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Plus qu'une traversée, c'est un confinement de plus de 40 jours au désert que subit Olivier Bodart dans son roman de solitude visitée. Fin mars 2020, Désert du Sonora, Sud de la Californie, non loin de la frontière mexicaine. Un homme se terre, tente d'échapper au recensement décennal national en ses premiers temps de pandémie. Il attend sa compagne en pleine procédure de divorce dont le mari tente, pour raisons financières, d'annuler la demande de pension alimentaire, en démontrant que les amants vivent sous le même toi. D'où l'effacement temporaire et nécessaire au niveau administratif et social, au travers des réseaux, de cet artiste français installé aux États-Unis et qui attend l'issue de la procédure en même temps que sa compagne canadienne d'origine, plasticienne également, avec qui il compte ouvrir une école de photographie au milieu du désert, non loin de la vallée très trendy de Coachella et de son festival. Perdant en quelques heures et quelques jours à peine ses esprits, le narrateur va se trouver visiter par ceux du lieu, notamment celui du shaman du territoire indien où se situe le bâtiment, découvrir une communauté de marginaux cherchant à se faire oublier, un parc d'attractions fantôme qui vise à graver pour l'éternité l'histoire de l'humanité, avant de se passionner pour la vie d'un ancien policier qui chercha lui aussi à s'enfuir et s'enfouir, ceci alors que sa raison s'ensable et que sa personne semble peu à peu ensevelie par le désert environnant, que le soleil martèle inlassablement... Auteur et plasticien ayant vécu dans le désert du Sonora, Olivier Bodart, qui se met en scène dans son deuxième livre, signe un récit à la première personne, sans fioriture, au style fluide, intriguant, palpitant, inquiétant même, qui évoque par moments "Rosemary's Baby" et l'univers étrange de David Lynch. Un roman sur la solitude, l'identité, la déconnexion et les tourments du "grand esprit".