"Un Plan d'action pour améliorer la qualité des sumehrs[1] est en discussion au Comité de gestion de la plateforme ehealth", précise Thibaut Duvillier. "On le présentera à la médico-mut du 21 novembre 2022. On en a discuté avec des médecins généralistes. Dans le cadre de la crise Covid-19, pas mal d'urgentistes faisant face à des patients en réanimation, se sont plaints de la qualité des sumehrs (sans jeter la pierre aux MG): pas complets et pas fiables. On a répondu présents tout en sachant que ehealth et l'État ne peuvent avoir accès aux données elles-mêmes."

L'accès à la prime intégrée devrait être soumis à des critères qui n'évaluent pas seulement le nombre de sumehrs mais aussi la qualité de ceux-ci.

Actuellement, les critères d'octroi de la prime de pratique intégrée (environ 6.000 euros par an en fonction de l'usage qui en est fait) dépendent uniquement du nombre de sumehrs que les MG uploadent sur le Réseau santé wallon, le Réseau santé bruxellois ou Vitalink. Mais rien n'oblige à ce qu'ils soient de qualité...

Il faut rappeler que l'usage primaire du sumehr se situe aux urgences. Mais souvent, l'urgentiste n'a pas le temps de l'ouvrir. "On essaye donc de faire des projets pilotes avec les hôpitaux visant à ce que dès que le NISS (numéro d'identification de sécurité sociale) est introduit, encore dans la salle d'attente, l'infirmière et le médecin savent s'il existe un sumehr pour ce patient et y accèdent directement. Ce qui permet une meilleure prise en charge. Les logiciels ne sont en effet pas toujours adaptés. L'urgentiste n'a pas le temps d'effectuer x démarches pour vérifier l'existence ou non d'un sumehr. On pourrait envisager cette ouverture automatique via les DPI (dossiers patient informatisés) hospitaliers."

Thibaut Duvillier comprend les doléances de l'Absym à propos de l'élargissement de la matrice d'accès dans le cas d'un patient qui se rend chez un pharmacien occasionnel.

Conscientiser le patient à l'existence d'un sumehr

Par ailleurs, le patient doit être averti. Pour ceux qui acceptent d'utiliser la ebox citoyenne (la même que pour la déclaration fiscale ou les amendes de roulage, p.ex.), chaque fois que le MG crée ou actualise le sumehr d'un patient, le patient-citoyen recevra une notification dans sa ebox. Celle-ci ne contiendra pas le contenu médical mais un message le plus clair possible sur ce qu'est le sumehr, son utilité en termes de soins etc. "Le patient peut ainsi être informé de ce qu'est un sumehr et rendre plus vertueux le dialogue avec le généraliste. Le patient peut par exemple se rendre compte qu'aucune info ne figure sur son hypertension artérielle ou sur un médicament qu'il prend régulièrement. On incite ainsi à la discussion avec le MG."

En parallèle, le standard belgo-belge Kmehr (Kind Messages for Electronic Healthcare Record) associé au sumehr est progressivement abandonné au profit de différents "Care-Sets" en format international dits 'Fhir'. "En Wallonie et à Bruxelles il y a déjà ce type de sumehrs catégorisés (allergies, problèmes, traitements, volonté du patient, etc.) ; en Flandre, c'est un bloc monolithique. Le dentiste ou kiné flamand ne peut donc avoir accès qu'à tout ou rien. L'idée est au sein des "coffres-forts", d'évoluer vers des "care sets": ce qui permettra notamment une modularité des accès."

L'Absym a en effet montré les dents à propos de l'accès aux données médicales pour d'autres prestataires de soins (dentistes, kinés) et exprimé la volonté qu'ils ne puissent pas avoir accès à l'intégralité de ces données. À l'avenir, le podologue ou le diététicien pourrait avoir accès seulement à une partie du sumehr (un care set mais pas les autres).

Interdiction individuelle ou toute une profession?

Un patient pourra-t-il interdire l'accès à toute une profession? "Nous avons eu ce débat avec l'Absym et notamment le généraliste David Simon (lire jdM n°2731)... Mais le cabinet du ministre ne partage pas la même vision que l'Absym. La plateforme eHealth a proposé un élargissement de la matrice d'accès. Il faut toujours, bien sûr, le consentement du patient au partage de données et qu'il y ait une relation thérapeutique avec le prestataire. Le patient peut aussi exclure un ou plusieurs professionnels de la santé. La proposition d'exclure une catégorie entière de prestataires risquerait notamment selon le Cabinet de nuire à la qualité des soins par la suite et aussi à la multidisciplinarité. C'est contraire également à l'esprit de la loi Qualité."

