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"A u cours de ces deux dernières années marquées par la crise sanitaire, la souffrance liée à l'isolement social, le stress engendré par la charge de travail en distanciel et l'angoisse face à un avenir incertain ont été les symptômes les plus observés par les psychologues", explique en préambule Christie Morreale, ministre wallonne de la Santé. "Sur le plan clinique, ces faits se sont notamment traduits par d'importants troubles du sommeil et du comportement alimentaire mais aussi une augmentation de l'intensité des idéations suicidaires, des scarifications, des phobies scolaires..."La crise a également engendré une augmentation des faits de maltraitance, de situations familiales problématiques devenues critiques, de parents bousculés par la crise au niveau professionnel ou personnel... En résumé, de nombreuses personnes, toutes catégories d'âge confondues, ont fait et font parfois encore preuve d'un grand désarroi. Cela se vérifie dans les chiffres. La première enquête de santé Covid-19 de Sciensano, menée en mars 2020, avait déjà mis en exergue une prévalence très élevée des troubles anxieux (23%) et dépressifs (20%) au sein de la population adulte par rapport à celles obtenues en 2018 (respectivement 11% et 9,5%). L'étude de l'UCLouvain et de l'UAntwerp "Covid et moi", dans son rapport de janvier 2021, insiste quant à lui sur l'impact délétère sur la santé mentale des confinements successifs et de mesures sanitaires. Enfin, le Centre wallon de prévention du suicide et d'accompagnement "Un pass dans l'impasse" a enregistré une augmentation de consultations 22% entre 2020 et 2021 (lire jdM n°2702). Face à ces constats, la Wallonie, depuis juin 2020, a pris les devants en renforçant l'offre de soins en santé mentale et en encourageant les personnes à parler, trouver du soutien, se faire aider. Aujourd'hui, au regard des indicateurs toujours criants, les autorités lancent une nouvelle campagne de sensibilisation, intitulée "Partager, c'est se libérer". La campagne a été pensée pour toucher le grand public, des jeunes jusqu'aux seniors. Elle est portée par des objectifs étroitement liés: informer, sensibiliser et encourager la libération de la parole, entre autres auprès d'un professionnel de soins. On notera l'accent mis sur les hommes, trop peu enclin à admettre un problème de santé mentale. "Jusqu'au 15 mars prochain, une campagne multi-support aura lieu tant via les TEC que les réseaux sociaux ou les affichages traditionnels. L'objectif: libérer la parole", détaille Lara Koltar, porte-parole de l'Aviq. "Sensibiliser les personnes aux problèmes de santé mentale reste fondamental, encore davantage depuis la crise sanitaire que nous traversons", explique Christie Morreale, qui regrette que la Wallonie ait un taux de suicide plus élevé que les régions voisines. "Stress, lassitude, incertitudes, peurs...sont autant de facteurs favorisant l'apparition de symptômes anxieux et dépressifs. Les détecter, en parler, partager pour permettre une prise en charge adaptée est donc primordial. C'est le sens et la volonté de cette nouvelle campagne."Pour les professionnels de la santé, concrètement, il s'agit d'outils permettant de mieux orienter vers les services à disposition en matière de santé mentale en Wallonie. "Il y avait déjà un focus réalisé par l'Aviq depuis septembre 2020. Il s'agit ici d'un repartage d'informations", explique Lara Koltar . "Le site web (voir note de bas de page, ndlr) donne les mêmes conseils aux citoyens et aux professionnels de soins, mais la façon de rediriger les gens est différente.""Les Assises de la première ligne, qui auront lieu bientôt je l'espère, permettront de mieux coordonner à l'avenir les actions menées en santé mentale qui se révèlent assez éparses", ajoute Christie Morreale. Depuis avril 2020, la Wallonie a débloqué 13 millions d'euros pour engager 178 psychologiques et professionnels de la santé mentale supplémentaires. Un renforcement qui se poursuivra en 2022. Autre initiative à mettre en lumière en Wallonie: les sentinelles en prévention du suicide. "C'est une initiative qui a inspiré la Flandre, Bruxelles et la Belgique en général", avance la ministre wallonne. "C'est important d'avoir des professionnels de la santé aptes à s'occuper de problèmes de santé mentale, mais il est également important de pouvoir compter sur des citoyens attentifs à leur entourage, à même de détecter des situations de fragilité et éviter des catastrophes. Aujourd'hui, 945 personnes ont suivi la formation pour devenir sentinelles en prévention du suicide." On notera encore, au niveau des moyens débloqués en Wallonie en faveur de la santé mentale, qu'un nouveau centre pédopsychiatrique de revalidation fonctionnelle a vu le jour à La Louvière (CHU Tivoli) le 1er janvier dernier. Enfin, une trentaine de nouvelles places d'habitations protégée devraient être créées courant 2022.