Défendre la qualité sur le terrain suppose la prise de conscience de quelques vérités incontournables.

L'asymétrie des différents niveaux de pouvoirs.

La qualité relève à la fois d'éléments objectivables et de jugements subjectifs. A tous les niveaux, ces deux composantes interviennent avec de terribles asymétries entre les acteurs. L'asymétrie d'information entre malades et médecins a longtemps été le fer de lance des mutuelles. Mais il y en a bien d'autres. Par exemple, celle où le politique décide qui a droit à quel traitement onéreux et à quelles conditions. Ni le patient, ni ses médecins n'ont le moindre pouvoir de négociation. De telles démarches diagnostiques et thérapeutiques en situation d'incertitude scientifique et de tensions financières devrait être considérablement améliorée en imaginant un cadre de discussion entre décideurs de terrain, experts extérieurs et législateur. Les mutuelles, avec leur pacte d'avenir, l'ont parfaitement compris.

Le malade juge la qualité au résultat et au vécu de ses contacts avec les médecins et les soignants.

Des enchaînements de légitimités.

Chaque niveau de pouvoir dispose de facto d'une part de légitimité fonctionnelle. Cela commence dès le faible malade, avec des droits et aussi des devoirs. Dans nombre de cas chroniques, la qualité des relations entre malade, médecin généraliste, soignant, spécialiste clinicien, spécialiste pointu et parfois même médecin conseil détermine la qualité.

Les limites inhérentes aux différences de points de vue.

Le malade juge la qualité au résultat et au vécu de ses contacts avec les médecins et les soignants. Le médecin la juge à l'aune de son expérience clinique, de résultats objectivables à court terme et à long terme, pas toujours connus de lui. Pour de nombreux experts ès qualité, les uns et les autres seraient incapables de toute évaluation objective en raison de leur manque de recul et de leur position de juge et partie. Il s'agit d'un bel exemple de confusion entre la qualité concrète, appréciée d'un point de vue local et la qualité abstraite, forte de sa hauteur et d'un grand nombre de cas. L'opposition ridicule entre ces deux approches, également légitimes, occulte leur complémentarité.

Technologies de l'information et de la communication (TIC/ICT)

La mise en oeuvre d'outils permettant d'apprécier vraiment la qualité en termes de critères de jugement clairs et nets continue à se heurter aux prétextes classiques de la confidentialité, de la confiance et des conflits d'intérêts. Mais un autre obstacle est trop rarement mis en avant: le recueil de données fiables pour la qualité implique leur saisie immédiate au cours de la prestation. L'assurance maladie-invalidité impose le recueil de certaines informations pour obtenir le remboursement de médicaments ou de dispositifs médicaux. Maintenant que les malades eux-mêmes enregistrent des données, nul doute qu'ils seront sollicités pour en tirer des analyses. Enfin, aujourd'hui, en cas de chirurgie ou de procédure interventionnelle délicate, les guidelines préconisent de demander les résultats effectifs du centre pressenti, les inaccessibles outcomes ou real world data. Qu'on le veuille ou non, la qualité se vit et se fait localement même si elle se conçoit et s'analyse globalement. Baguettes magiques du dialogue entre le terrain des pratiques et les étages de l'organisation et du financement, l'explosion des TIC/ICT va sans nul doute bousculer les zones de confort de certains beaux parleurs de la qualité tout autant que les zones de confort des syndicats médicaux. Au premier d'entre eux capable d'inspirer des applications utiles aux patients et aux praticiens pour améliorer la qualité médicale dans les soins de santé. Tout ne doit pas venir d'en haut!

L'explosion des TIC va sans nul doute bousculer les zones de confort de certains beaux parleurs de la qualité tout autant que les zones de confort des syndicats médicaux.

