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À l'arrivée sur le site de l'école hôtelière de la province de Namur, situé dans le quartier de la Citadelle, on constate très vite le décalage entre le lieu et ses occupants temporaires. " Je ne savais même pas qu'il y avait un si grand espace au-dessus de Namur ", nous confie Jean, l'un des locataires temporaires des lieux qu'il a depuis quitté, sa période de confinement étant finie. Cet espace permet d'accueillir les sans-abri présentant des symptômes du coronavirus. Quand nous y allons, pour une nuit de 20 h à 8 h, il n'y a que deux pensionnaires : Jean et Gérard. Jean n'a pas le Covid-19, au contraire de Gérard. Ce dernier, arrivé par le biais du CHR de Namur, est cloîtré dans sa chambre marquée d'un COVID-19 en lettres capitales rouges, avec sa chaise percée, ses bouteilles d'eau qu'on lui amène chaque matin sur une table devant sa porte, complétées par un plateau repas, le matériel de paramètres et du matériel de soins si nécessaire. Cette table qu'on lui mène devant sa porte est nettoyée à l'ID212, comme les poignées de portes d'ailleurs. Les bénévoles, qui portent des masques chirurgicaux et des gants, ne peuvent pas s'en approcher, sauf urgence. Un protocole clair a été établi par Marina Van Espen, infirmière à la retraite qui assure la coordination de l'espace de confinement. " Il est nécessaire de réfléchir à l'ensemble des geste à poser avant d'entrer dans la chambre du patient contaminé ", explique le protocole. " Une seule sortie de chambre est prévue afin de vider la chaise percée. En dehors de cela, aucune autre sortie, que ce soit pour du matériel, de l'alimentation...ne peut avoir lieu. ". Si le patient a une urgence, il peut joindre l'infirmière retraitée. Joignable à toute heure de la journée et de la nuit, elle peut faire appel à un bénévole pour assister le patient si besoin. Il faut alors endosser un masque FFP2 (à conserver par lui suite), une combinaison, une charlotte, des sur-chaussures, deux paires de gants ainsi qu'une visière. Heureusement, le patient passe son temps à dormir, s'il ne tousse pas à s'arracher les poumons. Il est seul, mais un entretien de soutien est prévu à chaque visite. L'espace de confinement, s'il dispose aujourd'hui de rouages bien huilés, a débuté modestement le 26 mars. " Au départ, il n'y avait quasi pas de matériel ", assure Michel, bénévole avec qui nous passons la nuit. " Mais au fur et à mesure, des couvertures, des visières et d'autres matériels sont arrivés. Marina, l'infirmière, gère l'espace de telle manière à pouvoir faire face à un afflux massif, s'il le faut, dans les prochains jours. "Au départ, il n'y avait que Nicolas confiné. C'était un bavard, nous confie Michel. Il se réveillait souvent la nuit pour papoter ou fumer une cigarette. Il a fallu expliquer les règles, notamment que le lieu n'est pas un hébergement classique où l'on peut ramener ses connaissances. Les pensionnaires ne sont dirigés sur le site que sur avis médical, suivant une procédure établie. Boire, fumer ou consommer se fait d'ailleurs à l'extérieur. Pour certains malheureusement, c'est un mal nécessaire. Il a par exemple été rappelé aux bénévoles que le manque d'alcool peut tuer. Jean, lui, a été accueilli le 27 mars au sein de l'espace de confinement. Comme chaque arrivant, il a dû mettre des gants, un masque et des sur-chaussures. Parfois en se demandant pourquoi. " Du jour au lendemain, les gares se sont vidées ", nous explique Jean. " Nous, on ne sait même pas d'où vient cette chose. " Mais tous restent compliants. Ils souffrent de vomissement, de maux de ventre, de maux de dents. Parfois de fièvre. Mais rien d'alarmant. Leurs paramètres sont de toute manière surveillés fréquemment. Un médecin vient voir les patients de temps à autre. Et des gardes sont assurées par des infirmiers en journée. Un travail bénévole qui permet de prendre soin d'un public fragilisé, reconnaissant d'ailleurs de cette prise en charge solidaire. L'illustration : les deux boîtes de biscuits qu'a ramenés Nicolas pour remercier 'équipe d'infirmiers et de bénévoles lors de sa sortie de confinement.