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C'est une sorte de "Black Star" sans voix, mais pas sans émotion. Atteint d'un cancer de la gorge depuis 2014, en rémission pour un temps, Ryuichi Sakamoto, ancien leader du "Yellow Magic Orchestra", dont les collaborations au fil des décennies l'ont vu faire le grand écart entre David Sylvian et Iggy Pop, Bootsy Collins et Youssou'n'Dour, David Byrne ou Robert Wyatt, est même devenu acteur face à David Bowie dans "Merry Christmas Mr. Lawrence", voire dans "Le Dernier Empereur" de Bertolucci. Il a également signé des bandes originales, de "Talons aiguilles" à "The Revenant" entre autres, et semble ici composer la bande-son de sa propre fin, lui qui vient de décéder voici deux semaines. Une musique poignante, minimaliste, 12 morceaux émouvants, même sans titres: le troisième par exemple, dont les simples notes de piano évoquent une petite pluie fine observée derrière la fenêtre ou le goutte-à-goutte d'une perfusion. Par moments, on entend le pianiste respirer, difficilement, son cancer de la gorge renforçant peu à peu son emprise sur l'ensemble de son corps. Des mélodies que l'on croirait déjà composées dans les limbes - aériennes, flottantes - d'un musicien plus en rémission, qui s'en remet au destin avec raison, dans une oraison pourtant pas funèbre. Une musique sereine - d'un homme en paix avec lui-même -, apaisée donc, d'une beauté épurée qui évoque un Érik Satie qui aurait rangé au fond de son armoire normande sa gaîté, un "Quatuor pour la fin du temps" que Ryuichi interprète en solo puisqu'il s'agit de la fin... du sien.