Ces derniers temps, le monde n'expérimente pas seulement de nouvelles manières de se nourrir pour rester en bonne santé, mais imagine aussi des schémas alimentaires qui permettent de protéger la terre à long terme. Deux objectifs urgents, par forcément inconciliables.
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"Si nous poursuivons sur la même lancée au niveau de nos habitudes alimentaires et des systèmes de préparation de la nourriture, nous ne pourrons pas atteindre des objectifs internationaux favorables au climat et à la biodiversité dans les décennies à venir, et ce même si l'impact d'autres secteurs venait à diminuer ou à disparaître", prédisent le chercheur britannique Michael Clark et ses collègues dans une publication parue ce été dans la Pnas. Les mêmes chercheurs rappellent aussi que l'incidence des troubles liés à l'alimentation (diabète, troubles cardio-vasculaires, certains cancers, etc.) augmentera si nous continuons à nous nourrir comme par le passé. L'étude montre que les consommateurs sont de plus en plus enclins à se nourrir d'une manière qui protège l'environnement. Toutefois, Clark et son équipe constate que les informations sur l'impact de nombreux aliments sur l'environnement restent insuffisantes. Des analyses précédentes sur les aliments contenant un seul ingrédient ont montré que l'alimentation la plus saine est aussi celle qui a le moins d'impact sur l'environnement, alors que la nourriture non saine met la planète sous pression. Un point de départ plutôt encourageant. Le problème, c'est que de nombreux aliments sont composés de plusieurs ingrédients. Les chercheurs voulaient savoir si ce lien avantageux lié aux aliments simples valait aussi pour les aliments composés. Les chercheurs ont donc déterminé la composition de plus de 57.000 produits alimentaires disponibles sur le marché britannique, à l'aide d'un algorithme basé sur des fragments d'informations, le problème étant en effet que la composition des aliments n'est souvent pas suffisamment mentionnée sur l'emballage. Dans une étape suivante, les chercheurs ont développé un score d'impact sur l'environnement, allant de zéro (aucun impact) à 100 (impact maximal). Ce score prend en compte, à même hauteur, quatre indicateurs environnementaux: l'émission de gaz à effet de serre, l'utilisation de la surface agricole, la consommation de l'eau et le potentiel d'eutrophisation (La prolifération de plantes sous l'eau due une pollution venue des terres). Dans leur analyse, les scores les plus bas concernaient les boissons sucrées ou qui contiennent essentiellement de l'eau. Un score bas (< 2) a également été attribué aux légumes, à certains pains ainsi qu'à des produits à base de graines et aux snacks (chips et autres popcorns). D'autres pains ont reçu un score supérieur (entre 2 et 5), ainsi que les desserts comme les tartes et les biscuits, les préparations à base de céréales, la pizza et une série de plats préparés. Encore un peu plus haut sur cette échelle (entre 5 et 10), on retrouve les noix, le sel, les tartinades salées ou sucrées, le fromage, le poisson, la viande de porc et la volaille. L'impact le plus important (score > 10) provient bien évidemment de la viande de boeuf et d'agneau. Qui plus est, les chercheurs ont pu montrer que les aliments qui ont un impact bas selon l'un des indicateurs environnementaux obtiennent souvent le même score dans les trois autres catégories. Quelques exceptions à noter: les crustacés pêchés en mer (et non élevés dans des parcs), qui engendrent certes une grande émission de gaz à effet de serre, mais dont la production ne demande pas d'usage de terres agricoles Comment savoir si des aliments ayant peu d'impact sur l'environnement sont aussi les plus sains? Pour y répondre, Clark et ses collègues ont utilisé le Nutri-Score. Bien que ce système comporte une série de biais, il reste la source d'information la plus riche pour évaluer la valeur nutritive des aliments. En effet, ils ont découvert que les aliments les plus sains sont également ceux qui ont le moins d'impact sur l'environnement. Bien que cette corrélation semble pertinente dans leur analyse, les chercheurs préfèrent parler d'une tendance, car les résultats fluctuent beaucoup en fonction de la chaîne de magasins analysée. Le tableau est encore plus clair quand les chercheurs ont classé les aliments dans les catégories suivantes: gagnant-gagnant (impact sur l'environnement et sur la santé sous la médiane), perdant-perdant (les deux paramètres sont sous la médiane), et les deux combinaisons de gagnant et de perdant. Du côté gagnant-gagnant, les lauréats sont: les fruits et les légumes, les céréales, certains pains et les substituts de viande (tofu et autres sauces végan). Dans la catégorie perdant-perdant, on retrouve le fromage, le chocolat, les tartes et quiches salées. Par gagnant-perdant, les auteurs entendent les aliments bons pour la santé et dont l'impact environnemental se situe au-dessus de la médiane: fruits de mer, noix, certains plats préparés à l'avance. La viande de boeuf et d'agneau se retrouve également dans cette catégorie, mais les auteurs rappellent tout de même que pour les personnes sous-alimentées, la viande peut être essentielle et les renforcer. Toutefois, globalement, l'étude indique un effet néfaste d'une trop grande consommation de viande sur la santé. Enfin, il reste la catégorie perdant-gagnant: un impact faible sur l'environnement, mais sans intérêt majeur pour la santé: les gâteaux, les boissons sucrées, les desserts glacés et les sauces.