L'idée est que le patient soit averti via sa ebox citoyenne de toute modification par le médecin de son DMI.

Le Cabinet ne voit pas non plus l'intérêt d'exclure toute une catégorie de prestataires alors que le patient n'a, en fait, pas une relation avec des milliers d'entre eux... "L'idée est de faire en sorte que le pharmacien qui aura accès au sumehr ou à une partie de celui-ci, c'est celui avec lequel le patient entretient des relations habituelles... Si le patient consulte plusieurs dentistes, par exemple, et qu'il ne veut pas partager ses données avec eux, en exclure deux ou trois, un par un, prend moins de quelques minutes."

En revanche, l'administrateur général adjoint d'eHealth comprend les doléances de l'Absym à propos de l'élargissement de la matrice d'accès dans le cas d'un patient qui se rend chez un pharmacien occasionnel. Des discussions sont en cours avec l'APB (Association pharmaceutique belge) et Ophaco (Office des pharmacies coopératives de Belgique). Il propose de faire une distinction entre pharmacien régulier et occasionnel. On peut jouer sur un accès plus restrictif et/ou une durée d'accès, via la relation thérapeutique, plus courte.

Financement hospitalier

eHealth travaille également avec le SPF Santé sur le financement hospitalier lié à l'informatisation, dit 'BMUC' (+/- 61 millions par an, en plus des 20 millions en 2022, 2023 et 2024 pour la cybersécurité, la data et l'innovation). Maggie De Block avait dégagé des budgets pour des primes aux hôpitaux qui s'informatisent plus rapidement. L'idée est de prévoir un incitant financier pour les hôpitaux pour le développement des DPI intégrés et qu'ils soient connectés aux autres plateformes: healthdata, MyCarenet... "On discute avec la fédération Agoria d'une formule la plus simple possible. Il faut être cohérent dans nos critères. Si les MG sont incités à créer des sumehrs de qualité, il faut convaincre les directeurs hospitaliers de l'ouverture automatique des sumehrs aux services d'urgences par exemple."

Un autre problème en voie de résolution est le blocage par certains hôpitaux (à Bruxelles notamment) de l'accès par les patients à leurs données. "Il a fallu expliquer aux hôpitaux qui hésitaient pourquoi avec les autres hôpitaux, où l'accès était garanti, cela fonctionnait sans problèmes. Que c'est important pour l'empowerment du patient, d'être acteur de sa santé en consultant ses données via le portail MaSanté. be. Tous les ministres en Conférence interministérielle Santé publique ont signé un protocole d'accord qui a été envoyé à tous les directeurs d'hôpitaux. En intercabinet, on a eu de nombreuses discussions pour que les règles d'accès soient les mêmes dans l'ensemble du pays parce que les délais d'accès varient actuellement entre Régions. Si les accès sont presque immédiats pour les documents de la 1ère ligne (sumehr etc.), le délai d'ouverture de l'accès au patient proposé sera, pour les documents des hôpitaux, entre 0 et 7 jours."

[1] Dossier santé résumé. Correspond à la photographie sanitaire du patient par le médecin traitant, en tant que gestionnaire du DMG.

La feuille de route ehealth en bref

Principes fondateurs: pluralité des acteurs, vue prospective, protocole d'accord en Conférence interministérielle Santé.

Ambitions des précédentes roadmaps:

- Créer, actualiser et consulter le sumehr à partir d'un DMI, incentives au DPI hospitalier intégré - 'BMUC' (financement hospitalier).

- Consolidation de l'échange et partage de données de santé entre prestataires (hub-metahub, eHealthbox,...). Implémenter la prescription électronique des médicaments (Recip-e).

- Refonte du portail patient fédéral MaSanté. be (Personal Health Viewer). Utilisation de My CareNet (assurabilité, eFact, eTarif, eDMG, ..) avec création de nouveaux flux (eAttest, Ch IV, etc.).

- Évaluation des applications mobiles (pyramide mHealth.belgium). Accès du patient à ses propres données (protocole d'accord).

- Autres projets: Healthdata.be (registres), Handicare (reconnaissance de handicap), incentives à l'usage et plus à l'achat d'un soft, intensification formations, etc.

Roadmap 2022-2024:

A. Poursuite de projets comme: Vidis ('Virtual Integrated Drug Information System', schéma de médication partagé), Mult-emediatt (informatisation certificat d'incapacité de travail). Prescriptions de renvoi: e-prescriptions autres que médicaments (actes de kiné, infis, bio, rx..).

