Ce fut l'un des premiers duo électro des années 80. Quarante ans plus tard, Andy McCluskey et Paul Humphreys continuent à triturer leurs machines autant que leur esprit. Leur nouvel album, "Bauhaus Staircase" (précédé du single éponyme) à paraitre le 27 octobre, qui est sans doute le plus politique, conserve la signature sonore distincte des deux Anglais amoureux de la Belgique (ils ont longtemps séjourné au Coq et enregistré à Bruxelles): un style unique qui évoque une sorte d'abstraction épurée et colorée... en effet de Bauhaus musical.

Le journal du Médecin: "Bauhaus Staircase" évoque par son titre l'album "Architecture and Morality". Etes-vous tous deux des passionnés de la période artistique des années 20?

Andy McCluskey: J'étais censé faire des études artistiques à l'université, mais j'ai pris une année sabbatique durant laquelle nous avons créé OMD et je n'y suis finalement jamais allé. Mais j'adore le Bauhaus et l'architecture des années 20. Je l'utilise comme métaphore de la beauté, du design, et du pouvoir de l'art contre l'adversité. En tant qu' administrateur du musée de Liverpool, j'ai assisté à la crise des subprimes. La première chose que font les politiciens dans cette situation, c'est de réduire les budgets destinés aux arts.

Bien entendu, il faut manger pour rester en bonne santé, mais il faut également nourrir son âme Et c'est là que l'art et la culture interviennent. Dans les moments difficiles, nous avons également besoin de beauté... et de challenge. Et c'est principalement le rôle des journalistes que de défier les politiciens, mais les artistes, les musiciens et les dramaturges peuvent également y contribuer. Et encourager les gens dans les moments difficiles à s'opposer aux foutaises et à la politique.

Cet album est d'ailleurs très politique, ce qui est plutôt rare vous concernant....

Paul Humphreys: Nous avons abordé la politque par le passé, notamment sur "Enola Gay", mais jamais de manière aussi insistante.

Andy: Même si je crois en la démocratie, avec le titre Kleptocracy, je souhaitais dénoncer certains politiciens. Dans le passé, la corruption consistait en des dessous de table, aujourd'hui tout se passe au-dessus (il rit). Des figurees comme Boris Johnson et Donald Trump sont manifestement malhonnêtes, le montrent et en font étalage. La démocratie rest le meilleur système politique, mais il est désormais plus difficile de l'amender car elle a été confisquée.

Vous avez su garder une sorte de son vintage tout en évoluant avec votre époque?

Paul: Sans nouveauté, ce serait un simple pastiche de nous-même. L'équilibre consiste donc à conserver notre signature, tout en proposant quelque chose de neuf et d'intéressant. Nous sommes conscients de posséder un son, d'évoluer constamment dans la même direction. Mais il est possible d'osciller légèrement. Bref, le résultat ressemble à OMD, mais dans sa version contemporaine.

Pensez-vous avoir influencé certains groupes ou duos comme Tears for Fears à l'époque?

Andy: Les Tears for Fears nous respectent énormément. Par ailleurs, Vince Clarke nous a confié que c'était dans un club de Basildon que lui et les autre membres fondateurs de Depeche Mode ont entendu notre single initial "Electricity" pour la première fois. Et qu'ils se sont dit "fuck les guitares, on va se mettre au synthé!"

Paul: Nous étions parmi les premiers duos électros de l'époque. Soudain, Tears for Fears, Yazoo, Pet Shop Boys, Soft Cell Blancmange, Erasure... ont déboulé et nous ont pris comme modèle.

Andy: Mais il s'agissait d'un modèle accidentel (il rit). Nous n'étions que deux parce que personne ne voulait jouer avec nous: ce fut donc Andy, Paul... et un magnétophone. Dans les années 80, nous avions l'habitude de plaisanter à ce sujet en affirmant que si Lennon et McCartney avaient disposé d'un magnétophone, Harrison et Starr n'auraient jamais fait partie des Beatles! (rires)

Je suppose que Kraftwerk et Tangerine Dream font partie de vos principales sources d'inspiration?

Andy: Absolument. L'autre groupe allemand que l'on ne mentionne jamais mentionné est Neu, également originaire de Düsseldorf . Inconsciemment, notre musique avait ce caractère mécanique et mélodique de Kraftwerk mais également la passion et d'énergie de Neu.

