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Au fil des siècles, le droit s'est développé au niveau international afin de régir les rapports entre États. Mais comme souvent dans le domaine de la justice au niveau des personnes, certains États et puissances sont plus égaux que d'autres où pour qui, selon les circonstances, ce droit international leur est bien... égal. Ce livre débute par le récit d'un détenu de Guantanamo (situé à Cuba et occupé illégalement par les USA depuis plus de dix ans), emprisonné sans procès depuis 20 ans, passé par les sites noirs, centres de détention secrets des États-Unis situés en Europe notamment, au mépris des règles du droit international: les champions de la démocratie libérale sont en effet loin d'être irréprochables sur ce plan. Et il se termine sur le contentieux qui oppose le petit État mauricien aux autorités britanniques, lesquelles louent depuis un siècle, après avoir forcé leurs habitants au départ, l'île de Diego Garcia, située dans l'archipel des Chagos dans l'océan Indien à l'armée étasunienne qui y a établi une base militaire devenue cruciale. Entre ces deux épisodes, cette bande dessinée conte par le détail la naissance à la Renaissance et la découverte de nouveaux territoires par les Européens et l'évolution du droit international au cours des siècles. Il ne faut pas trop de 250 pages pour expliquer les différentes phases et l'évolution de ce concept, décrit de façon à la fois ludique et précise, dans un style simili-réaliste au travers du dessin expressif de Gérard Bedoret et les textes lumineux rédigés par Olivier Corten et Pierre Klein, tous deux professeurs de Droit international à l'ULB. Où l'on voit que malgré son développement, le droit international sert souvent avant tout les intérêts des États (pourquoi peut-on éliminer Kadhafi et pas Bachar el-Assad? ), donc de prétexte, qu'il s'agisse d'États autoritaires ou de régimes démocratiques, permet de fustiger l'ennemi et de le voir condamner aujourd'hui par la Cour internationale de justice, alors que l'on refuse soi-même d'entériner ses décisions quand elles furent précédemment en défaveur de l'actuel accusateur... Certes, le nombre de règles et d'institutions n'a fait qu'augmenter, mais ce droit qui voudrait incarner une forme de justice universelle ne pèse pas très lourd lorsqu'il tente de s'appliquer aux grandes puissances, qu'elles soient démocratiques ou pas (le cas Assange en est un exemple puisque sa "séquestration" dans l'ambassade d'Équateur était tout à fait illégale au regard des dispositions du droit international).