De plus en plus de médecins souffrant de stress chronique cherchent de l'aide pour ne pas tomber en burn out. Plus vite ils le font, moins ils risquent de mettre la clef sous la porte. C'est le constat que font les psychologues Margot Garré et Marjolijn van den Berg du Brussels University Consultation Center (BRUCC) et de la Vrije Universiteit Brussel (VUB).
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Le burn out est précédé d'une période de stress chronique d'environ six mois. Il est dès lors crucial d'intervenir dès les premiers signes de fatigue excessive et de burn out, afin d'éviter que des troubles plus graves ne surviennent. "Cela permet d'éviter des décisions drastiques, comme l'arrêt total", explique Margot Garré. "Il est important de donner du temps à la réflexion et d'apprendre à changer sa vision des choses. Nous constatons aujourd'hui que les médecins ont une approche plus préventive et n'hésitent pas à se faire accompagner et à fixer leurs limites."Attendre trop longtemps, c'est s'exposer à des difficultés beaucoup plus grandes, pour le médecin lui-même, mais aussi pour sa famille, ses enfants et ses patients. "Il arrive qu'il perde de sa sensibilité face au patient, se montre émotionnellement et cognitivement déséquilibré", poursuit-elle. "Une personne en burn out a besoin d'une période de remise sur pied, idéalement avec un accompagnement adapté, une revalidation active et du repos. De nombreuses questions sont alors soulevées: qu'est-ce qui me donne de l'énergie? La concertation avec les collègues amène-t-elle une valorisation de mon travail? Est-ce que je préfère travailler en solitaire ou dans un cabinet groupé?"Le soutien et l'accompagnement peuvent prendre des formes diverses et se dérouler en plusieurs phases. "Le médecin peut opter pour un accompagnement individuel ou une thérapie de groupe. Dans ce dernier cas, les participants échangent sur des thèmes importants. Rencontrer et parler avec des collègues de sa situation, c'est stimulant." Selon Marjolijn van den Berg, les ateliers ont souvent un intérêt préventif. "L'accompagnement individuel apprend plutôt à équilibrer sa vie et à renforcer sa résistance au burn out", intervient-elle. Les psychologues peuvent venir en aide aux médecins atteints de troubles émotionnels. "Nous affinons notre accompagnement en fonction des connaissances préalables des personnes", ajoute Margot Garré. "Savoir grâce à son regard professionnel, ce n'est pas la même chose que de l'appréhender d'un point de vue personnel. Nous ne pouvons partir du principe qu'un médecin sait tout." Margot Garré et ses collègues conseillent aux médecins craignant un burn out de remplir le Burn out Assessment Tool (BAT). Cet outil a pour objectif de détecter un éventuel burn out par le biais de questions ciblées. "Des signaux comme la fatigue constituent une invitation à remplir ce formulaire", assure Margot Garré. "C'est une aide précieuse pour les soignants et leurs patients."En tant que médecin, mieux vaut opter pour une pratique médicale qui respecte ses propres limites et celles du patient. "Certains veulent toujours consulter, ont besoin d'un médecin pour se rendre la vie un peu plus douce, et les généralistes n'aiment pas laisser tomber leurs patients. Toutefois, le médecin ne doit pas seulement s'occuper du bien-être de l'autre, mais aussi du sien. Il ne faut pas nécessairement répondre à toutes les questions du patient au cours d'une seule consultation. Une manière de faire comprendre que des limites claires et saines sont nécessaires à une relation de confiance. Cela permet de continuer à fonctionner, de garder un impact sur les personnes que vous accompagniez et de montrer un comportement sain. Vous prenez soin de vous et assurez par la même occasion votre satisfaction professionnelle", poursuit Margot Garré. Les médecins forment sans conteste un groupe à risques en matière de burn out. "Le covid-19 a donné une énorme charge de travail supplémentaire aux généralistes", déplore Marjolijn Van den Berg. "Difficile pour eux par exemple de rentrer à temps à la maison." Le thème du burn out est aujourd'hui plus facilement abordé, constate Margot. "On accorde davantage d'attention au soutien aux soignants, dont les médecins. Il ne faut pas oublier que ceux-ci doivent rester sur le pont en temps de crise. À nous donc de veiller à leur santé mentale. Les médecins ne doivent pas être des super-héros ; ce sont avant tout des êtres humains."