Paul: "Electricity" était une sorte de chanson d'amour dédiée à Kraftwerk.

Andy: Une version punk anglaise de Radioactivity! (rires)

Le fait d'être originaire de la péninsule de Wirral entre Liverpool et le Nord du Pays de Galles, a-t-il eu une incidence sur votre musique ?

Andy: Oui. Notre musique est schizophrène car nous vivions sur une péninsule qui l'était également: d'un côté, il y avait la Mersey, et Liverpool, intense, très industrielle et avant-gardiste. Et de l'autre le Dee et le Nord du Pays de Galles: rien que des moutons, des champs et des arbres. La péninsule de Wirral combine les deux. Nous possédons donc sans doute du côté pop gallois et industriel de Liverpool.

Sur "Evolution of Species", vous utilisez Google text-to-speek. Sur le prochain disque, vous utiliserez Chatgpt?

Andy: A nos débuts, les gens disaient : " Oh, vous utilisez des synthétiseurs qui écrivent les chansons?". Franchement, s'ils possédaient un bouton qui indiquait " hit single ", je passerais mon temps à appuyer dessus (rires). On parle maintenant d'algorithmes, d'IA, mais ce qu'ils produisent ressemble à des disques sans en être.

Paul: Car ils n'ont pas d'âme...

Architecture and Morality concernait Albert Schlemmer l'artiste membre du Bauhaus converti au nazisme.

Andy: Mais Bauhaus Staircase fait évidemment référence à un tableau d'Oscar Schlemmer ainsi qu'à ses costumes imaginés pour le ballet triadique. Il s'agit d'une métaphore du pouvoir de l'art et de la passion pour celui-cidans des époques difficiles.

Cela signifie que celui-ci aurait pu s'intituler "architecture and democracy"?

Paul: Peut-être. "Architecture And Morality" se voulait également une métaphore pour Orchestral Manoeuvres in the Dark. La machinerie, l'architecture, sans l'élément humain, sans la moralité, ne sont que des machines inertes. La juxtaposition des machines et l'humanité crée donc la tension qui résulte en cette sorte de mélancolie anxieuse.

Orchestral Manoeuvres In The Dark. Bauhaus Staircase (sortie le 27 octobre).

