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Michael Gebhart grandit en Allemagne. Sa mère, médecin très épanouie, l'incite à faire des études de médecine et lui transmet sa passion pour la musique. Sous son impulsion, il commence le violon à l'âge de huit ans. Chez les Gebhart, on ne fait rien à la légère: dès qu'on choisit une activité, il faut la faire à fond. Durant toute sa jeunesse, Michael Gebhart joue du violon au rythme soutenu d'au moins une heure par jour. Pas question de baisser les bras, même durant ses études. Son violon devient peu à peu son complice. Le numerus clausus instauré en Allemagne envoie le jeune étudiant en Belgique, alors qu'il ne connaît pas un mot de français. Pas facile de s'intégrer mais, heureusement, son talent de violoniste lui ouvre les portes. "Lorsque j'ai débarqué en Belgique, j'ai très vite été en contact avec un monsieur haut placé à l'ambassade d'Allemagne. Je jouais de la musique avec lui en amateur tous les dimanches. Cela me permettait de mangercorrectement une fois par semaine", raconte le Pr Gebhart avec humour. "Un jour, comme tout diplomate, mon ami musicien a été affecté ailleurs, en l'occurrence à Varsovie. Il était néanmoins hors de question d'arrêter de jouer. La musique me permettait de m'évader, de me ressourcer. C'était aussi mon refuge quand je me sentais seul. Il fallait que je retrouve quelqu'un avec qui partager cette passion".L'étudiant se met tout de suite à chercher quelqu'un avec qui jouer de la musique parmi les centaines, voire les milliers, de jeunes universitaires. Il tombe sur Martine Piccart, une jeune pianiste talentueuse, comme lui étudiante en médecine, dont il ne sait pas, alors, qu'elle deviendra son âme soeur. Sans cette passion commune, ils ne se seraient peut-être jamais rencontrés. Il n'en oublie pas pour autant ses études et se consacre à la chirurgie. Il s'intéresse à l'orthopédie, avant de se spécialiser dans le traitement des tumeurs osseuses, sans doute influencé par son étroite relation avec Martine Piccart. Martine Piccart est une pointure en oncologie. Son père était médecin généraliste avant de se spécialiser en gynécologie. Une personne très respectée dans sa commune de Molenbeek, et à qui Martine Piccart voue une énorme admiration. "Ma vocation de devenir médecin est née dès mon plus jeune âge", reconnaît-elle. "Quant à la musique, jepense que c'est mon grand-père, joueur d'accordéon averti, qui m'a menée consciemment ou inconsciemment vers elle. Il m'a poussée à fréquenter l'académie de musique. J'ai eu la chance de tomber sur un professeur de piano formidable, Marcelle Mercenier. C'était une femme renommée, qui jouait au Conservatoire de Liège. Une excellente pédagogue.J'ai donc commencé le piano à l'âge de huit ans et j'y ai tellement pris goût (grâce à ce fameux professeur) que j'ai même hésité, vers l'âge de 17 ans, à m'orienter vers une carrière de musicienne professionnelle.Mais finalement, la médecine l'a emporté.J'ai toujours été tentée par la cancérologie, même si j'ai eu une petite hésitation avec la pédiatrie. Ce qui me faisait très peur en pédiatrie, c'était de rater un diagnostic chez un tout petit bébé avec 40° de fièvre, incapable de s'exprimer. Donc finalement la cancérologie s'est imposée", confie l'oncologue-sénologue, directrice scientifique de l'Institut Jules Bordet. Très vite, les deux jeunes musiciens donnent ensemble des concerts pour différentes causes (myopathie, humanisation de l'Institut Bordet). Une grande complicité s'installe progressivement entre eux. Pas un coup de foudre, mais plutôt une douce mélodie qui les unit de plus en plus étroitement au fil du temps. Lors des premières années de son mariage, le jeune couple s'installe à New York avec ses deux enfants, de 14 mois et neuf jours. Dans l'appartement trône bien sûr un piano. En dépit des longues journées de travail et de leur rôle de jeunes parents, les deux médecins musiciens trouvent toujours un moment pour jouer de la musique ensemble. Leurs trois filles, bercées par la musique dès la naissance, sont animées de la même passion pour cet art. L'aînée se voit naturellement attribuer le violoncelle pour compléter le duo violon/piano de ses parents. La deuxième opte pour le violon. Le choix de la petite dernière se porte sur le chant. "Un matin, elle nous a dit: 'voilà, je sais ce que je veux! ' Nous nous attendions à ce qu'elle nous dise la médecine, mais non, c'est la musique et plus précisément le chant qui l'a conquise! Quelque peu surpris, nous étions néanmoins très admiratifs de sa détermination. Nous avons naturellement respecté son choix et l'avons soutenue tout au long de son parcours", explique Martine Piccart "Tout enfant devrait avoir la chance d'apprendre la musique. Bien sûr, tout le monde n'a pas l'oreille musicale, mais ce serait tellement dommage de passer à côté. De plus, les académies de musique en Belgique, fréquentées par d'excellents professeurs, sont accessibles à tous. Aujourd'hui, nous sommes heureux d'avoir donné l'opportunité à nos enfants de vivre pleinement leur passion et de la transmettre à leurs propres enfants."L'histoire familiale se poursuit donc au travers des enfants du couple. Leurs souhaits pour l'avenir? "Soutenir les projets des enfants et des petits-enfants, sans trop s'immiscer", confie le Pr Piccart. "J'aimerais plutôt vendre des glaces au marché de Bergerac", conclut pour sa part le Pr Gebhart.