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"O n veut avoir un regard sur demain, un regard plus positif, moins espiègle et davantage curieux. " C'est avec ce message enthousiaste que le Dr Thomas Orban, président de la SSMG, a lancé le symposium. Le généraliste, volontiers utilisateur des technologies mises à sa disposition, porte un regard positif sur le futur. " On ne doit pas se laisser distancer par l'évolution ultra-rapide de ce qui nous entoure en termes de technologies, de big data. Il ne faut pas avoir peur d'une dictature invisible du numérique. "L'évolution ultra-rapide a été mise en exergue par le Pr Koen Kas, professeur en oncologie moléculaire à l'Ugent et surtout conférencier international. Son message est clair : " demain, on ne paiera plus le médecin pour se soigner mais pour rester en bonne santé ". Comment ? Par une ingérence certaine de nouvelles technologies dans notre quotidien. " Amazon, avec Alexa et Google Home peuvent déjà améliorer la compliance du patient en rappelant de prendre tel médicament heure par exemple. " Pas très humain tout cela ? Qu'à cela ne tienne, on peut insérer sa propre voix afin de rendre le message plus humain grâce au logiciel Lyrebird par exemple.Et cette évolution ne concerne pas que les Gafa - Google, Amazon, Facebook et Apple - mais aussi les plus petites entreprises. La Food and Drugs Administration aux États-Unis reconnaît de plus en plus d'applications et autres utiles pour la santé.Il y a surtout ce que Koen Kas appelle les " anges-gardiens ", ces applications ou medical devices qui permettent au patient d'améliorer sa qualité de vie et de prévenir plutôt que guérir. Ce qui a un impact sur l'économie de la santé. " La technologie impacte les attitudes. Prenez la prévention du cancer du côlon. D'une intervention invasive on passe désormais à la prise d'une simple pilule ", illustre le visionnaire. " Chez les sportifs pour qui le risque d'infarctus est plus élevé, on peut implanter un mini-défibrillateur. "Des exploits rendus possibles par la démocratisation des analyses génomiques et les avancées en épigénétique. Par la santé connectée et le suivi des données grâce à des wearables (bracelet, montre, etc.) de plus en plus performants.Restent les questions inévitables que cela posera en termes d'éthique et de protection des données. Pour Koen Kas, le contrat est simple. " Le patient propose ses données et en échange, il est en bonne santé. C'est une question de confiance. " Comme l'on fait confiance à un inconnu lorsque l'on utilise les services proposés par Air BnB ou encore Uber.Si le futur se dessine peu à peu, le présent offre déjà de nombreuses possibilités aux praticiens. Notamment en médecine prédictive. Prévenir la fibrillation atriale grâce à son smartphone est désormais possible grâce à Fibricheck, une application belge de surcroît. Tout comme il est possible d'anticiper la naissance de prématurés grâce à Bloomlife, un medical device également belge.Plus proche encore des préoccupations du terrain, les Drs Guy Beuken et Thomas Orban ont présenté un panel d'applications utiles tantôt en consultation, tantôt en vacances ; tantôt à destination du médecin, tantôt à destination du patient. On citera, à titre d'exemple, Contr'appCeption, application réalisée par la SSMG et le Groupement des Gynécologues Obstétriciens de Langue Française de Belgique (GGOLFB) qui aide le médecin en consultation à prescrire à chaque femme la contraception la plus adéquate.Si l'informatisation faisait déjà peur à certains médecins, on a aujourd'hui déjà passé ce cap. Le généraliste de demain ne sera pas seulement informatisé, il sera également connecté, outillé technologiquement parlant.Pour les allergiques aux nouvelles technologies, quelques chiffres pourraient changer leur opinion. " Pas besoin d'intelligence artificielle pour remarquer que les coûts de prise en charge des personnes âgées vont exploser, du fait des baby boomers ", pointe d'abord le Dr Silviu Braga, le spécialiste nouvelles technologies et informatique de la SSMG. " Qui plus est, la croissance économique est molle. " Résultat des courses : des économies à tour de bras et une pression énorme sur le système des soins de santé.La technologie pourrait remédier à ce problème. " Pour garantir l'accessibilité aux soins, il n'y a d'autres moyens que d'augmenter la productivité. Le tout sans perte de qualité. " Mais cela nécessite un bouleversement organisationnel. " Aujourd'hui, un médecin consacre 40% de son temps de travail au traitement de l'information. Si l'on transpose ceci aux 40.000 médecins belges, cela représente 2 à 3 milliards d'euros par an de perte de productivité médicale. " Pour gagner en efficience et réduire le travail de traitement de l'information, la technologie peut aider, par exemple par le biais du DMI. " Le DMI doit évoluer vers une plateforme de gestion des processus basée sur les connaissances ", estime le Dr Braga. " Cette évolution organisationnelle permettra, suivant extrapolation d'une étude américaine, de sauver 6.000 vies par an en Belgique, d'économiser 250 millions d'euros pour l'Inami et de 8 millions d'heures pour les médecins. "