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"L'urticaire n'est pas une allergie, ou presque jamais, même si dans les deux cas on retrouve des démangeaisons et des plaques gonflées avec des taches rouges. Dans de très rares cas, une allergie peut être à la base d'une urticaire : une très bonne anamnèse est alors nécessaire. De nombreux médecins effectuent encore des tests d'allergie en cas d'urticaire, mais ceci n'est plus préconisé dans les directives 1. Dans la classification de l'anaphylaxie, les réactions d'urticaire sont classées en grade I. Il y a effectivement eu des cas de réaction anaphylactique qui ne se sont manifestées que par l'apparition de papules : la différence majeure entre l'anaphylaxie de grade I et l'urticaire est que l'anaphylaxie est liée à un incident particulier (par exemple, l'absorption d'un aliment ou une piqûre d'insecte) ; c'est alors qu'apparaissent les papules. Dans le cas de l'urticaire, la réaction peut se déclencher après plusieurs jours et il n'y a généralement pas de lien possible avec l'événement déclencheur. Si les taches n'apparaissent qu'une fois, les tests d'allergie sont justifiés. Mais il s'agit d'une minorité des cas d'urticaire. Nous avons d'ailleurs entamé une étude pour déterminer précisément la fréquence de cette anaphylaxie. "Pour diagnostiquer l'urticaire, demandez au patient si les lésions cutanées apparaissent à des endroits différents d'une journée à l'autre. Si ce n'est pas le cas dans un laps de temps de 24 heures, il est peu probable qu'il s'agisse d'urticaire. Mais s'ils restent au même endroit pendant plus de 24 heures, ce n'est pas non plus une urticaire, mais peut-être une vascularite urticarienne, ou une lésion d'urticaire ou encore une autre maladie. Dans la vascularite urticarienne, les papules sont plus difficiles à sentir au toucher ; si une vascularite est identifiée histologiquement, elle sera traitée par anti-inflammatoires.Il est important d'établir une différence entre l'urticaire aiguë et chronique : la première disparaît dans les 6 semaines ; si les poussées se produisent plus longtemps, il est alors question d'urticaire chronique.L'urticaire chronique peut être continue, ou connaître des périodes de récidives avec des une activité plus ou moins importante. Il existe un score d'activité de l'urticaire (urticaria activity score - UAS) qui prend en compte le nombre de papules apparaissant par jour et l'impact des démangeaisons sur l'activité quotidienne, avec des notes de 0 à 3. L'addition de ces scores (le maximum est de 6 par jour, soit 42 par semaine) donne un bon aperçu de l'activité de la maladie. En outre, pour le remboursement de l'omalizumab, il faut démontrer que la maladie du patient n'a pas pu être gardée sous contrôle pendant 6 mois." L'urticaire n'est pas une menace pour la vie, à moins d'être associée à un angioedème, mais heureusement elle peut être traitée correctement. Chez un patient particulier, l'urticaire se présente habituellement sous le même schéma. Certains patients présentent uniquement un angioedème, d'autres seulement une urticaire, la plupart d'entre eux ont les deux. "Seulement 5 % de toutes les urticaires sont chroniques (95 % sont aigües). Les formes chroniques sont divisées en urticaire chronique spontanée (qui guérit, dans plus de 80 % des cas, en moins d'un an) et urticaire inductible (provoquée par des stimuli physiques - changements de température et par la transpiration / efforts - ou par contact avec certaines protéines, ce qui peut être confirmé immunologiquement ou non).Par le passé, des recherches approfondies ont été menées sur les causes de l'urticaire, mais elles n'ont pas donné beaucoup de résultat, car quasiment aucune cause ne peut être mise en évidence. " Dans de nombreux cas, une urticaire aiguë se produit pendant ou juste après une infection (p. ex. gastro-entérite, rhume). Nous ne savons pas exactement pourquoi le corps réagit par de l'urticaire. Dès que l'infection est terminée, l'urticaire disparaît également. Le mécanisme n'est pas clair. Certes, les mastocytes qui libèrent de l'histamine et d'autres médiateurs disposent de récepteurs pour certains composants des bactéries et virus ou, pour certains médiateurs, du système immunitaire lui-même. Soit les masto-cytes sont hyperactivés, soit leur seuil d'activité est abaissé par l'infection... La physiopathologie n'est pas complètement éclaircie. Voici ce qui m'amène à mon deuxième message, pertinent pour la pratique : en cas d'urticaire aiguë dans le contexte d'une infection, seul un test sanguin limité (formule, sédation, foie, fonction rénale) est nécessaire. Des examens complémentaires, comme ils étaient réalisés par le passé (scan des sinus, dentistes, etc.), sont inutiles et ne sont plus inclus dans les dernières directives1. "Dans l'urticaire chronique, les mêmes règles s'appliquent, bien qu'un traitement ultérieur par un dermatologue soit recommandé. Il ne proposera des examens diagnostiques plus poussés que dans le cadre d'une anamnèse spécifique.L'urticaire aiguë est traitée par des antihistaminiques ou, en cas de forte poussée, par une courte cure de corticostéroïdes : quelques jours mais pas plus !Pour le traitement de l'urticaire chronique, il existe des guidelines clairs 1, soutenus par le European Dermatology Forum (EDF) et la European Academy of Allergy and Clinical Immunology (EAACI), qui autorisent jusqu'à 4 comprimés d'antihistaminiques par jour (cétirizine, desloratadine, lévocétirizine, féxofé-nadine ou rupatadine, par exemple). Les patients qui ne répondent pas aux antihistaminiques doivent recevoir des traitements plus systémiques. La majorité des patients seront mis sous omalizumab, un anticorps monoclonal indiqué pour l'asthme et pour l'urticaire, bien qu'il soit parfois nécessaire de suivre le traitement assez longtemps avant que les résultats ne soient perceptibles. D'autres possibilités incluent, par exemple, la ciclosporine." Ce qu'il ne faut pas faire en cas d'urticaire chronique - mais aussi dans le psoriasis ou l'eczéma atopique - est de prescrire un traitement au long cours ou répété de corticostéroïdes systémiques (per os ou par injections) : c'est là mon troisième message important. Un bon conseil est : si vous pensez que les corticostéroïdes sont nécessaires pour votre patient, référez-le à un dermatologue car il existe de meilleures options qui aideront le patient efficacement ", explique le Pr Gutermuth.