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"Le cancer a généralement une cause multifactorielle", explique le Dr Katleen Janssens, généticienne (service de Génétique, UZA). "Ce n'est que chez 5 à 10% des patients que la prédisposition héréditaire joue un rôle important dans le développement du cancer." Le cancer survient lorsqu'une cellule développe une mutation qui lui confère un avantage en termes de survie par rapport aux cellules normales de l'organisme. De ce point de vue, le cancer est toujours génétique. Mais chez la petite minorité d'individus citée ci-dessus, le cancer est également héréditaire. Ils ont hérité d'un de leurs parents une mutation présente dans toutes les cellules de l'organisme. Une telle mutation donne lieu, par exemple, à une réparation déficiente de l'ADN. Toutes nos cellules sont exposées à un endommagement de l'ADN, mais en présence de mécanismes de réparation adéquats, cela reste sans conséquence. Cependant, chez les personnes dont les mécanismes de réparation sont déficients, il existe un risque accru de développer une mutation qui donne à la cellule un avantage en termes de survie et fait ainsi apparaître une tumeur. Par rapport à la prévention du cancer dans les familles et à la pertinence des gènes, on peut distinguer trois catégories: · Les cancers sporadiques (75 à 85% des cas): dans ce cas, la mutation à l'origine du cancer est acquise et n'est donc pas héréditaire. Le risque de cancer est déterminé par une combinaison de différents facteurs, dont des facteurs environnementaux. La survenue d'un même cancer chez deux membres d'une même famille peut donc être due au hasard ou à des facteurs environnementaux, communs ou non. Le cancer se développe généralement à un âge plus avancé. Les membres de ces familles sont éligibles pour participer au dépistage de masse. · Les cancers héréditaires (5 à 10%): cette forme de cancer est causée par une mutation génétique qui peut être transmise de parent à enfant. La maladie se manifeste souvent à un plus jeune âge. Les membres de ces familles entrent en considération pour un test génétique. S'ils sont porteurs, ils ont accès à un programme de dépistage adapté. · Les cancers familiaux (10 à 20%): il s'agit d'une zone grise. Dans le cas des cancers familiaux, l'incidence d'un cancer particulier dans une famille est plus élevée que dans la population générale. On a l'impression qu'il s'agit d'une prédisposition héréditaire, mais les tests génétiques ne permettent pas de trouver une mutation génétique. La décision d'effectuer un dépistage plus intensif/adapté dans ce groupe est basée sur l'utilisation de modèles prédictifs (voir ci-dessous). Les caractéristiques des syndromes de prédisposition au cancer constituent un critère fondamental pour orienter un patient vers un test génétique (un seul critère suffit pour procéder à un test génétique): · Un jeune âge au moment du diagnostic (< 40 ans pour le cancer du sein) ; · Des tumeurs primaires multiples (cancer du sein bilatéral, surtout si la première tumeur survient avant l'âge de 50 ans) ; · La présence de tumeurs dans la famille ; · Des spectres tumoraux typiques (la femme développe non seulement un cancer du sein, mais aussi un cancer de l'ovaire ou du pancréas) ; · ... Une liste plus détaillée de toutes les indications de tests génétiques pour le cancer du sein et/ou de l'ovaire est constituée par la Société belge de génétique humaine (BeSHG) au sein du Collège de génétique, un organisme belge qui garantit l'excellence en matière de génétique appliquée et expérimentale. La liste est régulièrement mise à jour en fonction des données scientifiques récentes. La dernière version date du 22 mai 2022 et est accessible à tous sur le site du Collège de génétique (college-genetics.be). La liste est longue, mais outre les critères déjà énumérés ci-dessus, le Dr Janssens souligne en particulier le critère nouvellement ajouté du 'cancer du sein métastatique HER2-négatif (HR-négatif ou HR-positif)'. En effet, des recherches ont montré que les patientes atteintes d'un cancer du sein métastatique HER2-négatif et présentant une mutation germinale du gène BRCA1/2 ont un meilleur taux de réponse, une survie sans progression plus longue et moins d'effets secondaires lorsqu'elles sont traitées avec des inhibiteurs de PARP, en comparaison à un traitement conventionnel (essai OlympiAD). Les tests génétiques ne portent donc pas en premier lieu sur les membres de la famille, mais bien sur la patiente elle-même, afin de déterminer si elle est éligible à un traitement par inhibiteurs de PARP. La liste fait également référence aux facteurs ethniques et à certains cancers dans la famille qui peuvent être associés à un risque plus élevé de cancer du sein chez une femme - le type de cancer et éventuellement le degré