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En Chine, faire un "selfie" pour qu'une intelligence artificielle puisse interpréter votre visage fait déjà partie de la vie quotidienne. Par ailleurs, on sait que les maladies cardiovasculaires peuvent avoir des symptômes visibles sur le visage: des cheveux gris ou clairsemés, des rides, un pli sur le lobe d'oreille, du xanthélasma, etc. D'où l'idée de recourir à la reconnaissance faciale pour les détecter de manière préventive. Une équipe chinoise a mené une étude auprès de 5.796 patients. Ces derniers ont subi des examens d'imagerie pour leurs vaisseaux sanguins (coronarographie ou angiographie coronarienne par tomodensitométrie) et ils ont été répartis au hasard en deux groupes d'intervention (5.216 patients, 90%) ou témoin (580, 10%). Des infirmières formées ont pris quatre photos du visage avec des appareils numériques: une de face, deux profils et une vue du haut de la tête et interrogé les participants sur leur statut socio-économique, leur mode de vie, leur pratique sportive et leurs antécédents médicaux. Des radiologues ont examiné les angiographies des patients et évalué le degré de maladie cardiaque en fonction du nombre de vaisseaux sanguins rétrécis de 50% ou plus et de leur emplacement. Ces données ont été utilisées pour créer, former et valider un algorithme d'apprentissage qui a ensuite été testé sur 1.013 autres patients. L'intelligence artificielle a réussi à détecter correctement les maladies cardiovasculaires dans 80% des cas, ce qui est mieux que les méthodes existantes de prédiction (modèle Diamond-Forrester et le Coronary Artery Disease score). D'après les conclusions, le menton, le front et le nez ont plus contribué à l'obtention des résultats que les autres parties du visage. "À notre connaissance, c'est la première étude qui prouve que l'intelligence artificielle peut être utilisée pour analyser les visages afin de détecter les maladies cardiovasculaires et ainsi identifier d'une manière simple, économique et efficace les patients qui nécessitent des examens plus approfondis", commente le Pr Zhe Zheng. Tout en admettant qu'il convient de tester l'algorithme sur de plus larges échantillons de participants, de différentes tranches d'âge et origines ethniques, mais aussi d'en améliorer la spécificité (54%), car un taux de faux positifs pouvant atteindre 46% est source d'anxiété pour les patients et risque d'entraîner des tests inutiles, le directeur de la recherche explique que l'objectif final est de développer une application pour les sujets à risque élevé. Elle permettrait à ces personnes d'auto-évaluer leur risque bien avant de se rendre à l'hôpital. Les auteurs de l'étude sont toutefois d'accord pour dire qu'avant d'utiliser un tel dispositif, il y a lieu d'être au clair avec l'éthique car la reconnaissance faciale peut constituer une menace pour la protection des données de santé. "Nous devons prêter attention à la confidentialité, aux questions d'assurances et à tous les autres aspects sociaux afin de s'assurer que l'utilisation soit uniquement médicale", conclut le Pr Zheng.