Portraits croisés

Au détour d'une visite, trois photos sépia sur le buffet du modeste appartement, égrenant trois saisons de la vie de cette patiente octogénaire. Comment se peut-il que la dernière image me paraisse la plus accomplie, si ce n'est par le récit d'une vie qu'elle reflète, enrichie d'innombrables rencontres, d'un supplément d'âme, d'une empreinte qui fait qu'en filigrane de cette physionomie parcourue par de multiples sillons ce sont cent autres visages, paysages, projets, affections qui s'interpénètrent. La lumière de midi, intense, écrasant les ombres, de la jeune mariée a laissé place à une luminosité rasante qui exalte les reliefs lorsque le soleil se couche.

La patine, cette usure noble

Le durable, c'est ce qui ne dure pas, mais qui se transmet et qui a une mémoire. Un visage ne vieillit pas, il se patine comme la mémoire du sac en cuir précieux que l'on répare encore et encore. Si certains objets paraissent éternels, c'est que leur usure raconte la vie de ceux à qui ils appartiennent, comment ils furent portés, à la main ou au coude, pour quels évènements leur carillon a sonné, pour quelles unions, pour quels deuils ils furent confectionnés. L'usure et les traces qui s'y sont imprimées sont un supplément d'âme, une histoire, une mémoire, une réalité. Vivre prend du temps et laisse des traces, le prix des journées qui ont compté. La patine du cuir nous apprend bien des choses sur nous-mêmes.

Au détour d'une visite, trois photos sépia sur le buffet du modeste appartement, égrenant trois saisons de la vie de cette patiente octogénaire. Comment se peut-il que la dernière image me paraisse la plus accomplie, si ce n'est par le récit d'une vie qu'elle reflète, enrichie d'innombrables rencontres, d'un supplément d'âme, d'une empreinte qui fait qu'en filigrane de cette physionomie parcourue par de multiples sillons ce sont cent autres visages, paysages, projets, affections qui s'interpénètrent. La lumière de midi, intense, écrasant les ombres, de la jeune mariée a laissé place à une luminosité rasante qui exalte les reliefs lorsque le soleil se couche.Le durable, c'est ce qui ne dure pas, mais qui se transmet et qui a une mémoire. Un visage ne vieillit pas, il se patine comme la mémoire du sac en cuir précieux que l'on répare encore et encore. Si certains objets paraissent éternels, c'est que leur usure raconte la vie de ceux à qui ils appartiennent, comment ils furent portés, à la main ou au coude, pour quels évènements leur carillon a sonné, pour quelles unions, pour quels deuils ils furent confectionnés. L'usure et les traces qui s'y sont imprimées sont un supplément d'âme, une histoire, une mémoire, une réalité. Vivre prend du temps et laisse des traces, le prix des journées qui ont compté. La patine du cuir nous apprend bien des choses sur nous-mêmes.