Enfant de la balle, Rose-Marie Schneider est issue d'une longue lignée de comédiens allemands, monte sur les planches dès 15 ans, dans les années 50, afin de donner la réplique à sa mère. Sa frimousse, ses yeux d'un bleu grisé et grisant et sa spontanéité la voit personnifier une Sissi, l'impératrice d'Autriche, bien plus charmante encore que son modèle. La voilà star allemande à 17 ans.
Plutôt que de se laisser bercer par le 'yodlement' sous le balcon à géraniums, en 1958, elle part en France, sans connaître un mot de français, et tourne avec Pierre Gaspard-Huit "Christine", remake d'un film allemand de Max Ophüls, dans lequel jouait Magda, la mère de Romy. C'est elle qu choisit le jeune Alain Delon comme partenaire, lequel deviendra son compagnon. Avec lui, elle joue au théâtre "Dommage que ce soit une putain" de John Ford (le contemporain de Shakespeare, pas le réalisateur américain) sous les ordres de Luchino Visconti. L'un de ses maîtres dira-t-elle, avec Coco Chanel qui l'habille et la moule.
Romy Schneider prend des risques, tourne six films à Hollywood dont le procès avec Orson Welles, ou une loufoquerie avec Peter Sellers et Woody Allen entre autres, "What's New Pussy Cat?", assurant elle-même les doublages en allemand et français. Elle ose tout, même les dernières expériences de Henri-Georges Clouzot avec "L'enfer", jamais terminé, le tyrannique metteur en scène étant victime d'une crise cardiaque pendant le tournage.
Les choses de sa vie
Tout ceci nous est raconté au travers d'affiches, de photographies rares de tournages, de robes, d'extraits, dont notamment l'érotissime tiré de "La piscine", de Jacques Deray, avec... Delon.
Lors des synchronisations du film aux studios de Boulogne, elle croise Claude Sautet, qu'elle subjugue. Un réalisateur avec qui elle tournera cinq films, dont le premier sera "Les choses de la vie". Avec lui, la relation de soutien et d'écoute est réciproque.
Romy, qui est splendide, se révèle également drôle, à voir le petit mot qu'elle laisse à son "Clo" (Claude) en s'excusant d'être partie "faire dodo" ; et de conclure: "Fa va come Za?" en imitant l'accent allemand.
Mais Romy la perfectionniste est aussi angoissée, jamais satisfaite, en éternel besoin de reconnaissance et d'amour ("elle n'est pas paisible", disait d'elle Michel Piccoli). Elle qui, dans ses dernières années, accepte des projets d'inconnus comme celui de Francis Girod, 29 ans à l'époque, qui signe "Le trio infernal".
Le symbole d'une femme de la deuxième moitié du 20e siècle, qui a débuté potiche mais s'est libérée à tout point de vue, a fait vaillamment des choix risqués ("Ludwig", projet insensé de Visconti). Une mère également, dévastée par la mort tragique de son jeune fils David, et décédée à 43 ans à peine (pour une carrière "vieille" déjà de près de 30 ans) d'un arrêt cardiaque, qui s'est sans doute laissée mourir...
Ceci alors que celle qui, bébé, se retrouva dans les bras de Hitler (d'où, à l'inverse, sa contribution à des films comme "Le train" ou "Le vieux fusil", et trois autres films sur le nazisme) envisageait, au travers du projet "Cocaïne", de se placer sous l'oeil de la caméra du provocateur anarchiste allemand Rainer Werner Fassbinder... De six ans son cadet, il décède en juin 1982, 12 jours après la disparition de Romy.
Jusqu'au 24 juin, boulevard Anspach, 85 à 1000 Bruxelles. Infos: https://cinema-palace.be/fr/exposition-romy-schneider