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La création des Postes médicaux de garde (PMG) de médecine générale n'a pas été de tout repos. La ministre a introduit son projet en 2016 : articulation avec les hôpitaux, révision du financement, standardisation comptable et des heures d'ouverture, etc. La confiscation de cinq millions d'euros sur le budget (fin juin 2016) a empoisonné l'ambiance des débats, déjà morose et désabusée.Les cercles de médecins généralistes adoptèrent des visions divergentes selon leur appartenance (sous-)régionale. Les propositions de contrats s'apparentaient parfois à des dialogues de sourds, le groupe de travail de la médico-mut proposait des solutions répondant aux attentes du terrain, pragmatiques, mais individuelles. L'audit des PMG en 2017 ajouta à la confusion, pointant du doigt des différences majeures de méthode et d'activité entre PMG. Une standardisation devenait nécessaire, à laquelle l'administration s'est attelée avec beaucoup de bonne volonté.La saison 3 (2018) a vu la ministre reprendre la main : disparition du groupe de travail de la médico-mut, création de la CIA (Cellule intra-administration) sur un modèle " gestion de crise " : quelques responsables du SPF santé publique et de l'Inami, et seulement les trois coordinateurs régionaux des PMG pour les relations avec les cercles, ceux-ci étant de fait mis hors-jeu.Les objectifs poursuivis par la CIA sont l'enregistrement de l'activité de garde, le développement du 1733, la collaboration des PMG dans un ensemble intégré avec les hôpitaux, la facturation électronique des prestations, les coordinateurs locaux des PMG en courroie de transmission, la réforme des honoraires de disponibilité, la stratégie autour de la nuit noire. La situation en Flandre diffère fortement de celle en Wallonie : enregistrement Permaned, grandes zones et peu de triage en Flandre ; logiciel Mediposte (qui a depuis lors a arrêté son activité), petits cercles avec souvent triage/régulation en Wallonie. La situation à Bruxelles est à part.L'objectif poursuivi est une intégration verticale. En même temps, l'Inami s'emploie à apaiser les tensions nées des problèmes de financement des PMG. Une plateforme d'accompagnement est créée, constituée des mutuelles, de généralistes membres de la médico-mut, et de représentants du Conseil national des secours médicaux urgents. Le financement des PMG 2019 fait l'objet d'une présentation à la médico-mut le 16 septembre 2018. Un problème subsiste, et de taille : tout ceci paraît très organisé, mais il n'y a aucune base légale ou réglementaire, ni d'ailleurs d'accords de coopération fonctionnels. Les travaux confirment le projet décrit plus haut.La saison 4 commence avec les dispositions pratiques assurant le financement des PMG pour 2020, compte tenu du vide réglementaire. Schématiquement : poursuite du modus de financement 2019, avec augmentation de 2 % chaque année, en 2019 et 2020 pour les rubriques comptables non plafonnées (salaires etc.). Des subsides seront accordés individuellement aux PMG, après concertation avec l'Inami, selon les besoins justifiés. On confirme les bonus pour facturation électronique, on ajoute des bonus pour perception centralisée des honoraires et pour le tiers-payant (frais administratifs et comptables). Ce revirement d'attitude de l'administration Inami est d'ailleurs à porter au crédit des interventions répétées des syndicats médicaux.La nouveauté est l'annonce de la création des " Accords de coopération fonctionnels " (ACF - cf. Loi Qualité du 22 avril 2019).L'ACF sera une ASBL, avec un conseil d'administration, une assemblée générale, et un project manager. Il sera agréé par la Santé publique. Les médecins généralistes qui contribueront à la mise en place de ces structures seront rémunérés via le budget des honoraires médicaux (budget médecine générale). Pour chaque poste de coûts, il y aura des critères et indicateurs de qualité uniformes, qui seront imposés aux fournisseurs de services (informatique, administration, comptabilité, logiciels, etc.). Le personnel sera qualifié (barèmes IFIC), la gestion se fera comme dans les hôpitaux (RH - formation et évaluation - contrats). L'ACF bénéficiera d'un coordinateur central, d'un manager financier et d'un manager RH, d'un plan stratégique de trois ans. Le PMG aura un manager opérationnel administratif. Remarquez qu'il n'y a aucun médecin dans cet édifice, sauf bien sûr pour effectuer le travail le plus dur, celui de la garde.En conclusion, le PMG sera incorporé dans une mégastructure, totalement découplé des cercles (qui sont, eux liés aux Régions et plus au Fédéral), et on n'y retrouve aucun médecin de terrain dans les fonctions stratégiques ou de gestion. Il me semble nécessaire que mes confrères aient connaissance de ces évolutions.