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Codirectrice et programmatrice, Dominique Seutin, nous en "dessine" le contour... Le journal du Médecin: L'option de reporter la quarantième édition n'a jamais été une option?Dominique Seutin: Non. Nous avons absolument voulu garder nos dates habituelles, vu la profusion des festivals. Et un an n'est pas de trop afin de préparer une nouvelle édition. En postposant, nous n'aurions que six mois afin d'organiser la suivante. D'autant qu'il faut que le festival se déroule pendant des vacances scolaires, vu la nature d'une partie de notre public. Bien entendu, toutes les animations autour du festival sont également supprimées au même titre que les projections publiques... Un élément important traditionnellement. Ce festival sera différent: le côté festif, maquillages pour enfants, crêpes, concerts... seront en effet supprimés. Dès lors, nous avons développé une plate-forme online dotée d'une énorme programmation pour les plus jeunes, accessible pour douze euros et une appli pour jouer au festival à la maison. Par contre, le volet professionnel, Futuranima est maintenu... Oui et leur tenue en distanciel est presqu'un atout, puisqu'en général nous devons toujours refuser du monde. Le problème de capacité de salles ne se pose plus et beaucoup d'étudiants d'école d'animation se montrent intéressés par l'ensemble des problématiques et atouts du secteur. Nous allons donc proposer les rencontres en live sur le net... En quatre décennies, l'évolution de l'animation a été fulgurante, notamment au niveau technique? L'un des fondateurs Philippe Moins me confiait qu'au début du festival, il y avait très peu de courts métrages, lesquels se révélaient très artisanaux, et beaucoup de films d'auteur, alors que désormais la production du cinéma d'animation est devenue quasiment industrielle, le nombre de studios se multipliant. Nous recevons désormais des tonnes de films, sans compter la vague manga, inexistante il y a 40 ans et la production asiatique, très populaire chez les jeunes. On est passé de Raoul Servais à Pixar? Exactement. Ne perd-on pas à un peu de charme au passage? Ce qui existait il y a quarante ans existe encore: les courts métrages d'auteurs qui écrivent et réalisent seuls des réalisations très personnelles ; nous en proposons beaucoup dans notre programmation dédiée au genre. Et à côté de cela, il y a aussi les productions de Cartoon Network. Quarante ans, c'est se souvenir ou se projeter? Le but est de marquer la transition: une nouvelle équipe s'est mise en place, il y a eu le développement contraint et forcé du digital. C'est une manière de rendre hommage au passé, un coup de publicité aussi que cet anniversaire, et, en effet, une façon d'envoyer un message pour les quarante prochaines années. L'apparition de Netflix, c'est à la fois une bonne chose pour la production et un danger pour le festival, puisque les spectateurs ne sont plus obligés de se déplacer? Nous développons une programmation à ce point originale et différente de ce que l'on propose ailleurs, que notre public nous reste fidèle, et conscient que sur la plateforme d'Anima, il trouvera des contenus très liés à l'image de découvreur du festival, et invisibles ailleurs. La plateforme sera ouverte les dix jours du festival: la philosophie qui prévaut avec Anima perdure. Quant est-il des prochaines éditions hors covid espérons-le. Vous ne craigniez pas l'habitude du home cinéma? Bien sûr, nous sommes inquiets, notamment au niveau de l'évolution sanitaire et du fait de savoir si l'on pourra réorganiser des éditions du "monde d'avant". Et au-delà du Covid, il y a toujours un risque. Nous misons sur la qualité de la programmation afin d'attirer du public. Avec le Biff, vous êtes le festival de cinéma bruxellois le plus connu et le plus réputé... Nous avons été reconnus progressivement, notamment par l'Académie des Oscars, et sacré meilleur évènement européen. Nous proposons nos évènements dans les trois langues, ce qui permet d'atteindre un public francophone, néerlandophone et européen. Cette approche et la fidélité du public qui en découle se sont construites au fil des éditions. La sédentarisation du public ne met-elle pas en danger l'idée même de festival de cinéma? Il y a cela d'une part, et de l'autre, nous remarquons que chaque année le nombre de spectateurs ne fait qu'augmenter et que le côté convivial, partage et proximité avec les réalisateurs... l'expérience physique, les concerts, les animations, est de plus en plus apprécié par le public. Il est évident que le Covid va remettre en question les habitudes, mais, par ailleurs, lorsque la situation sera à nouveau normalisée, les spectateurs seront d'autant plus demandeurs et auront d'autant plus envie de revenir... Personnellement, vous préférez le stop and motion de Aardman ou Wes Anderson ou les mangas de Miyazaki? L'un ne va pas sans l'autre.J'opposerais plutôt le stop and motion et le dessin animé: les techniques sont nombres et diverses, mais je n'ai pas vraiment de préférences. La qualité du scénario, de l'image, du montage, de la musique..., je suis plutôt attentive au projet dans son ensemble qu'à la technique qui n'est qu'un des aspects. Quesl sont vos animateurs préférés? Tous les films Pixar me paraissent incroyables, quasi irréprochables: techniquement comme au niveau du scénario. Il en va de même pour les Myazaki. Des oeuvres qui font partie de l'histoire du cinéma tout court: Xavier Kawa-Topor-Philippe Moins: Stop motion, un autre cinéma d'animation (Capricci Editions).