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L'histoire ressemble à un conte de fées. En 2013 et 2015, cinq futurs ingénieurs de la TU Eindhoven remportent, en Australie, le World Solar Challenge avec une familiale électrique équipée de panneaux solaires. Ils accordent une attention toute particulière à l'efficacité énergétique. Ce n'est pas la vitesse qui détermine le résultat, mais bien les kilomètres parcourus avec une batterie pleinement chargée. Sur le chemin du retour, le chef de l'équipe Lex Hoefsloot a une révélation: si les panneaux solaires ont du sens sur le toit d'une maison, pourquoi n'en serait-il pas de même sur celui d'une voiture? Cette dernière peut ainsi se recharger en route ou à l'arrêt. Elle n'est pas dépendante du courant et dispose en principe d'une autonomie infinie. Il suffit qu'elle soit soumise à la lumière du jour. De retour à la maison, l'idée d'une mobilité propre partout et pour tous fait son chemin dans la tête de Hoefsloot et de ses compagnons. Ils se mettent en quête de soutiens et de partenaires financiers. Les constructeurs automobiles se montrent insensibles au projet et en 2016, ils décident donc de monter leur propre entreprise. En 2019, Lightyear présente un premier prototype et à peine trois ans plus tard, la Lightyear 0 voit le jour, produite par la firme finoise Uusikaupunki. La start-up a aujourd'hui réussi à collecter quelque 200 millions d'euros auprès des entreprises d'investissement et des particuliers. Elle compte aujourd'hui plus de 600 collaborateurs, de jeunes talents et de vieux loups de l'industrie automobile ou technologique. Ce qui pourrait sembler impensable pour une personne lambda, constitue l'évidence même pour le CEO Lex Hoefsloot. "Nous captons l'énergie solaire et la transformons en courant électrique, qui vient à son tour alimenter le moteur. L'un découle de l'autre. Un jour ensoleillé suffit à fournir à la Lightyear 0 plus d'énergie qu'elle n'en consomme. Un habitant du sud de l'Espagne, par exemple, doit se charger à la borne à peine deux à trois fois par an. En Belgique ou aux Pays-Bas, où le soleil se fait plus rare, il faut brancher la Lightyear O plus souvent. En fonction des conditions météorologiques ou de conduite, la Lightyear 0 dispose d'une autonomie effective de 390 à 820 km. En route ou à l'arrêt à l'extérieur, la lumière du soleil vient alimenter en permanence la réserve de courant."Comment fonctionne cette transformation de l'énergie solaire en courant électrique? Une question pour les ingénieurs. Le système fonctionne en tout cas, comme l'ont prouvé les 16 prototypes de la Lightyear 0 au gré des multiples crash-tests et autres essais sur route. Ces modèles de préproduction sont fabriqués aux Pays-Bas, mais le véhicule final sortira de l'usine de Valmet Automotive de Uusikaupunki, située à trois heures de route de la capitale finoise Helsinki. Valmet existe depuis 1968 ; elle assemble des séries limitées de Porsche et Mercedes. Elle produit également des batteries. Une Lightyear 0 coûtera 250.000 euros, mais les 150 premiers acheteurs se sont vus proposer le tarif préférentiel de 150.000 euros. Un prix élevé justifié par le fait que toutes les pièces de Lightyear sont développées en fonction de leur poids et de leur résistance à l'air, des panneaux solaires à double courbure aux moteurs électriques compactes intégrés aux quatre roues du véhicule, en passant par le remplacement des rétroviseurs extérieurs par de petites caméras. Chaque détail a son importance. C'est pourquoi la Lightyear 0 ne pèse "que" 1.575 kg. Son coefficient de résistance à l'air est de 0,175, ce qui en fait tout simplement la voiture la plus aérodynamique au monde. Ces deux aspects, légèreté du véhicule et résistance à l'air maîtrisée, permettent une consommation incroyablement basse: 8,3 kWh/100 km. Ou comment une batterie plus petite, avec moins de capacité, peut garantir une très belle autonomie. "En fonction du climat, les automobilistes peuvent rouler 11.000 km par an grâce à la puissance solaire. En Belgique et aux Pays-Bas, il est possible de parcourir 60% de la distance moyenne par an grâce à l'énergie solaire. La Lightyear 0 consommant deux à trois fois moins d'énergie par kilomètre qu'une autre voiture électrique, celle-ci puise en moyenne 80% d'énergie en moins du réseau électrique", explique Hoefsloot. "Notre objectif n'est pas de produire une énième version de la voiture électrique. Nous considérons l'énergie solaire comme une valeur ajoutée qui permet d'augmenter l'autonomie de la voiture électrique et de réduire sa dépendance au réseau. La conduite électrique en devient donc accessible à tous et partout. Qui plus est, elle permet de freiner le réchauffement climatique. Voilà le point de départ et l'objectif de notre quête. D'où notre déception que nos idées ne trouvent pas d'intérêt auprès des marques automobiles existantes. Nous voulions apporter notre contribution à la planète ; eux préfèrent vendre plus de véhicules."