...

Dans la greffe autologue de cellules souches, on prélève les cellules souches hématopoïétiques du patient, avant que la moelle épinière touchée par le cancer ne soit détruite par la chimiothérapie. Le patient se voit ensuite réinjecter ces cellules, afin de reconstituer une nouvelle moelle. Le challenge est d'attirer les cellules souches hors de la moelle épinière et de les récolter ensuite dans le sang. Une entreprise délicate. Chez certains patients, la mobilisation est limitée, par exemple à cause de leur âge avancé, ou de la répétition des séances de chimiothérapies. Dans la pratique clinique, on utilise des substances pour favoriser "l'exfiltration" des cellules souches, comme le facteur de stimulation des colonies de granulocytes (G-CSF) et le plerixafor. Chez certains patients néanmoins, la technique mérite d'être améliorée. Le chercheur canadien Xin Gao et son équipe se sont intéressés de plus près aux nocicepteurs de la moelle épinière comme potentielle nouvelle piste thérapeutique. Ils supputaient en effet que le rôle de ces nocicepteurs ne se limite pas à la détection de la douleur dans la moelle épinière, mais aussi à l'hématopoïèse. Leur travail a permis de mettre en lumière des perturbations dans la mobilisation des cellules souches des animaux de laboratoire aux nocicepteurs inactivés, alors que leur réserve de cellules souches restait intacte. Chez ces animaux, l'effet mobilisateur du G-CSF semblait aussi fortement affaibli. Gao et al. ont pu inverser le phénomène grâce au peptide relié au gène calcitonine (PRGC), un neurotransmetteur typique des nocicepteurs. L'administration de PRGC a permis de renforcer le pouvoir mobilisateur du G-CSF, également chez les souris qui, à l'origine, réagissaient peu au G-CSF suite aux chimiothérapies successives. Le CGRP s'est révélé également directement actif sur les cellules souches, sans l'intermédiaire d'autres composantes de la moelle épinière. La nourriture épicée stimulant les nocicepteurs, les chercheurs ont concocté pour les souris un régime riche en capsaïcine, l'une des composantes du piment. Les valeurs de CGRP ont ainsi grimpé dans le liquide extracellulaire de la moelle épinière, de même que la mobilisation des cellules souches. Lorsque les nocicepteurs étaient inactivés, l'effet disparaissait. Il semble donc que le mécanisme soit effectivement médié par ces cellules. La question est de savoir si cette découverte trouvera des applications dans la pratique clinique. L'un des soucis est que la leucémie, par exemple, abîme les cellules nerveuses de la moelle épinière. Si le dommage est trop important, la stimulation des nocicepteurs peut s'avérer inefficace.