Face aux propos très durs du ministre Vandenbroucke sur les problèmes d'accès financiers à la radiologie, l'Absym rappelle que des mesures ont déjà été prises pour l'amélioration de la prise en charge des patients précaires ou chroniques dans l'hôpital. Et la radiologie a amélioré le diagnostic précoce du cancer. Explications avec le Dr Olivier Ghekiere, sociétaire de la Société belge de radiologie, radiologue au Jessa Hospital de Hasselt et porte-parole de l'Absym sur les questions de radiologie.
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Le journal du Médecin: L'Absym a réagi aux déclarations de Frank Vandenbroucke qu'elle a qualifiées de brutales... Le ministre de la Santé publique estime qu'il n'y a pas suffisamment de radiologues conventionnés pour accueillir les patients financièrement précaires... Il exige au moins un radiologue conventionné par hôpital... Dr Olivier Ghekiere: En effet, il a dit une série de choses, d'ailleurs. Nous avons répliqué en expliquant qu'un nombre substantiel de patients sont déjà protégés: les patients qui ont le statut chronique par exemple sont déjà au tarif conventionné. Par ailleurs, un radiologue non-conventionné ne pratique pas automatiquement des suppléments. Frank Vandenbroucke a, à mon avis, mal compris. C'est pourquoi nous voudrions discuter avec lui l'idée d'ajouter, si possible, dans la loi, le fait de protéger les patients les plus vulnérables. Concernant l'accord médico-mut, vous êtes relativement fermes: la convention doit rester un choix de se conventionner ou pas, sinon le système global conventionné tombe à l'eau? Je ne sais pas très bien comment le ministre entend interdire de se déconventionner aux radiologues et pas aux autres spécialistes. Soit on accepte le système conventionné, soit on le refuse. Mais pour tout le monde. Être obligé de l'accepter, c'est contraire au principe du système conventionnel. Totalement. L'Absym a déclaré que certaines choses ont été déjà mises en place pour les patients moins aisés... Vous pouvez développer? Il existe dans certains hôpitaux déjà des plages pour travailler aux tarifs de la convention. De nombreux patients sont protégés comme les BIM. C'est près d'un tiers des patients. Certains arrondissements wallons le font déjà. Mais prévoir cela pour toute la population, ça ne va pas, je pense. Frank Vandenbroucke vous reproche également de surconsommer - 50% au-dessus de la moyenne européenne. Ce n'est pas exact? Nous accuser de faire des scans dans des buts lucratifs (ce sont ses mots dans la presse flamande), ça me choque un peu. Nous ne gérons pas l'examen clinique... On n'est pas des médecins cliniciens. Tout le monde sait bien que les radiologues ne peuvent pas refuser un examen. Ils n'ont aucun moyen juridique pour cela. On peut cependant substituer un examen: on propose par exemple une échographie à la place d'un scan. Il arrive d'ailleurs qu'on subisse des pressions si on refuse un examen. Vous dépendez du volume de demandes des cliniciens? Oui. C'est pour cela que depuis 2015, nous travaillons sur le problème. A la Société belge de radiologie, je m'en occupe depuis dix ans... Nous sommes conscients qu'il faut bien sûr contrôler le nombre de scans. Il y a cependant une augmentation de la population. Donc il y a une augmentation des examens. Avec le Covid, par contre, le nombre de consultations a diminué. On suit l'évolution. On a donc investi dans l'aide à la décision clinique. Cela a pris du temps. Il y a eu beaucoup de retard. On ne peut pas reprocher aux radiologues les retards purement informatiques. Nous suivons le rythme de l'Inami. Or nous souhaitons que ce soit implémenté rapidement. Cela permettra de contrôler le nombre d'examens, que ce soit les échos, les IRM, les scans. Il s'agit aussi d'offrir un soutien pour le prescripteur de l'examen. Dès le moment où il voit le malade, il décide s'il lui faut un examen ou pas. Nous aimerions dès lors que cette aide à la décision clinique soit implémentée via logiciels après une prescription électronique. Or il y a des retards énormes. Comment cela va-t-il fonctionner concrètement? Imaginons que le prescripteur demande par exemple un scan cérébral pour une céphalée. L'outil s'ouvrira immédiatement et proposera par exemple une IRM, en indiquant que c'est meilleur que le scan pour ce type de céphalées aiguës ou chroniques. C'est prévu pour quand? Fin 2023 devrait connaître les premiers tests. C'est notre espoir. Mais c'est sous condition. Vous insistez sur le fait que la radiologie fait oeuvre de prévention... Que vous évitez l'apparition ou le développement de cancers par exemple... Tout le monde sait que l'imagerie est importante pour l'effet diagnostique mais aussi thérapeutique. Et pour le pronostic... La mammographie est réputée de longue date pour prévenir le cancer du sein. Récemment, l'Union européenne a publié une directive pour faire des screening ct-scans chez les fumeurs ou ex-fumeurs. C'est une nouvelle recommandation européenne d'un scan thorax pour la prévention du cancer pulmonaire. Si on suit toutes ces recommandations, il y aura encore plus de scans! Vous souhaitez donc dialoguer avec Frank Vandenbroucke? C'est un espoir ou vous avez déjà un rendez-vous ferme? Nous sommes surpris de la "sortie" du ministre dans la presse... Car nous sommes informés du chemin parcouru au niveau de la réforme de la nomenclature (toujours en cours). Nous étions perplexes de lire ça dans la presse alors que cela ne reflète pas la vérité sur le terrain. Nous sommes conscients du problème, du fait que la population vieillit. Que nous devons contrôler le nombre de scans. Mais si on compare la Belgique aux autres pays d'Europe, il faut prendre des pays comme la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni. C'est-à-dire des pays de même niveau de couverture sociale, et pas nous comparer par rapport à l'Albanie et la Roumanie.