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Q uant aux droits du patient, loi du 22 août 2002En son article 5, la loi rappelle le principe général : " Le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à des prestations de qualité répondant à ses besoins et ce, dans le respect de sa dignité humaine et de son autonomie et sans qu'une distinction d'aucune sorte ne soit faite " . Sans aucune discrimination en ce compris d'âge. La chose est importante à souligner. Un droit fondamental est celui de l'information, une information claire pour que le patient voire ses proches puissent comprendre son état de santé et son évolution afin de pouvoir exercer son pouvoir de décision. Décision de consentir ou de refuser un traitement. La loi a prévu que le refus de consentement peut être exprimé de manière anticipée : ceci se traduit par les déclarations anticipées de refus de traitement. L'ADMD propose à ses membres un canevas pour mettre par écrit leurs refus de traitements et leur conseille de le compléter avec l'aide d'un professionnel de la santé, par exemple leur médecin de famille. Et la lutte contre l'" acharnement thérapeutique " ? Souvenons-nous, nous avons condamné l'acharnement thérapeutique. Je lui préfère la formulation française de l'obstination déraisonnable. Un des piliers éthiques de la justification d'un acte médical est précisément le but thérapeutique, les trois autres étant le consentement du patient, la balance à faire entre risques et résultat et le respect des règles de l'art. Faut-il rappeler que la médecine reste un art, qu'elle n'est pas toute-puissante et que l'on peut se trouver devant des impasses médicales ? Et faut-il le rappeler, nous sommes mortels, fort heureusement. Le traitement médical relève de la décision médicale. En tant que patient, nous pouvons le refuser mais nous ne pouvons l'exiger. Et pourtant des services de soins intensifs ont reçu des pressions, des menaces de procès. Cédant à cette pression, un service de soins intensifs a placé sous respirateur un homme de 91 ans avec comorbidité. Le patient est décédé dans les heures qui ont suivi. À la demande de ses proches, un acte d'obstination déraisonnable a donc été commis ! Quant aux soins palliatifs, loi du 14 juin 2002Ne pas commencer ou interrompre un traitement ne veut pas dire arrêter les soins. Pour ces patients atteints de cette maladie, la Covid, qu'aucun traitement médical raisonnable ne peut guérir, les traitements des symptômes étant inopérants voire disproportionnés (par exemple la mise sous respirateur), les soins palliatifs doivent prendre le relais. Et si possible dans leur environnement, leur domicile, leur maison de repos. Un transfert à l'hôpital peut, dans ces cas-là, engendrer des souffrances supplémentaires inutiles. La chose est parfois difficile à entendre pour des membres de la famille qui espèrent que tout soit tenté pour sauver leur mère, leur père. Et l'euthanasie, loi du 28 mai 2002La crise du Coronavirus a pour conséquence de mettre quelque peu entre parenthèses l'euthanasie. Comment en effet pouvoir respecter la procédure en cette période de confinement ? L'accès aux MR/MRS non seulement aux familles mais aussi aux médecins généralistes qui suivent leurs patients a été interdit en début de crise. La médecine en dehors de la lutte contre la Covid a été mise en sommeil. Comment procéder aux divers entretiens, à la consultation obligatoire d'au moins un autre médecin indépendant, à l'entretien avec l'équipe médicale voire avec les proches désignés par le patient ? Comment poser l'acte ? Et pourtant, il y a eu certainement des demandes d'euthanasie de la part de patients atteints de la Covid... Des demandes introduites avant les mesures de confinement pu être honorées pour les patients en souffrance physique. Mais sans que l'on puisse nécessairement entourer ces euthanasies de la présence humaine. Cette crise nous fait ressentir cruellement la perte de ce que nous avions gagnée grâce à cette loi en termes d'humanisation de la fin de vie. La Belgique, une exception ? La Belgique était-elle prête à affronter cette crise ? La réponse est incontestablement négative. L'ampleur de cette crise, difficilement prévisible, n'explique pas tout. Il y aura certainement des enseignements à tirer. En Belgique et ailleurs. Car tous les pays, qu'ils aient opté pour un confinement intensif ou léger, de la France à la Suède en passant par les Pays-Bas et en descendant vers la France, présentent à tout le moins un point commun : le lourd tribut payé par les résidents des maisons de retraite. Certes, et on nous le répète à satiété, les +65 ans représentent le groupe à risque. Ceci n'est pas une explication suffisante. Ces personnes fragilisées, très souvent atteintes de comorbidité ont été des oiseaux pour le chat dans des établissements sous-équipés. D'autres que moi ont dénoncé le manque de matériel de protection et l'absence de tests en temps utile. Au-delà de ce problème conjoncturel, il faut se poser la question des structures des établissements pour personnes âgées pourvues très rarement d'un encadrement adéquat de soins médicaux. C'était vrai avant la crise qui n'a fait qu'exacerber la problématique. Sans doute faut-il peser le pour et contre avant d'hospitaliser une personne âgée, surtout avec des facteurs comorbidité. Mais comme certaines de ces structures ne disposaient pas des moyens suffisants pour délivrer les soins, ne fût-ce que de confort, nombre de résidents sont morts dans des souffrances inacceptables, dans l'isolement total. Et des victimes collatérales ont été le personnel soignant (ou autre) impuissant quand il n'était pas lui-même contaminé par le virus et des familles qui ne pourront pas faire leur deuil. Cela aurait pu, aurait dû être évité.