...

Il n'est pas ici question d'obscures produits qui viseraient à donner à une septuagénaire l'allure d'une trentenaire. Cette science-là relève plutôt du mythe que de la réalité. Néanmoins, les scientifiques savent depuis longtemps que le système immunitaire s'affaiblit indiscutablement avec l'âge et, à ce niveau, il existe des pistes intéressantes. Parmi les différentes études qui portent sur le développement d'un vaccin contre le Covid-19, certaines s'intéressent spécifiquement aux effets sur le troisième âge, avec des résultats divers et variés. Plusieurs études montrent un effet similaire chez les jeunes et les séniors, d'autres pas. Les conclusions se basent actuellement sur des paramètres strictement biologiques. La question est de savoir ce que cela signifie en termes de protection contre le virus. Les statistiques pousseraient plutôt au pessimisme. Les personnes âgées réagissent jusqu'à présent systématiquement moins bien aux vaccins que les jeunes, car elles ont généralement un plus haut niveau d'inflammation. Cet état inflammatoire permanent mine vraisemblablement tous les aspects de la réponse immunitaire et s'accompagne, entre autres, d'un épuisement des lymphocyte T et B. Les chercheurs se sont mis en quête de moyens permettant de rajeunir le système immunitaire. Les molécules les plus prometteuses sont à ce titre les inhibiteurs de mTOR. La protéine mTOR est impliquée dans le développement cellulaire. Dans des conditions expérimentales, l'inhibition de mTOR augmente l'espérance de vie de différents animaux, de la mouche drosophile à la souris. Cela laisse supposer que les mTOR jouent un rôle dans les mécanismes de vieillissement. Dans une étude publiée en 2018, la chercheuse Joan Mannick a administré l'inhibiteur susmentionné à 254 séniors. Comparées au groupe placebo, les personnes traitées ont présenté moins d'infections ainsi qu'une meilleure réponse au vaccin de la grippe au cours de l'année suivante. Les résultats n'ont pas pu être confirmés dans une plus grande étude de phase 3, mais le nombre d'infections comptabilisées reposaient exclusivement sur l'auto-évaluation, contrairement à la première étude, basée sur le diagnostic du labo. Toutefois, les résultats indiquent bien une sensibilité moindre aux coronavirus. D'autres groupes de recherche ont eux aussi constaté le potentiel des inhibiteurs de mTOR. Une vieille connaissance nous revient en tête: la metformine. Elle aussi inhibe l'activité de la mTOR, mais de manière relativement indirecte. Des études suggèrent d'ores et déjà que les patients traités à l'aide de metformine sont moins souvent hospitalisés et meurent moins du Covid-19. Selon une petite étude rétrospective chinoise, la mortalité serait de 2,9% chez les patients ayant reçu la metformine, contre 12,3% chez les autres. Les chercheurs américains confirment cette mortalité moindre chez les femmes, mais pas chez les hommes. D'autres études sont ici aussi en cours pour tenter de confirmer la vertu protectrice de ce produit contre une évolution défavorable du Covid-19, et savoir s'il augmente la réponse au vaccin contre la grippe. La science s'interroge également sur la manière dont la metformine met en place cette action bénéfique. Comment la renforcer? La réponse n'est pas simple. La metformine est connue comme une molécule aux multiples sites cibles. Selon une hypothèse, celle-ci améliorerait le métabolisme des lymphocytes T, ce qui les rendrait plus vifs. L'inhibition de la voie de mTor ne constitue d'ailleurs pas la seule solution. La recherche sur le rajeunissement du système immunitaire s'intéresse aujourd'hui également au losmapimod, un médicament expérimental contre une maladie musculaire monogénétique rare (la dystrophie facio-scapulo-humérale). Le losmapimod module l'expression du gène déviant, tout en possédant des vertus anti-inflammatoires. Chez les personnes âgées, ce médicament fait chuter considérablement l'inflammation. Dans cette tranche d'âge, les chercheurs ont pu démontrer que ce produit améliorait fortement la réponse immunitaire au virus de la varicelle en injection sous-cutanée. Une étude de phase 3 est actuellement en cours pour vérifier si le losmapimod peut faire reculer l'insuffisance respiratoire et la mortalité chez les personnes atteintes du Covid-19. Et puis, il y a les sénolytiques, qui stimulent la clairance des cellules dysfonctionnelles dans le corps. Normalement, ces cellules sont éliminées par le système immunitaire, mais avec l'âge, cette action s'éteint progressivement, ce qui contribue à l'inflammation. Nous n'avons malheureusement encore aucun produit cliniquement disponible pour rajeunir le système immunitaire. Les scientifiques sont toutefois bien décidés à y remédier. En cas d'échec, il serait également possible de développer des vaccins spécialement pour les personnes âgées, avec des doses supérieures d'antigènes et d'autres adjuvants. Ce type de vaccin existe déjà aux USA contre la grippe. Mais si nous parvenions à renforcer non pas les vaccins, mais le système immunitaire, cela pourrait s'appliquer à tout type de vaccination chez les personnes âgées.