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C'est ce qu'a déclaré Karine Moykens, administratrice générale de la Vlaams Agent-schap Zorg & Gezondheid (Agence flamande soins et santé), lors d'un symposium sur la 'Communautarisation des soins de santé en 2024' organisé par le Vlaams Artsenverbond. Les soins de santé sont en pleine mutation et les politiques doivent y répondre en offrant des soins sur mesure à partir d'une vision holistique, a déclaré la haute fonctionnaire. Mais pour réaliser ces soins et ce soutien intégraux et ciblés, il faut davantage de soins intégrés. Cela n'est pas possible aujourd'hui étant donné qu'après la sixième réforme de l'État, les compétences ont été réparties entre le gouvernement fédéral et les Communautés. Par exemple, l'organisation de la première ligne est flamande, tandis que le financement des médecins généralistes et des soins à domicile est fédéral. Un imbroglio similaire existe dans les secteurs hospitalier et de la santé mentale. "Cela complique les choses si l'on veut une politique performante", relevait Karine Moykens, qui soulignait aussi que la santé et le bien-être devraient se situer au même niveau de politique. "Les première et deuxième lignes, le préventif et le curatif, vont de pair. Ce n'est pas le cas aujourd'hui."Une réforme en profondeur du paysage des soins de santé, qui renverse la pyramide, est nécessaire. "Au lieu d'investir massivement dans les soins hyper- spécialisés, il faut consacrer plus d'argent à la prévention et aux soins de base", a indiqué la haute fonctionnaire. "Les bénéficiaires et les prestataires de soins déterminent ensemble les objectifs de soins et les soins sont organisés dans le cadre d'accords de collaboration multidisciplinaires. Dans ce contexte, l'homogénéité des compétences est un facteur décisif."Les structures ne sont qu'un moyen de parvenir à une bonne santé pour tous. "Une vision large et commune de la santé peut apporter une réponse aux problèmes posés par la répartition actuelle des compétences. En même temps, elle répondra aux besoins du système des soins de santé."Jürgen Vanpraet, du cabinet d'avocats Prator, en tant qu'expert constitutionnel en matière de réforme de l'État, a également souligné la répartition fragmentée actuelle des compétences. Cela complique la centralisation d'une politique performante car le temps, l'énergie et les ressources publiques se perdent dans la coordination entre le niveau fédéral et les entités fédérées. Une politique de santé orientée vers l'avenir suppose donc que les entités fédérées reçoivent d'abord la pleine compétence en la matière. L'homogénéisation au niveau des entités fédérées est préférable à la refédéralisation, estime Vanpraet. En effet, le Nord et le Sud ont des points de vue différents qui, par le passé, ont été à la base des transferts de compétences. La refédéralisation n'est ni souhaitable ni réalisable. En outre, elle présuppose qu'un modus vivendi entre néerlandophones et francophones (et entre Bruxellois et germanophones) soit à nouveau trouvé au niveau fédéral. Il a également examiné comment, d'un point de vue constitutionnel, l'homogénéisation des soins de santé au niveau des entités fédérées pourrait être concrétisée. Le Dr Karel Vermeyen, membre du conseil d'administration du VAV et ancien chef f.f. du service d'anesthésie à l'UZA, a expliqué les différences d'approche et de performance entre la Flandre, la Wallonie et Bruxelles. "Malgré des dépenses de santé considérables, nous n'obtenons globalement qu'un résultat moyen", a-t-il déclaré. À Bruxelles, on constate une forte concentration de lits d'hôpitaux et une utilisation moins efficace de ceux-ci. Et l'offre d'équipements lourds est plus importante en Wallonie qu'en Flandre. "Les mêmes réglementations ont donc donné lieu à des implémentations différentes. Il y a donc moyen d'obtenir des gains d'efficacité".Une analyse des statistiques de l'Inami révèle que les soins de santé en Belgique francophone sont davantage axés sur les hôpitaux, tandis que la Flandre investit principalement auprès des médecins généralistes, avec une première ligne et des soins à domicile mieux développés. Le Dr Vermeyen a fait référence à un rapport du KCE sur les performances des soins de santé, basé sur des indicateurs de 'performance du système de santé' (HSPA). HSPA est une méthode utilisée par l'OMS pour comparer les systèmes de santé de différents pays. Les HSPA montrent qu'il existe une marge d'amélioration en Wallonie et à Bruxelles, en particulier dans les domaines de la pertinence, de la sécurité et de la continuité des soins. Compte tenu des défis auxquels nous sommes confrontés, des différences de culture et de performance, et de la situation budgétaire précaire, il est logique d'évoluer vers un système de financement qui soutient la performance et la qualité. "La scission du financement des soins de santé offre donc des opportunités. Elle ne doit pas signifier une perte de solidarité, à condition qu'elle soit organisée de manière transparente et qu'elle soit définie dans le temps", a déclaré Karel Vermeyen. Le Pr émérite Jan De Maeseneer (faculté de Médecine, Département de médecine générale de l'Université de Gand) compte d'abord sur une perception transparente des impôts au niveau fédéral. "Les quatre entités fédérées reçoivent du fédéral des fonds pour organiser les soins, la santé et le bien-être", a-t-il déclaré. Des objectifs communs en matière de (soins de) santé sont nécessaires à tous les niveaux, mais la mise en oeuvre, l'organisation et l'utilisation des ressources sont du ressort des quatre entités fédérées. Sur la base de critères tels que 'l'échelle', 'l'efficacité', etc., un certain nombre de compétences fédérales telles que la gestion des épidémies et des catastrophes, la réglementation de la qualité de l'air, du bruit et du climat, la sécurité de la chaîne alimentaire, etc. sont maintenues. Le Pr De Maeseneer est favorable à un seul Institut national de santé publique unique, intégrant le KCE, les données Inami, l'AIM, les données du SPF, Sciensano, l'AFMPS et Ebpracticenet. Le fédéral maintient également le Belgian integrated health record (BIHR), un dossier interprofessionnel intégré par personne résidant en Belgique. Enfin, le Pr De Maeseneer a souligné l'importance croissante des administrations locales. Les zones de première ligne, soutenues par les réseaux hospitaliers et en coopération avec le secteur social, constituent le pivot de soins opérationnels. Elles bénéficient d'un soutien au niveau méso et les autorités locales y participent. Au niveau micro, il existe des réseaux interprofessionnels intégrés. Dans son discours de clôture, le président du VAV, le Dr Jan Van Meirhaeghe, a notamment fait référence à la Constitution. Celle-ci stipule depuis 1980 que la Communauté flamande et la Fédération Wallonie-Bruxelles sont en principe compétentes en matière de politique de santé, même s'il existe bien sûr de nombreuses exceptions. Il a rappelé la résolution numéro 4, approuvée à l'unanimité par le Parlement flamand le 3 mars 1999: 'à court terme', l'ensemble de la politique de santé sera transféré aux entités fédérées. Jan Van Meirhaeghe a conclu: "Un quart de siècle plus tard, cela n'a toujours pas été réalisé. Pourtant, le diagnostic et le remède sont clairs. Le VAV souhaite une scission chirurgicale et une solidarité concertée assortie de délais. Qu'on l'appelle confédéralisme ou autonomie, c'est de la sémantique. Mais nous devons tirer les ficelles nous-mêmes".