? Evolution des sumehr vers des care sets - Patient Summary ("granularité").

? Interopérabilité technique et sémantique: structuration Fhir et codification Snomed CT.

? Refonte My Inami/portail "ProSanté" du prestataire (avec SPF santé). Empowerment du prestataire (information, formation, incentives, etc.).

? BelRAI (évaluation état dépendance/bien-être patients vulnérables et plan de soins). eBirth (déclaration électronique de naissance).

B. Mais aussi:

Télémédecine (téléexpertise, téléconsultation, télémonitoring, mobile devices/app, ..) ; paradigmashift (ouverture de la matrice accès - multidisciplinarité / loi Qualité) ; création de la Health Data Authority (" secondary use of data ") ; préparation du futur règlement " European Health Data Space ".

Parler d'une même langue

L'harmonisation de la terminologie médicale (Snomed-CT ou Systematized Nomenclature of Medicine Clinical Terms) progresse. "L'idée d'un standard commun demeure pour que les prestataires de soins parlent la même langue. Le projet Mult-emediatt dans le cadre de l'informatisation du certificat d'incapacité de travail a été lancé. Bientôt (uniquement dans le secteur public pour commencer), le MG enverra directement le certificat médical d'incapacité de son logiciel médical à l'employeur et la mutualité. Cela réduit la charge administrative pour les MG. On a déjà effectué un important travail de standardisation, simplification et harmonisation entre les différents certificats qui existaient en fonction du secteur (public, privé, villes et communes, police, Défense nationale, etc.). Le diagnostic, aujourd'hui indispensable pour le secteur public, sera fourni en ICPC-2 (International Classification of Primary Care, ndlr), ICD-10 ou utilisera la classification internationale Snomed. C'est un des tout premiers projets qui utilise enfin la terminologie médicale." Le secteur privé pourrait suivre si les réticences de la FEB sont levées...

