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À moins de détenir un patrimoine vraiment considérable, il est aujourd'hui bien difficile de ne pas faire appel aux fonds de placement et sicav pour une partie au moins de ses placements. D'abord, pour les diversifier, bien entendu. Ensuite, et ceci est nouveau, pour obtenir un certain rendement. Les produits d'épargne simples et classiques ne rapportant plus rien, il faut à présent se tourner vers des obligations en devises, du private equity, c'est-à-dire des actions de sociétés pas (encore) cotées, des financements d'infrastructures, ou encore des constructions obligataires agrémentées de produits dérivés et autres swaps. Impossible pour le particulier. Même les investisseurs passionnés de Bourse, qui prennent plaisir à acheter et vendre eux-mêmes des actions individuelles, ont tendance à n'y consacrer qu'une partie de leurs avoirs, le solde étant placé dans des fonds. Incontournables, vraiment ! Et de plus en plus sophistiqués dans leur gestion... comme dans leurs commentaires. En voici le principal vocabulaire de base. Nombre de gestionnaires usent et abusent de la première lettre de l'alphabet grec, affirmant par exemple que le but de leur fonds est de " générer de l'alpha en faveur de l'investisseur ". La belle affirmation que voilà ! C'est en réalité une évidence. Dans le langage financier, alpha désigne tout simplement le supplément de rémunération obtenu par rapport à un indice de référence, par exemple celui de la Bourse dans son ensemble. Il est clair que tout le monde souhaite faire mieux que la moyenne... et que les autres. Concrètement, si un fonds affirme avoir réalisé un alpha de 2 % sur un an, c'est qu'il aura obtenu un return de 6 %, par exemple, alors que son indice de référence n'était en progrès que de 4 %. Pour juger de la performance, et de l'éventuel alpha dégagé, il faut évidemment un étalon de mesure. Un fonds affichera dès lors un indice de référence, souvent appelé benchmark, aussi vrai que l'anglais reste la langue de la finance. Un indice de référence peut être simple. Ainsi un fonds largement investi en actions européennes se comparera assez naturellement à l'indice Stoxx 600, qui reprend les 600 principales entreprises cotées du Vieux continent. Le benchmark peut également être double. Un fonds global ou patrimonial, investi tant en actions qu'en obligations, prendra ainsi pour référence à la fois un indice boursier et un indice obligataire, chacun composant cette référence pour moitié. Ce n'est évidemment pas parce qu'il est investi tant en actions qu'en obligations qu'un fonds se répartit à parité entre ces deux classes d'actifs : la proportion peut en principe varier assez largement (voir Flexible et fier de l'être), sans que l'indice de référence ne soit évidemment modifié à chaque fois ! Ce benchmark est dès lors un repère un peu général et non un étalon de valeur demeurant péremptoire jour après jour. Du reste, les indices de référence choisis par certains fonds prêtent parfois le flanc à la critique. S'il est plus défensif que l'univers du fond, il sera facile de le battre, du moins dans un marché bien orienté. En un mot comme en cent, il ne faut pas trop se braquer sur le fait qu'un fonds performe mieux - ou moins bien- que son indice de référence. Plus révélatrice est la comparaison des performances entre fonds ciblant un même univers. Le site www.morningstar.be, site belge du spécialiste mondial des fonds, est largement accessible à tous et fourmille de précieuses informations. C'est une évidence, et pourtant... La flexibilité est présentée comme une qualité importante sur la scène économique et même indispensable à la survie d'une entreprise. Cependant, les fonds de placement et sicav furent longtemps cantonnés à leur spécialité affichée. Ainsi le gestionnaire d'un fonds en actions financières ne pouvait-il les vendre pour passer à des valeurs technologiques par exemple, a fortiori à des obligations, quand bien même un krach allait de toute évidence survenir dans le secteur financier. Ce n'est qu'assez récemment que sont apparus les fonds flexibles, qui peuvent donc modifier leur portefeuille en fonction des circonstances. Un exemple concret, avec l'important fonds français Carmignac Patrimoine, fort populaire en Belgique au début des années 2000. Investi à la fois en actions et en obligations, son portefeuille présentait ces derniers mois environ 40 % des premières. Réagissant au krach provoqué par la crise du Covid-19, cette part était revenue à 9 % seulement au début avril. Une semaine plus tard à peine, misant sur le rebond boursier, la proportion avait fusé à 29 %. C'est ce qu'on appelle de la flexibilité ! Notons que pour ce fonds comme pour d'autres, des variations aussi considérables et rapides ne s'opèrent qu'en partie via des ventes et achats d'actions en direct. Elles sont pour l'essentiel réalisées, au moins dans un premier temps, au moyen de produits dérivés tels que futures (contrats à terme) et options. Difficile à expliquer en quelques lignes... Dans le langage financier, le terme short désigne une position à la baisse : " je suis short sur cette action " signifie que j'ai pris une position à la baisse, soit en direct, en la vendant sans la posséder (" vente à découvert "), soit au moyen de produits dérivés. Le terme long désigne au contraire une très classique position à la hausse. Un fonds se déclarant long-short signale donc à l'investisseur qu'il peut se positionner tant à la hausse qu'à la baisse. Autrement dit, qu'il peut aussi gagner de l'argent quand la Bourse chute. Il faut quand même savoir que de très nombreux fonds, globaux ou patrimoniaux en particulier, pratiquent le long-short sans en porter l'étiquette. Les fonds sont aujourd'hui assez nombreux à porter ce qualificatif fort explicite. Le patrimoine, dirait Monsieur Larousse, c'est l'ensemble de ce que l'on possède, de sa maison à ses actions et obligations, en passant par ses oeuvres d'art et collections. Sans aller jusque-là, le message des fonds patrimoniaux est donc clair : je couvre une large palette de placements. Cela signifie concrètement qu'un fonds patrimonial, aussi appelé global, se veut bien diversifié, investi tant en actions qu'en obligations (il est donc forcément mixte), voire aussi en immobilier et matières premières, du moins l'or. Par ailleurs, il n'est pas question pour un fonds patrimonial d'être spéculatif. Il doit au contraire offrir une certaine stabilité, par-delà la conjoncture économique et boursière. Ce côté défensif signifie une performance plus modeste quand la Bourse flambe, mais un repli plus mesuré aussi quand elle flanche. Le fonds patrimonial se profile dès lors un peu à la manière d'un banquier privé travaillant en gestion discrétionnaire : je fais pour le mieux, dormez sur vos deux oreilles. Rappelons quand même que, pour cette étiquette comme pour la plupart des autres, il n'existe pas de reconnaissance légale et encore moins de contrôle des autorités. Au risque de paraître prétentieux, de nombreux fonds se prétendent malins. Ils affirment plus précisément suivre une stratégie de smart beta, ou bêta malin. Qu'est-ce à dire ? C'est une grande tendance des dernières années : le fonds suit un indice, mais pas un indice " stupide ", celui reflétant un Bourse en général. Non : un indice " malin ", concocté par les gestionnaires ou l'institution financière. Il reprendra par exemple les entreprises les moins endettées ou encore les petites capitalisations ( small caps) ayant bien performé l'année précédente. Mêlant stratégie passive (suivi d'un indice) et active (l'indice est construit sur base d'analyses), l'approche smart bêta donne assez souvent de bons résultats.