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La Convention médico-mutualiste une nouvelle fois sauvée. Le conflit portait sur deux points de rupture potentielle de l'accord: 1. l'interdiction des suppléments d'honoraires pour les bénéficiaires de l'intervention majorée (BIM) appliquée à tous les médecins, conventionnés ou non ; 2. les prélèvements sur les honoraires hospitaliers. Cet article concerne le premier point. "Ne pas tout faire péter." Dans de tels moments de tensions, les slogans vont bon train. Ça passe ou ça casse et jusqu'ici, miracle, ça ne casse pas. Comme dit Nicolas de Pape (le jdm n°2739), "L'Absym a atteint sa feuille de route qui était de ne pas tout faire péter". L'Absym-BVAS a surtout eu le mérite de mettre le ministre au pied du mur, en saisissant une clause forçant sa présence à une réunion de la médico-mut. Que faut-il pour apaiser les tensions sur les honoraires? De sa position à elle, chaque personne concernée - ministre, haut fonctionnaire, mutualiste, médecin ou... malade - voit des choses que les autres ne voient pas. Voilà pourquoi le respect mutuel entre tous les niveaux de pouvoirs s'avère indispensable. Pour protéger les personnes défavorisées, il faut d'abord les définir - tâche politique déjà remplie par le droit à l'intervention majorée. Il s'obtient à une des conditions suivantes: - Etre inscrit sous un statut particulier auprès de la mutualité, statut donnant directement accès à l'intervention majorée. Citons, parmi de nombreux critères: bénéficier du revenu garanti aux personnes âgées, d'une allocation handicapé, du revenu d'intégration sociale sur trois mois ininterrompus... - Ne pas dépasser un certain plafond de revenus, décision de la mutualité. Juste à 100%? Non. Certains obtiennent le statut BIM sans le demander, d'autres, dans le besoin, se le voient refuser. D'autres ne le demandent pas. Vu ces inévitables imprécisions, les gouvernants doivent laisser une marge d'appréciation aux personnes elles-mêmes. Le droit rend libre, l'obligation infantilise. Tous les BIM ne sont pas pauvres et tous les pauvres ne sont pas BIM. En finance comme en médecine, chaque personne réagit selon son caractère et sa situation. Une grande variété d'attitudes en résulte, réalité à prendre en compte dans la loi. Les situations peuvent s'objectiver en partie par le statut BIM. Les attitudes relèvent d'appréciations personnelles. Les politiques légifèrent à partir de principes généraux et de statistiques pour définir le statut de BIM. Ces données forment un cadre donnant droit aux honoraires conventionnés. Dans un pays de libertés comme le nôtre l'est encore, les BIM peuvent utiliser ce droit de diverses manières. Choix systématique de médecins conventionnés ou acceptation, selon les services reçus, d'honoraires plus élevés. Prestataires et patients se comportent ainsi en adultes capables de parler entre eux de tous les aspects de leur relation. Par contre, IMPOSER rigidement les honoraires conventionnés sur la seule base du statut BIM, sans que ni les BIM ni les médecins n'aient leur mot à dire, va trop loin. Les inévitables erreurs des évaluations générales ne peuvent se corriger qu'en respectant une part de libertés locales. Ajoutons encore que nombre de médecins non conventionnés modèrent leurs honoraires en cas de nécessité, indépendamment du statut BIM. Sans autre obligation que d'appliquer les tarifs conventionnés à la demande du patient, la loi permet donc de corriger les injustices résiduelles du statut BIM. Accorder le droit de demander des honoraires conventionnés est une chose, les imposer à tous les médecins en est une autre. La première solution respecte la convention tout en protégeant ceux qui ont vraiment besoin du tarif minimum, la seconde considère les patients et les médecins comme incapables du moindre dialogue sur les aspects financiers de leur relation. Elle méprise les citoyens. En outre, elle fait aux médecins un procès de cupidité systématique et détruit l'esprit de concertation à la base des accords médico-mutualistes. Il n'y a pas de système parfait, ni totalement dicté d'en haut, ni totalement libre en bas. Les lois doivent prendre en compte les positions des uns et des autres en termes de compétences, de qualités humaines et de contraintes d'argent. Les malades et les médecins étrangers vantent notre système, entre autres pour ses libertés. Lourde responsabilité pour le ministre s'il songeait vraiment à le détruire. Au contraire, il devrait le préserver. En jouant son rôle de gardien de la liberté cadrée par la loi.