"Un Plan d'action pour améliorer la qualité des sumehrs[1] est en discussion au Comité de gestion de la plateforme ehealth", précise Thibaut Duvillier. "On le présentera à la médico-mut du 21 novembre 2022. On en a discuté avec des médecins généralistes. Dans le cadre de la crise Covid-19, pas mal d'urgentistes faisant face à des patients en réanimation, se sont plaints de la qualité des sumehrs (sans jeter la pierre aux MG): pas complets et pas fiables. On a répondu présents tout en sachant que ehealth et l'État ne peuvent avoir accès aux données elles-mêmes."Actuellement, les critères d'octroi de la prime de pratique intégrée (environ 6.000 euros par an en fonction de l'usage qui en est fait) dépendent uniquement du nombre de sumehrs que les MG uploadent sur le Réseau santé wallon, le Réseau santé bruxellois ou Vitalink. Mais rien n'oblige à ce qu'ils soient de qualité... Il faut rappeler que l'usage primaire du sumehr se situe aux urgences. Mais souvent, l'urgentiste n'a pas le temps de l'ouvrir. "On essaye donc de faire des projets pilotes avec les hôpitaux visant à ce que dès que le NISS (numéro d'identification de sécurité sociale) est introduit, encore dans la salle d'attente, l'infirmière et le médecin savent s'il existe un sumehr pour ce patient et y accèdent directement. Ce qui permet une meilleure prise en charge. Les logiciels ne sont en effet pas toujours adaptés. L'urgentiste n'a pas le temps d'effectuer x démarches pour vérifier l'existence ou non d'un sumehr. On pourrait envisager cette ouverture automatique via les DPI (dossiers patient informatisés) hospitaliers."Par ailleurs, le patient doit être averti. Pour ceux qui acceptent d'utiliser la ebox citoyenne (la même que pour la déclaration fiscale ou les amendes de roulage, p.ex.), chaque fois que le MG crée ou actualise le sumehr d'un patient, le patient-citoyen recevra une notification dans sa ebox. Celle-ci ne contiendra pas le contenu médical mais un message le plus clair possible sur ce qu'est le sumehr, son utilité en termes de soins etc. "Le patient peut ainsi être informé de ce qu'est un sumehr et rendre plus vertueux le dialogue avec le généraliste. Le patient peut par exemple se rendre compte qu'aucune info ne figure sur son hypertension artérielle ou sur un médicament qu'il prend régulièrement. On incite ainsi à la discussion avec le MG."En parallèle, le standard belgo-belge Kmehr (Kind Messages for Electronic Healthcare Record) associé au sumehr est progressivement abandonné au profit de différents "Care-Sets" en format international dits 'Fhir'. "En Wallonie et à Bruxelles il y a déjà ce type de sumehrs catégorisés (allergies, problèmes, traitements, volonté du patient, etc.) ; en Flandre, c'est un bloc monolithique. Le dentiste ou kiné flamand ne peut donc avoir accès qu'à tout ou rien. L'idée est au sein des "coffres-forts", d'évoluer vers des "care sets": ce qui permettra notamment une modularité des accès."L'Absym a en effet montré les dents à propos de l'accès aux données médicales pour d'autres prestataires de soins (dentistes, kinés) et exprimé la volonté qu'ils ne puissent pas avoir accès à l'intégralité de ces données. À l'avenir, le podologue ou le diététicien pourrait avoir accès seulement à une partie du sumehr (un care set mais pas les autres). Un patient pourra-t-il interdire l'accès à toute une profession? "Nous avons eu ce débat avec l'Absym et notamment le généraliste David Simon (lire jdM n°2731)... Mais le cabinet du ministre ne partage pas la même vision que l'Absym. La plateforme eHealth a proposé un élargissement de la matrice d'accès. Il faut toujours, bien sûr, le consentement du patient au partage de données et qu'il y ait une relation thérapeutique avec le prestataire. Le patient peut aussi exclure un ou plusieurs professionnels de la santé. La proposition d'exclure une catégorie entière de prestataires risquerait notamment selon le Cabinet de nuire à la qualité des soins par la suite et aussi à la multidisciplinarité. C'est contraire également à l'esprit de la loi Qualité."Le Cabinet ne voit pas non plus l'intérêt d'exclure toute une catégorie de prestataires alors que le patient n'a, en fait, pas une relation avec des milliers d'entre eux... "L'idée est de faire en sorte que le pharmacien qui aura accès au sumehr ou à une partie de celui-ci, c'est celui avec lequel le patient entretient des relations habituelles... Si le patient consulte plusieurs dentistes, par exemple, et qu'il ne veut pas partager ses données avec eux, en exclure deux ou trois, un par un, prend moins de quelques minutes."En revanche, l'administrateur général adjoint d'eHealth comprend les doléances de l'Absym à propos de l'élargissement de la matrice d'accès dans le cas d'un patient qui se rend chez un pharmacien occasionnel. Des discussions sont en cours avec l'APB (Association pharmaceutique belge) et Ophaco (Office des pharmacies coopératives de Belgique). Il propose de faire une distinction entre pharmacien régulier et occasionnel. On peut jouer sur un accès plus restrictif et/ou une durée d'accès, via la relation thérapeutique, plus courte. eHealth travaille également avec le SPF Santé sur le financement hospitalier lié à l'informatisation, dit 'BMUC' (+/- 61 millions par an, en plus des 20 millions en 2022, 2023 et 2024 pour la cybersécurité, la data et l'innovation). Maggie De Block avait dégagé des budgets pour des primes aux hôpitaux qui s'informatisent plus rapidement. L'idée est de prévoir un incitant financier pour les hôpitaux pour le développement des DPI intégrés et qu'ils soient connectés aux autres plateformes: healthdata, MyCarenet... "On discute avec la fédération Agoria d'une formule la plus simple possible. Il faut être cohérent dans nos critères. Si les MG sont incités à créer des sumehrs de qualité, il faut convaincre les directeurs hospitaliers de l'ouverture automatique des sumehrs aux services d'urgences par exemple."Un autre problème en voie de résolution est le blocage par certains hôpitaux (à Bruxelles notamment) de l'accès par les patients à leurs données. "Il a fallu expliquer aux hôpitaux qui hésitaient pourquoi avec les autres hôpitaux, où l'accès était garanti, cela fonctionnait sans problèmes. Que c'est important pour l'empowerment du patient, d'être acteur de sa santé en consultant ses données via le portail MaSanté. be. Tous les ministres en Conférence interministérielle Santé publique ont signé un protocole d'accord qui a été envoyé à tous les directeurs d'hôpitaux. En intercabinet, on a eu de nombreuses discussions pour que les règles d'accès soient les mêmes dans l'ensemble du pays parce que les délais d'accès varient actuellement entre Régions. Si les accès sont presque immédiats pour les documents de la 1ère ligne (sumehr etc.), le délai d'ouverture de l'accès au patient proposé sera, pour les documents des hôpitaux, entre 0 et 7 jours."