Propriétaire d'un tableau de l'artiste, le MuZee d'Ostende est le premier à présenter une rétrospective dédiée à cette artiste féminine qui fut membre du groupe des XX, depuis la seule exposition que lui consacra le musée de Mariemont en 2000. Différence de taille, elle intègre à ce nouvel hommage des tableaux de la propre collection d'Anna Boch, de Signac à Gauguin en passant par Ensor. Car cette fille des fameuses faïenceries Boch de La Louvière, se voyant interdire en tant que femme l'académie des Beaux-Arts, c'est donc au travers de cette collection de coeur que l'artiste a pu ainsi s'amender au contact de ces autres grands artistes.
Anna Boch, trop connue seulement pour avoir été la seule à acheter un tableau - la vigne rouge à Montmajour - à Van Gogh de son vivant (son frère dont le portrait par Vincent se trouve dans l'expo le connaissait), elle en achètera un autre après son décès, méritait bien plus de voir sa renommée uniquement attachée à cette anecdote.
L'exposition, au travers de lettres, photographies et bien sûr peintures, tire le portrait de celle qui devint la doyenne des peintres belges (deux portraits d'elles par Isidore Verheyden figurent dans la salle inaugurale). On voit son penchant pour l'impressionnisme naissant dès ses premiers tableaux, et très vite une scène de salon la voit confronter à "La musique russe" d'Ensor qu'elle avait acquise pour ensuite l'offrir au musée des Beaux-arts de Bruxelles : son tableau ne rend rien au maître ostendais.
Berthe Morisot belge
Anna Boch serait-elle la Berthe Morisot belge ? On pourrait le croire, à voir ce tableau de belle dame vêtue de blanc à ombrelle taquinant des fleurs intitulé " En juin " (photo), où le dessin de cette jeune fille dans un champ de fleurs.
Mais l'oeuvre d'Anna Boch est plus sociale, moins " un dimanche à la campagne dans une demeure bourgeoise ". Car même privilégiée, ses tableaux de paysages (l'un d'entre eux, nabi et impressionniste, montre à Veere des paysannes endimanchées), arborent d'humbles métayers ou ouvriers ; par l'entremise de Signac (elle découvre la Seine près de la Grande Jatte de Seurat qu'elle acquiert par l'entremise de ce dernier) et de van Rysselberghe, dont elle est une intime, elle s'essaie avec succès au tachisme pointillé.
Cette grande voyageuse rappelle dans la description de récifs bretons les bords méditerranéens de Monet. Mais il y a chez celle une touche belge : un impressionnisme réaliste teinté de luminisme, qui la rapproche des Peintres du silence. Car même si ces tableaux peuvent être sociaux, ils n'en sont pas moins paisibles, sans être mièvres comme les décrivait injustement la critique d'alors s'agissant d'une peintre femme. Une femme de goût qui fit aménager l'une de ses demeures, celle d'Ixelles, de meubles conçus par Victor Horta et imagine des dessins de céramiques réalisés chez... Boch bien entendu.
Une belle exposition rendant autant hommage au peintre qu'à cette belle personne, qui est également un voyage dans l'oeuvre d'une artiste de grand talent dont l'oeuvre fut guidée par... la lumière.
Anna Boch, un voyage impressionniste. Jusqu'au 5 novembre au Mu.zee d'Ostende.