfléchir autrement sur les mesures à prendre pour minimiser les risques de surconsommation d'actes, à tous les niveaux des actes médicaux d'ailleurs. Le risque de "surconsommation" en consultations de MG (dont le niveau resterait d'ailleurs à définir) sans ticket modérateur est sans doute plus faible qu'on ne l'imagine habituellement. En période de pénurie de leurs forces vives, ce ne sont pas les MG qui risquent de multiplier inutilement les consultations et les patients ne fréquentent pas leur salle d'attente juste pour le plaisir !"Le GBO accueille avec grand intérêt la déclaration d'intention mais souhaite que le débat s'ouvre sur une réflexion plus large sur les autres mesures à prendre pour une meilleure organisation des soins.Pour David Simon, généraliste à Colfontaine et représentant de l'Absym au sein du FAGW, le coût actuel de la consultation en médecine générale n'est pas une barrière à l'accès aux soins. "Lorsque le patient est BIM (avec DMG), le ticket modérateur est, en tiers payant, de un euro pour la consultation et de deux à trois euros pour la visite. En fonction de la situation sociale du patient, je ne lui demande pas le ticket modérateur", explique le généraliste qui travaille dans une des communes les plus pauvres de Wallonie. "Je ne suis pas le seul médecin à le faire. Dans ce cas le ticket modérateur ne fait pas la différence. Pour les patients qui ne sont pas BIM, le ticket modérateur (de quatre euros : NDLR) n'est certainement pas un frein à la consultation." Et de regretter que les mutuelles sont actuellement occupées à priver du statut BIM les patient Omnio. "C'est moi, leur médecin, qui suis obligé de les informer qu'ils peuvent en refaire la demande. Les mutuelles ne font pas leur boulot, elles mènent une action anti-sociale contre les plus pauvres ."Par ailleurs, le Dr Simon estime que les autorités devraient surtout revaloriser la médecine générale pour rendre cette spécialité plus attractive et assurer dès lors un accès plus facile à la population. "L'Absym a d'ailleurs récemment proposé de faire passer la consultation en médecine générale à 30 euros" (lire Jdm N°2563), rappelle le généraliste. Quant à l'argument du manque de valeur attribué à ce qui est gratuit, David Simon souligne que dans sa pratique, au contraire, ce sentiment ne se ressent pas. "Cela se fait dans la relation qui lie le médecin et son patient. Ce dernier apprécie le geste du médecin."La sortie médiatique d'Elio Di Rupo sur ce sujet est, pour David Simon, le signe que la médecine générale devient un objet politique majeur. "Nous pouvons nous en réjouir." Rappelons que les soins dentaires de base sont déjà totalement remboursés pour les enfants de moins de 18 ans chez les dentistes et que certaines mutuelles (la Mutualité chrétienne, Soldaris, Partenamut...) remboursent le ticket modérateur pour les consultations des moins de 18 ans (titulaires du DMG) chez les médecins généralistes, chez les spécialistes conventionnés (pédiatres, ORL, orthopédistes...), les orthodontistes, les kinés ainsi que pour les soins infirmiers. Solidaris rembourse également les tickets modérateurs des plus de 18 ans en fixant une franchise annuelle de 25 euros pour la consultation chez le MG, le gynécologue, l'ophtalmologue, le logopède et en kinésithérapie pré et post-natale. Pour les plus de 75 ans, la visite est également remboursée. V.C.