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La nouvelle étude, qui paraît cette semaine dans Nature Biotechnology, décrit les performances de 12 tests sérologiques Covid-19. Conclusion : aucun test n'offre de performance suffisantes pour être utilisé comme étalon de référence. " Nos données démontrent une spécificité de plus de 95% pour la plupart des tests évalués et de plus de 99% pour deux tests, le Wondfo et le Sure Biotech, ainsi que l'ELISA maison ", écrivent les auteurs. Rappelons que la spécificité mesure la probabilité que le test soit négatif chez les non-malades. En contexte Covid-19, il s'agit donc de s'assurer que le test ne détecte pas d'anticorps dirigés contre le virus Sras-Cov-2 chez les personnes n'ayant pas été touchées par la maladie. La mesure est exprimée en pourcentage et l'objectif est de se rapprocher de 100% et d'avoir le moins de " faux positif " possible. Dans cette étude, le pourcentage de positivité supérieur à 80% n'a été atteint qu'au moins deux semaines après le début de la maladie clinique. " Le diagnostic précoce de la maladie reste dépendant des méthodes de détection virale ", écrit Alexander Marson, le premier auteur. " Nos données sont cohérentes avec les preuves croissantes que les IgM et les IgG ont tendance à augmenter à peu près au même moment dans Covid-19. Les tests ont montré une tendance à des taux positifs plus élevés dans les intervalles de temps pour une maladie plus grave. La plupart des échantillons de plus de 20 jours après l'apparition des symptômes contenaient des anticorps anti-Sras-Cov-2 détectables, ce qui suggère une sensibilité bonne à excellente pour tous les tests évalués chez les patients hospitalisés trois semaines ou plus après le début de leur maladie. "Conclusion de l'étude : " Un consensus s'est dégagé sur le fait que les tests sérologiques constituent un outil essentiel dans la riposte à la pandémie, mais des données insuffisantes sur les caractéristiques de performance des tests dans certaines enquêtes précoces et des lacunes importantes dans les connaissances immunologiques ont empêché un accord sur les stratégies de mise en oeuvre appropriées. Il faudrait une validation rigoureuse des tests en utilisant des ensembles d'échantillons standardisés afin de constituer la base de données essentielles pour guider les tests sérologiques pendant la pandémie. "" Ces constats mènent à abandonner l'idée émise au début de l'épidémie d'un passeport d'immunité délivré sur la base d'un test sérologique positif ", éclaire le Pr Michel Goldman, immunologue et directeur de l'Institut I3 h (ULB). Comme il le rappelle, " aucun test ne peut garantir de façon absolue que l'on soit protégé d'une nouvelle infection et que l'on ne présente plus aucun risque de contribuer à la transmission du virus. Certes, suite à l'infection, notre système immunitaire va nous permettre de contrôler plus efficacement et plus rapidement une nouvelle attaque virale, mais il existe encore beaucoup d'incertitudes sur les mécanismes en jeu et sur la durée de la protection. " Il semble bien que les anticorps détectés dans le sang par les tests sérologiques ne soient pas les seuls à la manoeuvre. Des anticorps produits localement au niveau des muqueuses du nez et du pharynx et une variété de globules blancs les lymphocytes T interviennent également. Un test sérologique négatif ne veut donc pas dire absence de protection. " Ceci ne signifie pas que les tests sérologiques n'ont pas leur place dans la lutte contre le Covid-19 ", insiste le professeur Michel Goldman. " Dans la pratique médicale, ils permettent de rattraper le diagnostic de la maladie a posteriori, lorsque le test PCR n'a pu être réalisé à temps ou lorsqu'il était faussement négatif. Ces tests jouent aussi un rôle important dans le diagnostic du syndrome d'inflammation multisystémique qui peut survenir, heureusement rarement, chez l'enfant infecté. A l'échelle de la population, les tests sérologiques permettent de recueillir des informations précieuses pour suivre la circulation du virus et comprendre son mode de transmission. Ce sont aussi ces tests qui permettent de suivre le niveau de l'immunité collective. D'ores et déjà, ils ont permis d'établir que l'idée de laisser la nature assurer l'immunité de la population doit être abandonnée car elle ne porterait ses fruits qu'au bout d'une longue période et au prix d'une mortalité considérable. " Raisons pour lesquelles la Grande-Bretagne et Pays-Bas ont abandonné cette stratégie qu'ils avaient adopté au début de la pandémie. Mais le test sérologique peut aussi être très mal utilisé. C'est le cas dans la récente affaire de l'asbl Lagardère (voir jdM n°2639). " La confusion y est entretenue quant à la signification des résultats de ces tests qui sont présentés comme une alternative à la PCR avec une argumentation racoleuse : moins cher, plus fiable, moins dangereux, moins désagréable et beaucoup plus rapide ", explique Elie Cogan, ancien doyen de la faculté de médecine de l'ULB et rédacteur en chef de goodmedecine.com. " Tout cela est vrai, sauf que l'on teste deux choses différentes. Seule la PCR permet d'identifier la présence du virus. Le test sérologique, lui, identifie des anticorps sans rapport avec la présence éventuelle du virus au temps du prélèvement. Il faut dénoncer l'information erronée qui est transmise au citoyen. Lorsque le test sérologique rapide est négatif, l'équipe médicale de l'ASBL Lagardère délivre un certificat dont l'intitulé indique " test COVID 19 " sans préciser le type de test, et rassure le citoyen... alors que celui-ci, au contraire pourrait être porteur asymptomatique et donc, soit déjà contaminant soit à risque d'être contaminé. "Au contraire, les rares patients identifiés comme positifs sont considérés, à tort, comme porteurs du virus avec la recommandation d'être isolés. " Le danger est donc bien de rassurer erronément les sujets séronégatifs au risque de les voir abandonner les gestes barrières et de contaminer autrui... et donc de favoriser la propagation du virus. Par ailleurs, on inquiétera inutilement les individus positifs... alors qu'ils sont (très probablement) protégés et non contaminants. "