Ce fut l'un des premiers duo électro des années 80. Quarante ans plus tard, Andy McCluskey et Paul Humphreys continuent à triturer leurs machines autant que leur esprit. Leur nouvel album, "Bauhaus Staircase" (précédé du single éponyme) à paraitre le 27 octobre, qui est sans doute le plus politique, conserve la signature sonore distincte des deux Anglais amoureux de la Belgique (ils ont longtemps séjourné au Coq et enregistré à Bruxelles): un style unique qui évoque une sorte d'abstraction épurée et colorée... en effet de Bauhaus musical.Le journal du Médecin: "Bauhaus Staircase" évoque par son titre l'album "Architecture and Morality". Etes-vous tous deux des passionnés de la période artistique des années 20? Andy McCluskey: J'étais censé faire des études artistiques à l'université, mais j'ai pris une année sabbatique durant laquelle nous avons créé OMD et je n'y suis finalement jamais allé. Mais j'adore le Bauhaus et l'architecture des années 20. Je l'utilise comme métaphore de la beauté, du design, et du pouvoir de l'art contre l'adversité. En tant qu' administrateur du musée de Liverpool, j'ai assisté à la crise des subprimes. La première chose que font les politiciens dans cette situation, c'est de réduire les budgets destinés aux arts. Bien entendu, il faut manger pour rester en bonne santé, mais il faut également nourrir son âme Et c'est là que l'art et la culture interviennent. Dans les moments difficiles, nous avons également besoin de beauté... et de challenge. Et c'est principalement le rôle des journalistes que de défier les politiciens, mais les artistes, les musiciens et les dramaturges peuvent également y contribuer. Et encourager les gens dans les moments difficiles à s'opposer aux foutaises et à la politique. Cet album est d'ailleurs très politique, ce qui est plutôt rare vous concernant....Paul Humphreys: Nous avons abordé la politque par le passé, notamment sur "Enola Gay", mais jamais de manière aussi insistante. Andy: Même si je crois en la démocratie, avec le titre Kleptocracy, je souhaitais dénoncer certains politiciens. Dans le passé, la corruption consistait en des dessous de table, aujourd'hui tout se passe au-dessus (il rit). Des figurees comme Boris Johnson et Donald Trump sont manifestement malhonnêtes, le montrent et en font étalage. La démocratie rest le meilleur système politique, mais il est désormais plus difficile de l'amender car elle a été confisquée. Vous avez su garder une sorte de son vintage tout en évoluant avec votre époque?Paul: Sans nouveauté, ce serait un simple pastiche de nous-même. L'équilibre consiste donc à conserver notre signature, tout en proposant quelque chose de neuf et d'intéressant. Nous sommes conscients de posséder un son, d'évoluer constamment dans la même direction. Mais il est possible d'osciller légèrement. Bref, le résultat ressemble à OMD, mais dans sa version contemporaine.Pensez-vous avoir influencé certains groupes ou duos comme Tears for Fears à l'époque? Andy: Les Tears for Fears nous respectent énormément. Par ailleurs, Vince Clarke nous a confié que c'était dans un club de Basildon que lui et les autre membres fondateurs de Depeche Mode ont entendu notre single initial "Electricity" pour la première fois. Et qu'ils se sont dit "fuck les guitares, on va se mettre au synthé!"Paul: Nous étions parmi les premiers duos électros de l'époque. Soudain, Tears for Fears, Yazoo, Pet Shop Boys, Soft Cell Blancmange, Erasure... ont déboulé et nous ont pris comme modèle.Andy: Mais il s'agissait d'un modèle accidentel (il rit). Nous n'étions que deux parce que personne ne voulait jouer avec nous: ce fut donc Andy, Paul... et un magnétophone. Dans les années 80, nous avions l'habitude de plaisanter à ce sujet en affirmant que si Lennon et McCartney avaient disposé d'un magnétophone, Harrison et Starr n'auraient jamais fait partie des Beatles! (rires)Je suppose que Kraftwerk et Tangerine Dream font partie de vos principales sources d'inspiration? Andy: Absolument. L'autre groupe allemand que l'on ne mentionne jamais mentionné est Neu, également originaire de Düsseldorf . Inconsciemment, notre musique avait ce caractère mécanique et mélodique de Kraftwerk mais également la passion et d'énergie de Neu. Paul: "Electricity" était une sorte de chanson d'amour dédiée à Kraftwerk.Andy: Une version punk anglaise de Radioactivity! (rires)Le fait d'être originaire de la péninsule de Wirral entre Liverpool et le Nord du Pays de Galles, a-t-il eu une incidence sur votre musique ? Andy: Oui. Notre musique est schizophrène car nous vivions sur une péninsule qui l'était également: d'un côté, il y avait la Mersey, et Liverpool, intense, très industrielle et avant-gardiste. Et de l'autre le Dee et le Nord du Pays de Galles: rien que des moutons, des champs et des arbres. La péninsule de Wirral combine les deux. Nous possédons donc sans doute du côté pop gallois et industriel de Liverpool.Sur "Evolution of Species", vous utilisez Google text-to-speek. Sur le prochain disque, vous utiliserez Chatgpt?Andy: A nos débuts, les gens disaient : " Oh, vous utilisez des synthétiseurs qui écrivent les chansons?". Franchement, s'ils possédaient un bouton qui indiquait " hit single ", je passerais mon temps à appuyer dessus (rires). On parle maintenant d'algorithmes, d'IA, mais ce qu'ils produisent ressemble à des disques sans en être.Paul: Car ils n'ont pas d'âme...Architecture and Morality concernait Albert Schlemmer l'artiste membre du Bauhaus converti au nazisme. Andy: Mais Bauhaus Staircase fait évidemment référence à un tableau d'Oscar Schlemmer ainsi qu'à ses costumes imaginés pour le ballet triadique. Il s'agit d'une métaphore du pouvoir de l'art et de la passion pour celui-cidans des époques difficiles. Cela signifie que celui-ci aurait pu s'intituler "architecture and democracy"? Paul: Peut-être. "Architecture And Morality" se voulait également une métaphore pour Orchestral Manoeuvres in the Dark. La machinerie, l'architecture, sans l'élément humain, sans la moralité, ne sont que des machines inertes. La juxtaposition des machines et l'humanité crée donc la tension qui résulte en cette sorte de mélancolie anxieuse.