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Quelle est la place du médecin généraliste face à la privatisation des soins de santé qui est en marche, notamment au niveau de la commercialisation des données de santé? "Il y a une réflexion à avoir sur le rôle que va jouer cette privatisation des soins de santé. Le médecin généraliste, comme les autres professionnels de la santé, est confronté à cette question", répond d'emblée Jean Macq, professeur à la faculté de santé publique de l'UCLouvain. "Désirons-nous une santé moteur de l'économie ou une santé vecteur d'amélioration du bien-être de la population avant tout? Selon moi, le généraliste est davantage poussé à poser des actes sociétaux que les autres spécialistes qui réalisent plus d'actes techniques.""Le monde des données de santé est encore un monde sauvage", estime Jo De Cock, administrateur général honoraire de l'Inami. "Nous avons besoin des données pour améliorer la santé, mais il faut songer à la bonne gouvernance. Les choses bougent. La Health Data Authority va bientôt voir le jour en Belgique, ce qui est important. Nous avons une plateforme - eHealth - qui organise le flux des données, mais pas son usage. Ce sera le rôle de cette Health Data Authority. Ce que l'on doit avoir, c'est la transparence dans la gestion des données."30% de citoyens n'ont pas de généralistes, relève une étudiante. Comment atteindre ces 30% de patients restant? Faut-il passer par une inscription obligatoire, comme dans d'autres pays? "L'inscription obligatoire, s'il n'y a pas suffisamment de médecins, cela ne fonctionne pas", estime Jean Macq . "L'exemple du Québec est à ce titre édifiant. Ce type de stratégie coercitive n'as pas de sens. Il faut voir ce que le généraliste doit faire lui-même et ce qu'il peut mutualiser avec d'autres prestataires de première ligne pour essayer d'augmenter la couverture.""C'est un problème très bruxellois", affirme également le médecin théoricien. " L'enjeu est donc de former et avoir une couverture de médecins généralistes suffisante à Bruxelles pour pouvoir aller chercher ces 30% de patients restants."On connaît le discours des syndicats et autres associations professionnelles sur les difficultés d'impliquer les jeunes médecins dans la défense de leur profession. "Ce n'est pas un problème de motivation, mais un problème de cadre", soutient un jeune médecin. "Que pouvez-vous mettre en place pour faciliter l'implication des jeunes générations?""Les médecins qui participent le plus sont les médecins qui pratiquent en groupe et qui peuvent donc dégager du temps pour faire autre chose que de la clinique", observe le Pr Macq . "Cela me paraît capital qu'un médecin généraliste puisse dégager au moins une demi-journée par semaine pour faire autre chose que de la pratique. Cela a aussi un impact sur la qualité des soins.""Il faut trouver d'autres moyens d'impliquer les jeunes médecins dans les processus décisionnels. Mais il faut aussi inclure davantage de femmes, songer à l'équilibre des genres", renchérit Jo De Cock . "Le syndicalisme médical ne représente que 15% des médecins. Il faut bien sûr entendre ces syndicats, mais aussi les autres professionnels de soins. C'est un sujet d'actualité qui n'est pas propre à la médecine. L'implication, l'engagement s'affaiblit également en politique, dans les milieux associatif et culturel. La société a changé. Il faut travailler ensemble, co-créer et s'adapter, d'une manière ou d'une autre."Dernier sujet abordé: les charges administratives. Est-ce que des actions concrètes seront menées à court et moyen termes pour décharger le médecin de son fardeau? "Concrètement, on discute de l'assistant de pratique ou de l'infirmier assistant de pratique de première ligne", répond Paul De Munck, président du GBO . "Cela ne concerne pas uniquement la partie administrative. Il ne faut pas se décharger sur d'autres prestataires de soins des choses que nous n'avons plus envie de faire nous-mêmes. Ces tâches administratives doivent être remises à des profils administratifs. Mais si l'on veut se décharger d'un certain nombre de tâches pour préparer une consultation, je pense que l'on peut, en plus de l'Impulseo prévu pour l'assistance administrative, engager un assistant de pratique. Les discussions sont en cours. En Flandre, il existe une nouvelle formation des assistants de pratique qui ne sont pas des infirmiers. En Belgique francophone, la tendance est plutôt de proposer cette tâche à des infirmiers de première ligne s'ils sont demandeurs."