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Le journal du Médecin : Quels sont les types de tests Covid-19 actuellement sur le marché ? Quelle est leur fiabilité ? Quels sont leurs avantages et inconvénients respectifs ? Premièrement, il y a les tests diagnostiques directs. Il s'agit principalement de la qRT-PCR qui détecte l'ARN viral. Sur frottis nasopharyngé, sa sensibilité va de 70 à 95%. Sur la salive, elle est plus faible, surtout pour des charges virales faibles. La spécificité est proche de 100%. Il existe également des tests antigéniques rapides réalisés sur frottis, détectant des protéines virales grâce à un anticorps. Ils sont nettement moins performants. Deuxièmement, il y a les tests sérologiques, permettant un diagnostic indirect. Ils mettent en évidence des anticorps (de type IgG, IgM, parfois IgA ou totaux) développés par le patient suite à un contact avec le virus. Il existe d'abord des tests rapides, qualitatifs, réalisés sur une goutte de sang et donnant une réponse endéans quelques minutes. Ces tests sont pratiques car ils peuvent être réalisés auprès du patient, au cabinet du généraliste ou dans une maison de repos, par exemple. Par contre, le résultat n'est pas automatiquement enregistré dans le dossier du patient et le contrôle de qualité est limité, vu le caractère individuel de ces dispositifs dont le prix avoisine 10 euros (parfois beaucoup plus sur internet). Il y a ensuite des tests réalisés en laboratoire, généralement sur des automates, de type Elisa ou Clia. Ils donnent des résultats quantitatifs ou semi-quantitatifs et peuvent être réalisés à débit élevé, avec un contrôle de qualité strict. Ils sont également moins coûteux et totalement remboursés quand les critères Inami, repris sur le site de Sciensano, sont rencontrés, contrairement aux tests rapides. En mars, il y aurait eu un intérêt à tester les voyageurs à leur retour de vacances. Les " tests rapides " et les tests PCR sont-ils dès lors en concurrence ou plutôt complémentaires ? Les tests sérologiques (rapides ou non) sont effectivement complémentaires des tests PCR. La présence d'anticorps signe un contact avec le virus qui peut être relativement ancien. Dans certains cas, elle permet de faire un diagnostic indirect mais tardif (les anticorps ne sont détectables qu'après minimum sept jours). Au stade actuel, on ignore si les anticorps détectés confèrent une protection contre une nouvelle infection. Par ailleurs, certains patients ne développent pas d'anticorps. Ce sont donc des tests qui ont aussi leurs failles. Seule une PCR peut démontrer une présence virale active (sauf dans de très rares cas) et le caractère contagieux du patient. Il ne faut toutefois pas oublier qu'un résultat négatif n'exclut pas totalement la présence du virus. Y a-t-il suffisamment de tests disponibles pour une politique préventive contre le Covid ? La presse fait état que se faire tester en Belgique actuellement relève " du parcours de combattant ". Des rumeurs font état de ce que l'état belge garderait des stocks de tests pour une prochaine vague pandémique " encore plus grave "... Tout dépend de la stratégie adoptée. Tester toute la population aveuglément n'a pas de sens. Par contre, dépister les sujets asymptomatiques dans les zones à taux élevé de contamination comme la région d'Anvers, et à présent celles de Bruxelles et Liège, est le meilleur moyen de briser les chaînes de transmission. Il reste une capacité inutilisée qu'il faut exploiter de façon ciblée en fonction des risques : largement dans ces zones et, à l'échelle nationale, en testant les professions présentant des contacts fréquents : personnel soignant (au sens large), pharmaciens, policiers, serveurs, commerçants, etc., toutes les deux semaines par exemple. Il y a effectivement eu des difficultés à se faire tester en juillet en raison de la fermeture de nombreux centres de tri et de la mise en sommeil de la plateforme nationale. Ils ont depuis été réactivés avec un impact visible sur les chiffres. Nous plaidons néanmoins pour des procédures facilitées, sans passer par la prescription du généraliste qui constitue un ralentissement du processus et une lourde charge pour les médecins. En ce qui concerne une éventuelle pénurie de réactifs, cette rumeur court depuis quelques semaines mais aucune information officielle n'existe. Au jour d'aujourd'hui, rien n'empêche donc de monter en puissance pour décapiter la courbe de croissance des contaminations avant qu'elle ne devienne exponentielle. On doit néanmoins se préparer à une éventuelle difficulté d'approvisionnement en hiver et réfléchir à des alternatives, comme la nouvelle méthode développée à l'ULiège. Il y a cette fois une collaboration en ce sens entre les laboratoires de biologie clinique et le gouvernement, ce qui est une bonne chose. Le confinement était sans doute inévitable en mars, compte-tenu des circonstances. Une tribune récente, signée notamment par le Pr Elie Cogan et vous-même, au nom de Take Care of Care, pose que " ne prendre aucune décision visant à organiser la détection des contaminateurs par un dépistage à grande échelle est incompréhensible ". Vous rangez-vous, au fond, du côté d'une vision qu'on pourrait qualifier d'idyllique consistant à tester le plus possible de gens, laisser les " négatifs " évoluer sans contrainte et mettre en quarantaine et sous protection les publics fragiles et positifs et ainsi éviter tout confinement aveugle ? Dans une situation idéale où les moyens le permettraient, on testerait toute la population chaque semaine. Ce n'est bien sûr pas réaliste mais la Belgique doit se doter d'une stratégie plus adaptée que l'actuelle, comme expliqué précédemment. Dans ce contexte, les sujets négatifs n'évolueraient évidemment pas sans contrainte. Une observation stricte du port du masque et des gestes barrières resterait plus que jamais indispensable mais on éviterait d'imposer à tout le pays une restriction drastique de la bulle de contacts qui a des allures de semi-confinement très dur et impossible à respecter (...).