La prévention de maladies infectieuses par vaccination est en perpétuelle évolution. Pour en savoir plus, nous avons rencontré le Dr Yves Van Laethem, spécialiste en vaccinologie et chef de clinique au service des maladies infectieuses du CHU Saint-Pierre à Bruxelles.
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Depuis la première inoculation de germes vivants de la vaccine par le médecin anglais Edward Jenner en 1796, les nombreuses vaccinations qui ont été élaborées et inoculées par la suite ont probablement réussi à éviter plus de maladies et à sauver plus de vies humaines que toutes les médecines curatives réunies.Actuellement, nous disposons d'une panoplie de vaccins contre un nombre considérable de maladies virales et bactériennes. La plupart d'entre eux s'adressent aux enfants et adolescents, mais également à certaines catégories d'adultes, principalement les seniors, malades chroniques et femmes enceintes, sans oublier les voyageurs en pays à risque.Ceinture de sécuritéDepuis la disparition de la variole et de son vaccin, en Belgique seul le vaccin contre la polio est obligatoire. Les autres vaccins habituels (voir le schéma ci-contre) sont hautement recommandés et pour la plupart remboursés, à l'exception du vaccin contre le rotavirus.Y a-t-il encore des poches de "résistance" aux vaccinations ? "Elles sont heureusement rares dans notre pays, mais il faut continuer à motiver les jeunes médecins à promouvoir les vaccinations. N'ayant plus l'occasion de voir certaines maladies infectieuses dans leur pratique, et encore moins leurs complications, ils auraient tendance à croire qu'elles ont disparu pour de bon ! Or, sans les vaccins, ces maladies reviendraient aussitôt. Dans les pays du tiers-monde par contre, le corps médical est entièrement convaincu de l'utilité des vaccinations, étant confronté quotidiennement aux effets délétères des maladies infectieuses", nous explique le Dr Van Laethem.À l'étranger, certains milieux conservateurs continuent à mettre en doute l'utilité des vaccins. C'est le cas de la nouvelle administration américaine, où les "vaccinosceptiques" accusent la vaccination de mille et un maux, le risque d'autisme étant le dernier argument invoqué par certains. Heureusement la population ne suit pas cette évolution rétrograde, puisque la grande majorité (82 % selon un sondage récent) soutient la vaccination pour les enfants. "De toute façon, les maladies évitées par la vaccination comportent 100 fois plus de risques que la vaccination elle-même. Je compare cela au port de la ceinture de sécurité : dans quelques rares cas elle tue, mais dans la grande majorité elle sauve la vie de l'accidenté", ajoute notre interlocuteur.NouveautésQuelles sont les nouveautés actuelles et à venir ? "En ce qui concerne la polio, on peut s'attendre à une éradication totale, pour autant que les conflits dans certains pays comme la Syrie, le Pakistan ou l'Afghanistan, où certains médecins vaccinateurs se font encore trucider, puissent trouver une solution pacifique."Actuellement on vaccine contre le méningocoque C, mais un vaccin contre le type B est en cours de commercialisation. Il est déjà disponible dans d'autres pays. En Belgique, un rappel chez les adolescents ne paraît pas opportun. En ce qui concerne le pneumocoque, il faudra suivre l'évolution épidémiologique."Pour le HPV, on peut se demander s'il faut ou non généraliser le vaccin 9-valent et s'il ne faut pas également vacciner les garçons, car ce sont eux qui transmettent le virus. En plus, il y a le risque de cancer de l'oropharynx par HPV, qui semble devenir plus fréquent. Mais le budget de la santé pourra-t-il supporter cette nouvelle charge ?", se demande le spécialiste.Les avantages prophylactiques pour les seniors et malades chroniques de la vaccination contre la grippe et les infections à pneumocoques sont évidents. "Pour la grippe, on espère toujours la venue d'un vaccin universel, de telle façon que l'on puisse protéger le patient par une seule injection pour plusieurs années, mais cela ne sera pas pour demain. Entretemps, on évolue vers la généralisation du vaccin quadrivalent. Il existe un vaccin contre le zona qui ne tardera pas à être commercialisé en Belgique. Pour les seniors en général, il est préférable de ne pas attendre le quatrième âge pour se faire vacciner, car la réponse immunitaire au vaccin diminue avec l'âge, tandis que le risque de maladies s'accroît", poursuit Yves Van Laethem.Les pédiatres quant à eux ont vu chuter le nombre d'hospitalisations depuis la vaccination (partiellement remboursée) contre le rotavirus, et attendent impatiemment un vaccin analogue contre le RSV.Qu'en est-il de la vaccination de la future maman et de son entourage immédiat ? "La vaccination des femmes enceintes contre la grippe et contre la coqueluche comporte un double avantage : la formation d'anticorps protège à la fois la maman et le bébé durant les premiers mois après la naissance. D'autre part, le vaccin anti-coqueluche est également recommandé aux parents proches. C'est ce qu'on appelle la stratégie cocooning. N'oublions pas que la coqueluche chez le bébé peut avoir des conséquences gravissimes."ImmigrationDernier point : le flux de réfugiés ne comporte-t-il pas aussi le risque d'importation de maladies infectieuses aujourd'hui rarissimes ou disparues dans notre pays, comme la polio, la rougeole ou la diphtérie ? "Actuellement le taux de vaccination contre la polio en Belgique est proche de 100 %. Parmi les enfants de réfugiés, il en est certes qui ne sont pas vaccinés ou qui pourraient être porteurs de germes. Il convient donc de les prendre en charge et de leur administrer un vaccin IPV-DTPa. Dans une population à large majorité vaccinée, les nonvaccinés en profitent aussi, mais chaque individu doit prendre ses responsabilités, pour sa propre santé, et pour celle des autres", conclut le Dr Van Laethem.Vacciner contre quelles maladies et à quel âge ?Le schéma de vaccination de base actuel est assez fourni, mais beaucoup de vaccins s'administrent simultanément en une seule injection. Ces vaccins protègent contre une dizaine de maladies infectieuses virales et bactériennes. Ils peuvent être administrés par des généralistes ou des spécialistes, et sont remboursés.8 semaines : IPV-DTPa-Hib-HBV et Pnc-1012 semaines : IPV-DTPa-Hib-HBV16 semaines : IPV-DTPa-Hib-HBV et Pnc-1012 mois : RRO et Pnc-1015 mois : IPV-DTPa-Hib-HBV et MenC6 ans : IPV-DTPa10 ans : RRO12 ans : HPV (2 doses à 6 mois d'intervalle)14 ans : dTpaÀ cela s'ajoute le vaccin contre le rotavirus, non remboursé.Notes :IPV : vaccin antipolio inactivé injectableD : vaccin anti-diphtérieT : vaccin antitétaniquePa : vaccin acellulaire contre la coquelucheHib : vaccin contre l'Haemophilus influenzae type bHBV : vaccin contre l'hépatite BHPV : vaccin contre le virus papillomateux humainRRO : vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillonsPnc : vaccin conjugué contre les pneumocoquesMenC : vaccin contre les méningocoques du groupe C