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La médecine étant un Art et non l'expression ultime de la physique quantique, on peut se demander ce qui caractérise un bon généraliste ou même le parfait généraliste. Ou, au contraire, l'excellence ne résiderait-elle pas dans la capacité au doute et au questionnement et donc aux faiblesses du métier ? Il faudrait alors, éventuellement, " se méfier de ceux qui s'affichent trop ostensiblement comme parfaits ".Cette réflexion adoubée par l'éditeur responsable, le Dr Lauwrence Cuvelier, arrive alors que les autorités qui agréent les médecins généralistes ont observé, apparemment émues, que " des généralistes exercent, de manière pourtant totalement marginale (2,5% de l'activité totale, NDLR), des pratiques non reconnues par les instances scientifiques ".Que faut-il en penser ? Si le MG pratique une médecine EBM dans un tiers environ de ces actes, pour le reste, il doit " se fier à des avis d'experts et à son expérience, tout en tenant compte des valeurs et des préférences du patient ". Or le MG, contrairement, peut-être au spécialiste, est dans l'incapacité d'exceller dans l'ensemble des champs médicaux, fait remarquer Le Grain à Moudre. " Le généraliste doit évoluer dans un principe d'incertitude, ce qui se conçoit parfaitement dans des domaines mathématiques de logiques floues. Pour conforter son comportement, l'outil principal à sa disposition reste la temporalité. En effet, tant sur le plan diagnostique que thérapeutique, il y a des situations cliniques qui se clarifient après un certain laps de temps. "Mais certaines situations échappent hélas à toute logique. Les maladies rares en sont un exemple frappant. " Le point de vue de certains spécialistes peut être déformé par la concentration de cas de ce type qu'ils rencontrent. Cela peut en amener certains à regarder la compétence des généralistes avec dédain (comment, vous ne connaissez pas la maladie de Moyamoya ? Elle entraîne des AVC chez de jeunes adultes, surtout d'origine asiatique...). Certains de nos jeunes confrères déchantent après quelques années, car la toute-puissance que les enseignants universitaires font miroiter est évidemment un leurre. Il est frappant, à cet égard, de voir combien des pathologies auxquelles sont consacrées quelques minutes de cours - grand maximum ! - dans un cursus de 6 ans deviennent tout à coup abondamment décrites si on leur trouve une solution (et plus spécialement encore si celle-ci est assortie d'un brevet pharmaceutique). "Des exemples ? " Il suffit d'observer la discrétion autour de la démence, des handicaps moteurs et mentaux, des soins aux toxicomanes... "A d'autres égards, le médecin généraliste a l'impression de subir un haro sur le baudet, comme l'âne des Animaux malades de la peste de Lafontaine, condamné à la place du lion pour avoir commis un crime bien véniel pourtant (tondre la pelouse de la largeur de sa langue).Le Grain à moudre prend l'exemple du dépistage du cancer du sein chez des femmes non à risque de moins de 50 ans et sans symptômes. Il continue en effet à être pratiqué largement dans notre pays. Or " il est avéré que cette pratique présente plus de risque (cancers radio-induits) que d'avantages. Pourtant, lorsque la ministre de la Santé a voulu prendre des mesures, une levée de boucliers de gynécologues et sénologues francophones l'a forcée à reculer. "Pour Le Grain à moudre, la pression exercée sur les généralistes serait d'autant plus terrible " qu'elle s'opère, d'abord et avant tout, par la confrontation à ses propres limites et à son expérience de l'échec. Mais elle découle aussi du harcèlement qu'exercent toutes les autorités qui prennent les MG comme cibles privilégiées. " Diantre !