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Deux échelles de dépersonnalisation: individuelle et collective. La dépersonnalisation se rencontre dès le niveau individuel. Beaucoup de patients ne prêtent guère attention au nom de leur(s) médecin(s), et à l'hôpital, nombre de prestataires oublient de se présenter. Tout se passe comme si une culture de la dépersonnalisation s'installait, ô combien paradoxalement, car quand notre personne est touchée, nous sommes les premiers à nous plaindre. Mais la dépersonnalisation la plus puissante nous vient de forces collectives, culturelles, managériales, économiques ou politiques. À noter que ce sont toujours des personnes avec leurs caractères et leurs ego, passifs ou actifs, qui relaient ces forces! Tous, nous nous retrouvons étiquetés, soit par pathologies objets de standards, soit par spécialités reconnues selon des savoirs, soit par positions hiérarchiques censées exercer des pouvoirs. Indépendamment de la bonne foi de ceux qui les animent, ces forces ont la fâcheuse tendance à passer comme des bulldozers sur les parcours de soins. Mais heureusement, d'autres leviers comme l'esprit d'équipe ou des conceptions subtiles de l'autorité, peuvent renforcer le socle des pratiques et inspirer le meilleur aux prestataires, aux malades, à leurs familles... À tous les niveaux, tout reste donc une question d'équilibre entre contraintes et libertés. Combien de fois des prouesses techniques se voient réduites à néant par manque d'attention aux détails personnels, comme l'incompréhension de ce qu'il faut faire après le retour à domicile. Tant au niveau individuel que managérial, des initiatives peuvent apporter des solutions très simples: des médecins joignables directement ou par des secrétariats formés à déceler les appels prioritaires, des hotlines de services hospitaliers, des réseaux de collaboration spontanée entre généralistes, spécialistes, soignants... Que de terrain à occuper par les "extrahospitaliers"! Tout cela ne demande ni commissions, ni comptes-rendus de réunions interminables, ni des pages et des pages d'arrêtés royaux, de décrets ou de circulaires. Les orateurs ont insisté sur l'importance du contrepoids de forces collectives positives portées par un syndicalisme médical actif dans deux directions. Vers les praticiens de terrain pour leur faire prendre conscience des libres initiatives possibles en matière d'organisation des soins, et vers les politiques pour donner un coup d'arrêt à la dépersonnalisation de la médecine par lourdeurs bureaucratiques interposées. Mais sans le soutien d'un grand nombre de votants aux élections médicales imminentes, les organisations à la fois ouvertes et fermes comme l'Absym-BVAS auront les plus grandes peines à freiner les bulldozers de la dépersonnalisation.