de parenté sont spécifiés ici. Le dernier critère est le suivant: "Toute situation familiale dans laquelle un programme de prédiction indique un risque de plus de 10% de syndrome de prédisposition au cancer". Les tests génétiques examinent systématiquement le même ensemble minimal de gènes. Certains d'entre eux sont liés à un risque élevé, tandis que d'autres entraînent un risque moindre. Une mutation BRCA1/2 est associée à un risque de 60 à 80% de développer un cancer du sein au cours de la vie. Pour une mutation CHECK2 ou BARD1, le risque est d'environ 30%. Dans la population générale des femmes, le risque est d'environ 12,5% tout au long de la vie (1 femme sur 8). "Tous les centres de tests génétiques belges effectuent des tests équivalents sur la base des mêmes directives", assure Katleen Janssens. "Les membres d'une même famille peuvent même se rendre chacun dans un centre différent parce que les centres collaborent." Lorsque l'on fixe un rendez-vous, il est important de mentionner explicitement que la personne consulte pour un cancer familial afin qu'elle soit immédiatement dirigée vers la bonne consultation. La lettre de renvoi doit idéalement contenir déjà un maximum d'informations sur le patient et sa famille. Il est surtout important d'informer le patient qu'il doit apporter lui-même toutes les informations utiles à la consultation et s'y préparer. Pour certains patients, cela peut impliquer de s'adresser aux membres de la famille pour recueillir des informations précises, par exemple sur l'âge auquel l'un ou l'autre membre de la famille a eu un cancer du sein. Grâce à ces informations, les antécédents familiaux et personnels peuvent être passés en revue avec le patient lors de la consultation. Un arbre généalogique jusqu'au deuxième degré est établi. Ensuite, à l'aide des informations recueillies, le généticien explique les risques d'avoir un syndrome de prédisposition au cancer dans la famille, les tests disponibles pour ce syndrome, ainsi que les avantages et les inconvénients des tests génétiques. "Il est important d'agir sur la base d'une prise de décision partagée", souligne le Dr Janssens. L'encadrement est multidisciplinaire, avec l'intervention d'un psychologue ou d'autres prestataires de soins. Le coût pour le patient est d'environ 8 euros pour le test génétique et le ticket modérateur pour les consultations. Lorsque le résultat est disponible, le généticien discute avec la patiente des implications (quels sont les risques), de l'opportunité de dépister les membres de la famille et de la possibilité d'effectuer un test génétique préimplantatoire (plus d'infos - en néerlandais - sur: https://www.uza.be/behandeling/pre-implantatie-genetische-test-pgt ). Un test génétique diagnostique peut être demandé par tous les médecins - c'est-à-dire, dans le cas présent, un test génétique chez une patiente qui a (eu) un cancer (du sein) afin de vérifier si elle a une prédisposition héréditaire. Pour ce faire, le médecin peut remplir un formulaire de demande, qui se trouve sur le site du centre de génétique. À Anvers, il s'agit de www.genetica-antwerpen.be. Il est important de mentionner l'indication sur le formulaire de demande, tant pour le remboursement que pour l'interprétation des résultats. Contrairement à un test génétique diagnostique, un test génétique présymptomatique ne peut être demandé que par un généticien. Concrètement, il s'agit de tests génétiques effectués sur des membres de la famille d'une personne ayant eu un cancer (du sein) ou chez qui une prédisposition héréditaire a été constatée. "Dans une telle situation, un conseil approfondi est nécessaire avant que le test n'ait lieu", ajoute le Dr Janssens. Que faire si l'on ne trouve aucune prédisposition héréditaire chez une patiente ayant plusieurs femmes atteintes d'un cancer du sein dans sa famille? On peut lui calculer son risque de cancer du sein à l'aide d'un programme de prédiction du risque. Le Dr Janssens utilise le modèle Canrisk à cette fin. Il est préférable de confier son utilisation à un généticien. En fonction du résultat, le BeSHG a formulé des lignes directrices: · En cas de risque moyen, on renvoie la femme pour le dépistage de masse. · En cas de risque accru (17-30%), on recommande une mammographie annuelle dans la tranche d'âge 40-49 ans, avec éventuellement échographie. La femme est ensuite orientée vers le dépistage de masse. · En cas de risque fortement accru (> 30%): dès 30 ans, une IRM chaque année et une mammographie unique à 40 ans. La patiente passe ensuite au dépistage de masse. Néanmoins, le suivi doit toujours être déterminé individuellement en concertation avec le gynécologue traitant afin qu'il puisse prendre en compte le type de tissu mammaire de la femme lors du choix de la technique d'imagerie la plus appropriée.