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Intitulée S plendide Isolement, l'exposition du musée carolo se compose d'une sélection de clichés accumulés au fil des années par Bruno Vermeersch, gastroentérologue à l'AZ Alma d'Eeklo. Sa collection comporte plusieurs milliers d'images, dont environ 500 de la Nasa.Le Journal du médecin: Comment en vient-on, en tant que médecin, à collectionner ce type de photos ?Dr Vermeersch : Je m'intéresse à la photographie depuis toujours et je fais volontiers moi-même des expériences à mon niveau d'amateur. J'ai par exemple mis au point une nouvelle technique de fabrication de bromoil et, depuis 2010, j'expose aussi régulièrement mes oeuvres expérimentales. En parallèle, je me suis mis à collectionner des photos, d'abord sans thème spécifique, puis en me concentrant sur celles de la Nasa. Jusqu'à la fin du 20e siècle, on pouvait encore se les procurer assez facilement et à des prix abordables, de l'ordre de 300 à 800 dollars en moyenne. De nos jours, on débourse parfois jusqu'à 10.000 dollars pour une seule image ! Mon activité de collectionneur m'a aussi permis de nouer des contacts et de me familiariser avec l'histoire, la provenance, le type de papier... et c'est ainsi que j'ai appris peu à peu à distinguer les vraies photos vintage des tirages plus récents.Pourquoi des photos de la Nasa ?Elles m'interpellent à de nombreux égards. Au-delà de leur esthétique involontaire, ce sont des documents historiques qui témoignent d'un événement unique, elles présentent un intérêt scientifique et technique et elles appellent à la réflexion philosophique, sans compter qu'elles ont aussi quelque chose de mystérieux. En plus, les photos vintage - comprenez, les tirages réalisés peu après le négatif - commencent à se faire rares sur le marché. Au fil du temps, on apprend aussi à reconnaître les qualités techniques, le type de papier. Cela fait une vingtaine d'années que je collectionne ces photos aujourd'hui très recherchées. Personne ne sait combien il en existe encore.Comment avez-vous constitué votre collection ?Je fréquente des salons spécialisés et des expositions en Belgique et à l'étranger. Au final, il s'agit aussi d'un cercle assez limité où nous nous échangeons des expériences et des idées. Personnellement, je sillonne surtout l'Europe à la recherche de photos, mais la majorité des collectionneurs se trouvent évidemment de l'autre côté de l'Atlantique. J'ai notamment un contact au Canada qui m'avertit lorsqu'il trouve quelque chose, et c'est ainsi qu'on finit par développer un réseau.Combien de pièces compte votre collection ?Trop, pour tout vous dire. Au total, j'ai aujourd'hui plusieurs milliers de photos, dont environ 500 de la Nasa. Pour l'exposition à Charleroi, nous en avions d'abord sélectionné une centaine. Après avoir réfléchi toute une journée à l'accrochage, nous en avons finalement retenu 85.Comment vous êtes-vous retrouvé à exposer à Charleroi ?Il y a quelques années, j'ai fait par hasard la connaissance du directeur du musée de la photo lors d'une exposition à Bruges, et le courant est immédiatement passé. Lui aussi s'était passionné pour la première mission sur la lune étant enfant, et il s'est rapidement enthousiasmé à l'idée d'organiser une exposition sur ce thème. Il a été très impressionné par ma collection et nous avons planché sur la sélection ensemble, en nous efforçant de mettre avant tout en lumière l'aspect photographique. Il est aussi parvenu à me convaincre que l'exposition devait être celle d'un collectionneur et c'est donc ainsi qu'est présenté Splendide isolement... dont la conférence de presse s'est terminée sur la conclusion qu'un collectionneur est aussi un peu un fou.C'est la première fois que vous exposez votre collection ?En effet, puisque mes autres expositions étaient consacrées à mon travail personnel... mais je dois dire que j'y ai pris goût. Mettre sur pied tout un accrochage avec des photos qu'on a réunies, c'est un processus très créatif, une oeuvre d'art à part entière qui demande beaucoup de travail préalable. À présent qu'elle existe, ce serait sympa de pouvoir la présenter également dans d'autres musées, même si nous sommes évidemment dans la dynamique du 50e anniversaire. Les photos de l'exposition s'arrêtent aussi au 21 juillet 1969, le jour du premier pas sur la lune.Vos propres photos sont surtout expérimentales ?J'aime explorer les limites de la discipline - la composition, la manière dont elle se met en place, les variations possibles. Dans la chambre noire, on débute avec une page blanche. L'image est déjà là, mais invisible... et le tout sera de la faire émerger d'une manière la plus personnelle possible.