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L'année 2022 fut exceptionnellement catastrophique: les obligations ont chuté presque autant que les actions. On considère en effet qu'un placement obligataire est défensif par nature. Cela signifie qu'il présente peu de risques de moins-value (parce que le capital est remboursé à l'échéance), mais aussi qu'il protège un portefeuille en cas de chute des actions. Or, ce ne fut absolument pas le cas l'an dernier. La vérité oblige toutefois à corriger: il n'est pas rare que les obligations affichent une performance négative. Au niveau mondial et exprimé en dollar, c'est arrivé pas moins de six fois depuis 2005, soit une année sur trois. Mais le bilan est généralement rosé, comme en 2021. En 2022 par contre, il fut rouge vif: -16,2%, a calculé l'agence d'informations financières Bloomberg. Un véritable krach! En dollar s'entend, la hausse sensible de la devise américaine ayant limité les dégâts à 10,6% en euro. Un niveau quand même catastrophique pour un placement obligataire. La cause de cette contre-performance historique est bien connue: la très forte et très rapide remontée des taux d'intérêt, surtout en Europe. Point besoin de savante démonstration mathématique: tout le monde comprend que quand une obligation rapporte 3%, comme c'est aujourd'hui le cas de celles émises par l'État belge, une émission plus ancienne n'offrant que 0,3% par exemple, comme c'était le cas voici à peine un an, a automatiquement perdu pas mal de sa valeur. Ceci étant, autant la chute des cours est une catastrophe pour les investisseurs d'hier, autant la hausse des rendements, qui en est la cause, ne serait-elle pas une aubaine pour ceux qui achètent aujourd'hui? De nombreux professionnels répondent par l'affirmative, comme on l'évoquait ici en octobre dernier, et aujourd'hui plus encore qu'à l'époque. Acheter des obligations, de préférence via un fonds, n'est cependant pas la seule manière de profiter de cette baisse des cours. D'autres valeurs de rendement ont en effet souffert davantage encore: les actions immobilières, tant les SIR (Sociétés immobilières réglementées) belges que leurs homologues étrangères. Les premières ont, l'an dernier, fléchi dans une mesure comparable à celle de la bourse belge en général, soit -11% environ. Ce n'est pas brillant, mais c'est beaucoup mieux que les valeurs immobilières européennes en général: l'indice Stoxx 600 immobilier a chuté de 37% en 2022, revenant à son niveau de 2012. Il faut savoir que le krach fut bien pire encore lors de la crise financière de 2008: entre février 2007 et mars 2009, cet indice s'était effondré de près de 80%! Un investisseur ne peut l'ignorer: si l'immobilier coté est attrayant, il est soumis aux aléas de la bourse bien plus qu'il ne reflète l'évolution du marché physique. Une gestion dynamique de ces valeurs fera dès lors une grosse différence de performance. Principale raison de la chute de 2022, la hausse des taux n'est pas seule en cause. Le secteur logistique, celui naguère qualifié d'entrepôts, fut ainsi confronté à un repli de l'e-commerce, après l'envol dû à la pandémie. Or, c'était le segment le plus dynamique ces dernières années, dès lors étiqueté "croissance" et donc valorisé très généreusement: pour la vedette WDP comme pour sa consoeur Montea, le cours de bourse était, voici un an, double de la valeur intrinsèque! De nombreuses autres SIR affichaient également une prime, mais pas du tout de 100%. Globalement, cette prime a aujourd'hui disparu, de sorte qu'on juge les SIR correctement évaluées. Voire même un peu sous-évaluées? Certains le pensent et mettent en avant un rendement plutôt sympathique. Sur base du dividende payé l'an dernier, qui devrait au moins être égalé cette année, le rendement net flirte en effet avec la barre des 4 ou 5% net pour plusieurs valeurs. Non pas les ténors de la logistique, avec 2,2% pour WDP et 3% pour Montea, mais bien pour Aedifica (4%, soins de santé) et Cofinimmo (4,9%, soins de santé à 60%). Fort secouée par la pandémie mais résistant finalement assez bien, les SIR axées sur les surfaces commerciales se situent même un cran plus haut: 5,1% de rendement net pour Retail Estates et pas moins de 5,7% pour Wereldhave Belgium. Cette filiale du groupe néerlandais éponyme détient quelques bureaux mais surtout des centres commerciaux, dont Belle-Île à Liège. Ces rendements sont bien entendu à vérifier ou corriger, en fonction de l'évolution du cours et des annonces relatives au dividende. Question de risque, on ne saurait évidemment mettre sur le même pied une action immobilière et une obligation d'un débiteur de qualité premium. Et comme il n'existe pas de fonds investi en SIR, c'est à l'investisseur de se diversifier. D'un autre côté, outre un rendement souvent (très) supérieur à celui des obligations, les SIR présentent un attrait non négligeable: les loyers étant assez largement indexés sur l'inflation, le dividende l'est aussi!