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Les projets pilotes de soins intégrés ont commencé début 2018 pour une période de cinq ans. Zorgzaam Leuven est un projet d'envergure - largement documenté sur le site web zorgzaamleuven.be. Pr Van Pottelbergh : "Notre portefeuille d'actions est très vaste. Certaines actions ont été initiées, mises en oeuvre ou renforcées par nos soins. Le Réseau multidisciplinaire local nous a légué de bons programmes de soins pour le diabète et l'insuffisance rénale chronique, auxquels se sont rapidement ajoutés la BPCO, les cardiopathies et les troubles psychiques. Le projet qui concerne les cardiopathies fonctionne de manière relativement autonome, mais notre tâche consiste essentiellement à mettre en relation les prestataires de soins et leurs actions. Nous avons noué des liens étroits avec l'ACHG et l'UZ Leuven. Les programmes de soins que nous déployons sont fondés sur des preuves et bien étayés." "Nos Quartiers bienveillants existaient déjà avant que la Flandre ne lance un appel à la création de quartiers chaleureux. Mais nos quartiers bienveillants ont quelque chose de différent. Parallèlement au fonctionnement global des comités de quartier, des diverses organisations impliquées et des bénévoles, il existe huit Quartiers bienveillants - avec des équipes de généralistes, pharmaciens, aides à domicile, infirmiers à domicile, kinésithérapeutes locaux, etc. Ces équipes planifient des actions dans leur quartier et mettent en oeuvre les programmes de soins, dont elles suivent les accords transmuraux. Elles mettent en place les soins intégrés à leur rythme. Ces prestataires de soins collaborent dans la multidisciplinarité, même s'ils ne travaillent pas dans un cabinet multidisciplinaire." Gijs Van Pottelbergh: Quelque 8.000 patients ont été inclus dans nos actions - soit plus de la moitié du groupe théoriquement concerné, un bon résultat dont nous sommes fiers. Grâce à ces programmes, des centaines, voire des milliers de patients reçoivent des soins de qualité et fondés sur les preuves dont ils n'auraient pas pu bénéficier dans d'autres circonstances. Nous ne pouvons malheureusement pas démontrer que cette démarche leur a par exemple permis de vivre plus longtemps car cette recherche n'a jamais été effectuée. Le comité d'accompagnement scientifique qui devait évaluer les projets pilotes de soins intégrés a été dissous en 2020. Lors du lancement des projets pilotes, il avait été décidé que les actions s'autofinanceraient. Un montant de 150.000 euros a toutefois été octroyé à chaque projet pour la coordination. Le principe des économies partagées devait permettre qu'une partie des gains d'efficacité revienne aux projets pilotes, mais ce principe a été assez rapidement abandonné. Au lieu de cela, les projets pilotes ont bénéficié d'un montant supplémentaire qui pouvait aller jusqu'à 200.000 euros afin de financer partiellement leurs actions. Les économies partagées sont très difficiles à démontrer. L'incertitude quant au montant réellement épargné est trop grande. Je ne crois pas que les soins intégrés permettent de faire d'énormes économies. La question est surtout de savoir si, avec la même somme, vous pouvez dispenser plus de soins et des soins de meilleure qualité. Chaque euro dépensé doit apporter une valeur ajoutée. Grâce à l'argent reçu pour nos actions, nous avons par exemple fait en sorte que les endocrinologues puissent consulter au sein de la maison de repos et de soins, de façon à éviter aux résidents un transport vers l'hôpital. Nous avons formé une dizaine d'éducateurs, principalement spécialisés en diabétologie, à l'insuffisance cardiaque. Leur contribution est limitée, mais ils nous aident à mettre en oeuvre le programme de soins pour les cardiopathies. On peut considérer que l'inclusion d'un patient dans un programme de soins évite des dépenses beaucoup plus importantes pour des soins complexes, tels qu'une hospitalisation... Les questionnaires PREMs et PROMs (1) faisaient également partie de la mission du comité d'accompagnement scientifique qui a été dissous. D'après ce que nous rapportent les associations de patients impliquées directement dans notre projet, et les mutuelles, et d'après les réactions de nos patients, nos actions apportent de la satisfaction. Nous faisons également le point sur les attentes des patients qui ont besoin de soins complexes. Nous les interrogeons ou leur demandons d'écrire ce qu'ils attendent précisément de nos soins et ce qui est encore important pour eux dans la vie. Le fait d'aborder avec eux l'essence des soins joue aussi un rôle primordial dans la manière dont ils les vivent. Il est essentiel à nos yeux de toucher par exemple des personnes d'autres cultures ou de nous assurer que les personnes qui en ont le plus besoin rencontrent bien notre psychologue de première ligne. Nous examinons