La loi qualité entre en vigueur le 1er juillet 2022 : quoi de neuf Docteur ? (Lire JDM 21 avril 2022, p 20 et 21). La loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé reprend, mais pour un ensemble plus large de professionnels, des obligations connues de longue date par les médecins. Elle réaffirme la liberté diagnostique et thérapeutique, ce qui n'est pas rien. Du neuf : Le professionnel... tient à jour un portfolio ... démontrant qu'il dispose des compétences et de l'expérience nécessaires. Moins neuf : la caractérisation du patient en termes de données scientifiques pertinentes, la prise en compte de ses préférences et l'intégration de ses volontés dans le dossier. Ce texte traite des compétences professionnelles et de certains aspects de l'organisation et du contrôle tout en prévoyant les avancées de l'informatique. Sans plus. Dans l'épisode précédent (JDM N° 2711), je concluais : "Aucun groupe ne peut se passer de règles pour atteindre ses objectifs en termes de qualités techniques, humaines et financières." Suivait l'annonce de trois articles fondamentaux d'un pacte des praticiens : "... Nous allons réfléchir, entreprise d'une déconcertante naïveté, j'en conviens, à un cadre légal susceptible d'aider à mieux atteindre ces trois types de qualités." Ce cadre existe, me direz-vous, alors, à quoi bon ? Dans le chapitre 2 de la loi, Définitions et champ d'application, vous trouvez 11 définitions, allant de patient à ministre, mais aucune pour expliciter la qualité des soins. Prudence du législateur ?! Il sait que la lourde charpente de lois érigées dans les étages institutionnels doit encadrer et non écraser un socle de bâtons de savoirs et de pouvoirs subtilement assemblés par les praticiens pour ouvrir des espaces de liberté aux malades. Alors, cette loi, une perche tendue ?

Défendre la qualité sur le terrain suppose la prise de conscience de quelques vérités incontournables. L'asymétrie des différents niveaux de pouvoirs.La qualité relève à la fois d'éléments objectivables et de jugements subjectifs. A tous les niveaux, ces deux composantes interviennent avec de terribles asymétries entre les acteurs. L'asymétrie d'information entre malades et médecins a longtemps été le fer de lance des mutuelles. Mais il y en a bien d'autres. Par exemple, celle où le politique décide qui a droit à quel traitement onéreux et à quelles conditions. Ni le patient, ni ses médecins n'ont le moindre pouvoir de négociation. De telles démarches diagnostiques et thérapeutiques en situation d'incertitude scientifique et de tensions financières devrait être considérablement améliorée en imaginant un cadre de discussion entre décideurs de terrain, experts extérieurs et législateur. Les mutuelles, avec leur pacte d'avenir, l'ont parfaitement compris. Des enchaînements de légitimités.Chaque niveau de pouvoir dispose de facto d'une part de légitimité fonctionnelle. Cela commence dès le faible malade, avec des droits et aussi des devoirs. Dans nombre de cas chroniques, la qualité des relations entre malade, médecin généraliste, soignant, spécialiste clinicien, spécialiste pointu et parfois même médecin conseil détermine la qualité. Les limites inhérentes aux différences de points de vue.Le malade juge la qualité au résultat et au vécu de ses contacts avec les médecins et les soignants. Le médecin la juge à l'aune de son expérience clinique, de résultats objectivables à court terme et à long terme, pas toujours connus de lui. Pour de nombreux experts ès qualité, les uns et les autres seraient incapables de toute évaluation objective en raison de leur manque de recul et de leur position de juge et partie. Il s'agit d'un bel exemple de confusion entre la qualité concrète, appréciée d'un point de vue local et la qualité abstraite, forte de sa hauteur et d'un grand nombre de cas. L'opposition ridicule entre ces deux approches, également légitimes, occulte leur complémentarité. Technologies de l'information et de la communication (TIC/ICT)La mise en oeuvre d'outils permettant d'apprécier vraiment la qualité en termes de critères de jugement clairs et nets continue à se heurter aux prétextes classiques de la confidentialité, de la confiance et des conflits d'intérêts. Mais un autre obstacle est trop rarement mis en avant: le recueil de données fiables pour la qualité implique leur saisie immédiate au cours de la prestation. L'assurance maladie-invalidité impose le recueil de certaines informations pour obtenir le remboursement de médicaments ou de dispositifs médicaux. Maintenant que les malades eux-mêmes enregistrent des données, nul doute qu'ils seront sollicités pour en tirer des analyses. Enfin, aujourd'hui, en cas de chirurgie ou de procédure interventionnelle délicate, les guidelines préconisent de demander les résultats effectifs du centre pressenti, les inaccessibles outcomes ou real world data. Qu'on le veuille ou non, la qualité se vit et se fait localement même si elle se conçoit et s'analyse globalement. Baguettes magiques du dialogue entre le terrain des pratiques et les étages de l'organisation et du financement, l'explosion des TIC/ICT va sans nul doute bousculer les zones de confort de certains beaux parleurs de la qualité tout autant que les zones de confort des syndicats médicaux. Au premier d'entre eux capable d'inspirer des applications utiles aux patients et aux praticiens pour améliorer la qualité médicale dans les soins de santé. Tout ne doit pas venir d'en haut!