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Le Dr Tedros étant le seul candidat en lice à sa réélection comme directeur général, le suspens était faible avant même le vote à bulletins secrets le 27 mai lors du démarrage de l'AM... M. Tedros ne fait pourtant pas l'unanimité dans le monde, malgré un CV en béton: spécialiste du paludisme, diplômé en immunologie et docteur en santé communautaire et ministre de la Santé et chef de la diplomatie de son pays, l'Ethiopie. Enfant de la guerre, il a connu jeune les affres des bombardements, il estime que la paix est la condition sine qua non à une santé de qualité. Son premier mandat n'a pourtant pas été de tout repos. Qualifié "d'homme de Pékin" - la Chine ayant augmenté son influence dans l'organisation ces dernières années -, il n'a cessé de se défaire de cette réputation en réclamant notamment - sans succès pour le moment - des explications sur l'origine du Covid-19 même après la visite d'une "commission d'enquête" de l'OMS sur place. Le retard à l'allumage lors de l'explosion de la pandémie du Covid-19 lui sera reprochée à tel point que Donald Trump, président des États-Unis à l'époque, décidera de supprimer la participation des États-Unis. Un coup dur alors que l'obole d'organisations privées (Bill Gates notamment qui contribue pour environ 15% au budget, soit 863 millions de dollars essentiellement via la Fondation BiIl et Melinda Gates) est également sujette à caution car elle contribue à "privatiser" une institution vécue comme d'intérêt public international. Paradoxalement, le budget de l'OMS n'est pas immense (6,2 milliards de dollars par an soit un peu plus que le budget total des hôpitaux belges) et est constitué en majorité de ces contributions "volontaires" (3,7 milliards) par essence instables. Le Dr Tedros a promis de porter les contributions obligatoires notamment des 196 pays membres à 50% du total. L'assainissement des finances de l'OMS souvent considérée comme très mal gérée sera une des priorités des cinq années à venir. Sa deuxième partie de mandat se sera faite sous de meilleurs auspices, l'OMS devenant plus réactive et pour tout dire indispensable dans la lutte contre le coronavirus. Très apprécié par le nouveau président des États-Unis, Joe Biden, et aimé en Afrique, c'est paradoxalement de son pays d'origine, l'Éthiopie que le Dr Tedros est le plus fortement critiqué. Ce fut le cas notamment lors du scandale des violences et de l'esclavage sexuels du fait de membres de l'OMS en République démocratique du Congo. Comme le Pape Benoît 16 en son temps, Tedros Adhanom Ghebreyesus a été vu comme réagissant bien trop mollement à ce scandale. Le 25 mai, devant l'Assemblée mondiale, il a été plus clair: "Nous sommes déterminés et ce sujet est une préoccupation quotidienne de la direction. Je préside personnellement à une réunion hebdomadaire - le jeudi - rassemblant tous les services concernés. Nous sommes sur la même longueur d'onde: zéro tolérance, nous concentrer sur la prévention, le changement de culture et d'état d'esprit mais aussi nous concentrer sur les victimes et les mettre au coeur de nos préoccupations.""Après un premier mandat marqué par le Covid, qui a mis à nu les défaillances de l'OMS et du système sanitaire mondial, le Dr Tedros va devoir remporter le pari du renforcement de l'agence onusienne pour notamment mieux prévenir et gérer les futures épidémies", souligne l'AFP. Pour le reste, la 75e Assemblée annuelle de l'OMS a été le lieu d'un nombre astronomique de recommandations relatives aux maladies non transmissibles (MNT) telles que les cancers, le diabète, les maladies cardiaques et pulmonaires, ainsi qu'à la santé mentale et à leurs facteurs de risque. Cette décision précède la quatrième réunion de haut niveau de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la prévention et le contrôle des MNT qui se tiendra en 2025, dans le but d'accélérer les progrès vers les cibles mondiales convenues en matière de MNT. Pour la première fois, les délégués à l'Assemblée mondiale de la Santé ont également soutenu la création "d'objectifs mondiaux pour lutter contre le diabète". Les cibles font partie d'un nouvel ensemble complet de recommandations visant à renforcer et à surveiller les réponses nationales au diabète. "Il s'agit notamment de veiller à ce que d'ici 2030, 80% des personnes atteintes de diabète aient été diagnostiquées, que 80% aient un bon contrôle de la glycémie et 80% des personnes atteintes de diabète diagnostiqué aient un bon contrôle de leur tension artérielle. Il faut que 60% des personnes atteintes de diabète qui ont 40 ans ou plus reçoivent des statines et que 100% de toutes les personnes atteintes de diabète de type 1 aient accès à une autosurveillance abordable de l'insuline et de la glycémie. Le diabète est actuellement l'une des dix principales causes de décès dans le monde."Mais l'ambition qui suscite d'emblée des craintes dans les milieux souverainistes est la volonté supposée (fantasmée? ) de l'OMS de mettre en place une approche mondiale sans-frontière des pandémies qui leur fait penser à l'avènement d'un gouvernement sanitaire supra-national. Il fait reconnaître qu'en parallèle, la Commission européenne s'est arrogé lors de la pandémie Covid-19 une série de prérogatives sanitaires qui appartenaient aux états membres (alors que l'Union européenne se cantonnait jusqu'à présent aux autorisations de mise sur le marché des médicaments). En effet, les recommandations de l'OMS n'ont pas force de loi internationale (à l'exception de celle sur le tabac en 2003) et certains voudraient qu'elles le soient... Enfin, malgré un organigramme très bureaucratique, l'OMS souffre de sous-effectif: s'agissant de la lutte contre les pandémies l'organisation basée à Genève ne dispose que de 12 ETP contre 800 employés dans les seuls CDC américains... Une paille.