comment atteindre les gens de la bonne manière. C'est important car les personnes vulnérables sont souvent aussi celles chez qui on peut réaliser le plus de progrès en matière de santé. Notre programme pour les femmes enceintes vulnérables a déjà accueilli plus de 400 femmes. Nos collaborateurs de quartier sont de bonnes antennes pour identifier les populations en difficulté. Nous avons par exemple organisé des soins dentaires dans un quartier où vivent beaucoup d'habitants d'origine népalaise, parce que nous savons que cela constitue un problème dans cette population. Mais nous n'exploitons pas encore les sources de données de manière suffisamment systématique pour identifier les groupes vulnérables. Ce sera une prochaine étape importante. Nous leur apportons notre soutien de mille façons. Nous recevons également du feed-back positif de leur part, lors des intervisions, par exemple. Et les soignants qui ne font pas partie des équipes de quartier utilisent aussi nos programmes de soins. Les médecins nous demandent comment aborder un problème dans leur cabinet. Nous avons notamment engagé des étudiants jobistes pour envoyer les invitations à la vaccination contre la grippe pendant la crise sanitaire. Nous devons sans cesse peser le pour et le contre pour savoir quelles propositions lancer, car nos prestataires de soins sont déjà ultra sollicités. Et les médecins ne sont pas les seuls concernés. En maison de repos et de soins, les infirmiers qui reçoivent la visite d'un diabétologue apprécient énormément cette opportunité de rencontrer le spécialiste. Les collaborateurs des cabinets médicaux se voient confier de nouveaux rôles qui les impliquent davantage dans les soins et ils ressentent cela comme une valorisation de leur travail. Grâce au pot prévu pour les actions à mettre en place dans le cadre du projet, les équipes de quartier disposent d'une somme qu'elles peuvent utiliser comme bon leur semble pour améliorer les soins dans leur quartier. Cette somme, qui peut aller jusqu'à 10.000 euros, est plus symbolique qu'autre chose, mais elle est capitale sur le plan psychologique. L'objectif est de mettre en place un partenariat avec l'Inami au cours des prochains mois. Nous désirons élargir les actions de Zorgzaam Leuven à toute la région qui entoure la ville. C'est d'ailleurs une demande que nous recevons régulièrement. Nous voulons aussi axer davantage notre travail sur les données pour la gestion des populations, mettre en place des audits dans les dossiers de patients, etc. Nous avons tout de même déjà réalisé pas mal de choses. Il serait regrettable que le projet soit oublié au fond d'un tiroir. Nous avons envie de partager notre expérience avec d'autres régions. Nous intervenons régulièrement dans des congrès internationaux tels que l'ICIC ainsi que sur des forums en Flandre et ailleurs en Belgique. On nous demande tellement souvent de venir partager notre expérience ou expertise que dans de nombreux cas, nous n'avons plus la possibilité de répondre positivement. J'espère que le financement se prolongera avec les partenariats. Dans tous les cas, nous avons l'intention de poursuivre notre projet à Louvain. Les ressources et les personnes disponibles sont bel et bien là. Le réseau hospitalier et le cercle de médecins généralistes, par exemple, ont certains moyens. Il y a aussi les réseaux palliatifs, les Logos, les associations de pharmaciens... Ma collègue coordinatrice Marie Vandeputte suit attentivement les actions et objectifs communs des partenaires dans une feuille de calcul. Nous connectons ce qui existe et encourageons nos partenaires à activer davantage leurs réseaux également. Et nous révisons ces données tous les trimestres. Ensuite, le montant de base que nous recevons actuellement est indispensable. Nous avons utilisé le financement reçu de manière très particulière. L'objectif du montant pour la gestion était de recruter un ou deux coordinateurs. Retirez deux personnes du marché du travail et demandez-leur de construire des soins intégrés. Mais cela ne fonctionne pas comme ça. Je me charge donc de la coordination avec deux autres professionnels des soins. Zorgzaam Leuven recherche des personnes du secteur des soins de santé et leur donne une petite partie des moyens pour qu'elles consacrent par exemple 20 ou 40% de leur temps de travail à bâtir quelque chose pour le projet. Ce sont des gens qui mettent leurs intérêts en jeu, des professionnels qui s'investissent déjà dans les soins de santé, avec une vision à long terme partagée. À Louvain, nous savons déjà quelles prochaines étapes nous voulons franchir vers des soins intégrés. Mais ces étapes seront différentes dans chaque région de Flandre. Il est impossible d'intégrer cela dans un plan gouvernemental global. Les autorités doivent faire confiance aux professionnels locaux qui veulent s'impliquer dans ce projet.